•  Asie  24 Mai 2010  |  Mise à jour le 25 Mai 2010

    Corée: Obama s'oppose à Pékin

    La tension monte entre les deux Corée et la communauté internationale s'empare du dossier. Washington soutient Séoul, alors que la Chine, par la voix de son Premier ministre Wen Jiabao, opte pour la neutralité et un sobre appel à la paix.

     

    La guerre de Corée n'est pas prête de se terminer (*) . Après le débat sur le nucléaire nord-coréen, en 2009, l'affaire du Cheonan, cette corvette militaire sud-coréenne qui a été coulée par une torpille nord-coréenne selon des experts internationaux, ravive les tensions entre les deux parties. Lundi, face aux propos belliqueux des politiques, à Séoul comme à Pyongyang, la communauté internationale s'est emparée du dossier.

    Pour l'heure, la Corée du Sud a suspendu ses relations commerciales avec son voisin du Nord, demandant aux autres partenaires de Pyongyang d'en faire autant. Dans une allocution télévisée, le président sud-coréen, Lee Myung-bak, a annoncé qu'il soumettrait cette question au Conseil de sécurité de l'ONU. Séoul exige, au moins, des excuses officielles pour le torpillage du navire et la mort, dans le naufrage, de 46 de ses membres d'équipages. En retour, son frère ennemi menace de (re)lancer "la guerre totale".

    La paranoïa d'un retour de guerre froide

    Outre-Pacifique, les Etats-Unis se préparent déjà au pire. Washington, qui maintient un contingent de 28.000 hommes dans la moitié Sud, a rapidement apporté son soutien à la Corée du Sud. Jugeant la situation "extrêmement précaire", la Maison blanche a signalé, par communiqué, avoir demandé à l'armée américaine de se coordonner pour se tenir prête à dissuader la Corée du Nord de toute agression. Lee Myung-bak a d'ailleurs prévenu qu'il invoquerait le droit à l'auto-défense en cas d'attaque. A la suite de l'intervention télévisuelle du président sud-coréen, le Japon, actuellement membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, lui a apporté son soutien. Le secrétaire général de l'ONU s'est, lui, montré plus neutre: "Je suis convaincu que le Conseil, assumant sa responsabilité de maintien de la paix et de la sécurité internationales, prendra des mesures appropriées à la gravité de la situation", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.

    La Chine, seul soutien de poids à Pyongyang, était restée discrète jusqu'aujourd'hui. Mais Pékin semble choisir la voie de la neutralité. Partenaire commercial des deux Corée, le pouvoir chinois n'a aucun intérêt à ce que le conflit reprenne dans son aire d'influence économique. Aussi, le Premier ministre Wen Jiaboa s'est contenté d'appeler au retour au calme et à la paix. Jouant le rôle de diplomate dans ce dossier, il devrait s'entretenir avec les deux chefs d'Etat coréens cette semaine. Plus que la sauvegarde du dernier régime communiste-stalinien de la planète, Pékin veut également éviter la présence en nombre de troupes américaines à ses frontières. S'il n'est pas question de retour à une nouvelle guerre froide, la Corée reste le théâtre d'une bataille d'influenceentre les deux superpuissances.

    (*) En effet, débutée le 25 juin 1950, le conflit s'est conclut le 27 juillet 1953 sur un armistice. Un texte provisoire signé par les deux parties dans l'attente d'un traité de paix. Mais après plusieurs mois de tensions, Séoul et Pyongyang ont abandonné les négociations. Depuis, plusieurs incidents aux frontières ravivent les tensions entre les deux pays. Le 27 mai 2009, en plein débat sur le nucléaire nord-coréen, la moitié Nord a envisagé l'annulation de l'armistice


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    Par Jim Jarrassé
    25/05/2010 | Mise à jour : 16:15
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    Thaksin Shinawatra, le 26 avril dernier à Podgorica, au Monténégro.
    Thaksin Shinawatra, le 26 avril dernier à Podgorica, au Monténégro. Crédits photo : ASSOCIATED PRESS

    Le gouvernement thaïlandais accuse Thaksin Shinawatra, en exil depuis 2006, d'être impliqué dans les violences en marge des manifestations des «chemises rouges». S'il est extradé, il risque la peine de mort.

    C'est un pas supplémentaire que vient de franchir mardi le pouvoir thaïlandais dans la guerre sans merci qu'il livre contre Thaksin Shinawatra. Mardi, la cour criminelle de Bangkok a émis un mandat d'arrêt contre l'ancien premier ministre, accusé de «terrorisme». Le gouvernement lui reproche d'avoir incité ses partisans, les «rouges»,à la violence et financé le mouvement qui a occupé le centre de Bangkok pendant des semaines pour réclamer le départ de l'actuel premier ministre Abhisit Vejjajiva. Au moins 88 personnes sont mortes entre le début des manifestations mi-mars et la dispersion par la force du mouvement la semaine dernière.

    Selon le Département thaïlandais des enquêtes spéciales , qui s'occupe du dossier, il existe «suffisamment de preuves» pour faire arrêter Thaksin, notamment pour son «rôle de coordinateur» dans les émeutes. Samedi, le gouvernement avait exposé un arsenal d'armes qu'il affirme avoir saisi dans le camp des manifestants. Une présentation destinée à asseoir ses accusations contre le richissime Thaksin, qui reste pour Bangkok le seul à même de financer une telle organisation.

    Idolâtré par les paysans du nord et du nord-est de la Thaïlande pour les programmes sociaux d'aide aux plus pauvres menés alors qu'il était au pouvoir, Thaksin est en revanche décrit par ses détracteurs comme populiste, autoritaire et corrompu. Il avait cependant été réélu triomphalement en 2005 avant d'être renversé en 2006 par un coup d'Etat militaire. En février dernier, la Cour suprême l'avait jugé coupable d'abus de pouvoir et gelé la moitié de sa fortune, soit 1,4 milliard de dollars.

    Partie de cache-cache

    Désormais, si la procédure pour «terrorisme» devait aller à son terme, c'est la peine de mort que risque l'ancien premier ministre. Mais avant de le juger, le gouvernement thaïlandais doit d'abord savoir où le leader se cache… Car Thaksin, très discret, a l'art de multiplier les déplacements. Ayant établi son camp de base à Dubaï depuis son exil en 2006, il a été aperçu la semaine dernière à Paris. Il a quitté la capitale dimanche et est arrivé lundi au Monténégro, pays dont il possède la nationalité et dans lequel il séjourne très régulièrement. Il aurait pris ses quartiers dans la station balnéaire de Budva, sur la côte adriatique. Un choix qui ne doit rien au hasard : en vertu de sa loi, le Monténégro n'extrade pas ses citoyens. Thaksin devait repartir ce mardi pour une destination inconnue.

    Thaksin était de nouveau attendu à Paris le 31 mai pour un dîner-débat organisé par le Center of Political and Foreign Affaires, institut de réflexion sur la politique internationale dirigé par l'homme d'affaires Fabien Baussart. Mais, malgré les appels au maintien de l'organisateur, la rencontre risque de ne pas avoir lieu. La semaine dernière, lors du passage de Thaksin à Paris, le Quai d'Orsay lui avait intimé de «s'abstenir de toute manifestation ou déclaration publiques pendant son séjour». «Il nous a assuré qu'il donnerait suite à nos demandes. J'ai l'impression qu'il ne va pas revenir tout de suite en territoire français», explique au figaro.fr Bernard Valero, porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Le Quai d'Orsay précise cependant aussi qu' «en l'état, Thaksin ne pourrait être extradé de France, le mandat d'arrêt contre lui n'étant pour le moment pas international». Le ministre des Affaires étrangères thaïlandais Kasit Piromya a déclaré pour sa part que le gouvernement travaillerait avec Interpol pour arrêter Thaksin.

    Depuis le Montenegro, Thaksin a pu s'exprimer librement mardi. Dans un communiqué, il a démenti être le «cerveau des terroristes» et se dit victime d'une machination. «Le mandat d'arrêt à mon encontre est injuste. Je suis prêt à prouver que l'accusation est motivée par des raisons politiques», assure-t-il. Avant de contre-attaquer : «La junte en Thaïlande doit aujourd'hui être tenue pour responsable des morts et abus des droits de l'Homme» dans le pays.


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    À Bangkok, un grand nettoyage est en cours pour effacer les traces des affrontements entre l'armée et les manifestants. (Photo : AP)
     



    À Bangkok, un grand nettoyage est en cours pour effacer les traces des affrontements entre l'armée et les manifestants. (Photo : AP)

    Quatre jours après l'assaut de l'armée contre les «chemises rouges», le premier ministre annonce la réouverture des écoles, des rues et des services du gouvernement dès lundi.

    «Tout est calme et revient à la normale» en Thaïlande, a assuré dimanche le premier ministre. Dans son allocution télévisée hebdomadaire, Abhisit Vejjajiva a annoncé que, par conséquent, les mesures concernant la fermeture des écoles et la suspension des services du gouvernement seraient levées dès lundi. La circulation dans les rues va également être rétablie, après les six semaines de manifestations antigouvernementales des «chemises rouges» au cours desquelles un total d'au moins 86 personnes ont été tuées et 1.900 autres ont été blessées.

    Mercredi, le gouvernement a lancé une offensive militaire pour déloger les «rouges» du campement qu'ils avaient établi au cœur de Bangkok. 16 personnes ont trouvé la mort et une centaine d'autres ont été blessées au cours de l'assaut. Les manifestants ont capitulé peu après l'attaque. Dans la capitale, un grand nettoyage est actuellement en cours pour effacer les traces des affrontements.

    Dans son discours à la nation, le premier ministre a défendu l'action de l'armée. Les forces de sécurité ont fait «usage de toutes les armes sur la base des normes internationales. (Elles) ont utilisé les armes pour se défendre et rétablir l'ordre public», a-t-il expliqué.

    Pas d'élections anticipées

    Abhisit Vejjajiva s'est également montré ferme vis-à-vis des «rouges», qui réclamaient sa démission et la tenue d'élections anticipées, en insistant sur sa volonté de ne pas céder à leurs revendications. Avant de penser aux élections, «nous devrons voir ce qui va arriver», a-t-il déclaré, évoquant «des gens qui continuent à parler de poursuivre la lutte et d'organiser une manifestation en juin». Selon la loi en vigueur, Abhisit Vejjajiva n'est pas obligé d'organiser un nouveau scrutin avant décembre 2011.

    Malgré ce «retour à la normale», l'agence gouvernementale chargée des situations d'urgence «a prolongé le couvre-feu (imposé mercredi dernier) de deux nuits à Bangkok et dans 23 provinces par mesure de sécurité».


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  • Paul Goze / Président de l’USAP

    «Le drapeau catalan, c’est comme la burqa»

    Vendredi 30.4.2010. 21:00h


    Le tryptique sport-identité-business réussit à l’USAP, qui figure parmi les plus grands clubs européens malgré un budget d’à peine 16 millions d’euros. Son président, Paul Goze, vise 20 millions à moyen terme mais reste discret sur les salaires des joueurs, « ça ne se dit pas ». Comme le Barça pour le football, il souhaite créer, avec l'USAP, un phare du rugby pour l’ensemble de la Catalogne. Paul Goze, président de l'USAP, dans son bureau du stade Aimé Giral de Perpignan, 28 avril 2010 / "La Clau"


    L’USAP est leader du Top 14, avec un budget moyen. Quel est le secret ? 

    En budget consolidé, c'est-à-dire en comprenant les boutiques, et, bientôt, notre brasserie ouverte Quai Vauban, à Perpignan, nous sommes le 6ème budget du championnat. A l’arrêté du 30 juin nous serons autour de 16 millions d’euros pour la saison 2009-2010. Mais il n’y a pas de secret. Chaque joueur est payé en fonction de sa valeur et aucun n’est payé à des sommes trop importantes par rapport à ce qu’il vaut. Nombre d’entre eux, de très bon niveau, sortent de notre centre de formation et coûtent donc moins cher pendant les premières saisons. 


    L’USAP est un exemple du rugby français pour la qualité de ses infrastructures, c’est un peu l’anti-Toulon, qui ne dispose que d’un seul mécène. Pour son développement, où en est l’idée d’un nouveau stade ? 

    Nos projets sont complémentaires, à moyen terme et long terme. Pour un nouveau stade, entre le moment où une décision sera prise, et sa réalisation, il se passera 10 ans. Nous regardons plutôt dans les 2 ou 3 ans qui viennent, avec le développement du Stade Aimé Giral, pour accueillir le nombre de spectateurs et les partenaires que nous souhaitons avec les espaces réceptifs adéquats, et enfin recevoir les bénéfices de ces transformations, donc faire progresser le club. Mais l’idée d’un grand stade peut toujours être discutée. J’y pense, mais c’est du très long terme. La jauge d’un stade à Perpignan, pour nous, à l’heure actuelle et dans un avenir proche, serait de 18.000 à 20.000 places, ce qui conditionnerait une politique commerciale différente. Pour l’instant, nous sommes coincés .

    Le seuil de 20 millions de budget est décisif au sein du Top 14. Quelles sont vos stratégies pour l’atteindre ? Droits télé ? Investisseurs français, sud-catalans ? 

    La Ligue Nationale de Rugby (LNR) négocie les droits télé, donc je n’y suis pour rien, mais nous partageons les droits à part égale. En tant que membre du Comité Directeur de la ligue, je vais participer à une réflexion. En termes de partenaires, nous travaillons d‘abord le local, avec un gros travail déjà effectué, et une marge de progression. Nous travaillons aussi le sud de la Catalogne, et nous travaillons à Paris, à travers une agence, pour ramener chez nous des partenaires nationaux et
    internationaux, comme nous en avons déjà. Dans les cinq prochaines années, en imaginons d’obtenir une augmentation équivalente à celle des cinq dernières, nous devrions être à 25 millions en 2015. Mais c’est une hypothèse que je ne retiens pas, car elle exige une augmentation de 5% par an, qui sera difficile à réaliser. Raisonnablement, je vise 19,5 millions ou 20 millions dans cinq ans. Il faut donc jouer sur tous les leviers : le prix des places, les abonnements, les partenariats, la télévision et les collectivités locales. 

    Quels sont vos nouveaux partenaires ? 

    Nous avons signé pour la première fois le partenaire « Catalunya », c'est-à-dire le label touristique du Gouvernement catalan, et nous venons de signer avec Collverd (géant du foie gras installé à Vilamalla, près de Figueres - ndlr). 

    La presse parisienne prétend que l’USAP est l’équipe de toute la Catalogne, nord et sud… 

    C’est un peu vrai et c’est ce que nous tentons de faire, au-delà des partenaires. Nous travaillons au développement du rugby en Catalogne sud, avec notre centre de formation. Nous avons signé une charte en ce sens, avec une vingtaine de clubs, nous invitons des jeunes joueurs du sud à tous les matchs, nous avons un entraîneur, que nous finançons, détaché auprès de la Fédération Catalane de Rugby, à Barcelone. Et puis un jeune de Sant Boi, au Sud (Hèctor Garcia - ndlr) fera son entrée au centre de formation à la rentrée prochaine. Tout cela favorise le développement et l’image de l’USAP au sud, pour que l’USAP soit le club de rugby de toute la Catalogne, comme le Barça en matière de foot. Tout cela, visible depuis en 2007, sert l’implantation véritable du rugby en Catalogne, et c’est parfaitement assumé. Notre titre obtenu en 2009 a beaucoup joué, car le public du Sud, qui a vu le match, a été sensibilisé par la catalanité que nous dégageons. Il y a des choses significatives : des dizaines de Catalans du sud assistent d’ailleurs à tous nos matchs, et, en mars 2008, lors de l’ouverture de notre billetterie sur Internet, le tout premier ticket a été vendu à un gars d’Olot (province de Girona, ndlr). La culture rugby s’installe au sud. 

    L’identité catalane est ostentatoire à l’USAP… Identité réelle ou identité marketing ?

    C’est une identité réelle, même si je parle très mal le catalan. Le côté marketing est obligatoire, mais c’est une conséquence, et non pas un but. 

    Le phénomène identitaire n'était pas commenté lors de la finale de 1955 : tous les joueurs parlaient catalan, mais point de drapeaux. En 2010, aucun ne parle catalan, mais les drapeaux sont par milliers…

    Je ne peux pas vous l’expliquer. Aujourd’hui, il y a une véritable marée de drapeaux sang et or. Mais si un jour nous sommes plus ouverts, puisque mon but est d’accueillir d’autres joueurs catalans du sud au centre de formation, et que l’un d’eux devienne équipier premier, j’aimerais que les drapeaux restent. Après les années 1960, mauvaises pour nous, nous sommes partis plusieurs fois en phase finale. Lorsque j’ai effectué ma première phase finale à l’USAP, en 1971, il y avait quelques drapeaux, puis ce phénomène s’est développé, puis est passé à de fortes doses, avec la grillade et le drapeau catalan, pour suivre l’équipe. La modernité a commencé après les années 1970, alors que les gens parlaient déjà beaucoup moins catalans. 

    Pourquoi ont-ils alors brandi le drapeau ? Cela vient d’une certaine vision des gens qui jugeaient que nous étions considérés comme des parents pauvres par le reste de la France. On a voulu montrer notre identité par compensation, comme pour dire « Nous savons que nous sommes traités comme des gens lointains, comme le trou du cul de la France, en bas, comme une zone délaissée par la France, comme les derniers arpents de terre avant l’Espagne ». Je pense que le message de cette époque, dans l’imaginaire populaire, était « Vous ne vous occupez pas de nous, on s’en fout, puisqu’on est catalans, c’est normal, on n’est pas de chez vous ». Cette revendication de l’identité est semblable à la présence musulmane : si les filles mettent la burqa et les mecs parlent comme ils parlent, c’est parce qu’ils ne se sentent pas intégrés, et donc mettent en exergue leurs différences. A petite échelle, les drapeaux catalans, c’est la même chose, parce qu’on se sent mal-aimés, maltraités, ou traités par-dessus la jambe. Mais en comparaison, lors du dernier match du Barça que j’ai vu à Barcelone, il y avait deux drapeaux !

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    Une rétrospective de Balbino Giner Garcia est visible à « A Cent mètres du centre du monde ». Une occasion de faire le tour de cette galerie importante, ouverte à Perpignan en 2004.

    Balbino Giner, A Cent Mètres du Centre du Monde, à Perpignan

    Vendredi 30.4.2010. 21:00h


    Le centre d’art "A cent mètres du centre du monde" a ouvert en 2004 sur une initiative de Vincent Madramany, son fondateur et directeur. Il s’agit d’une initiative qui lui revient entièrement. Vincent Madramany a été un important chef d’entreprise implanté au marché international Saint-Charles de Perpignan. En parallèle, il a réuni une collection d’artistes vivants. Son arrière cour abritant un immense ancien magasin, il a fait le rêve d’y créer un grand centre d’art contemporain. C’est avec quatre ans de retard sur ses prévisions, en 2004, que Madramany ouvre ce lieu, exploité par une association regroupant de nombreux mécènes. 

    Une ligne d’expositions 

    Dès le départ, les choix de Vincent Madramany en matière d’art sont clairs : sa collection reflète ses goûts. Et c’est sans doute là sa force : là où les instances publiques sont contraintes à des commissions et des compromis inévitables, les collectionneurs privés sont souvent monomaniaques. Vincent Madramany est né à València, dont il connaît bien la scène, et possède des œuvres de plusieurs artistes : Armengol, Barberà, Heras. Chacun d’eux se voit d’emblée consacrer une exposition monographique avec catalogue. Des coproductions se mettent en place avec l’Institut Valencien d’Art Moderne (IVAM). Les choix sont précis et reflètent, à la manière d’une fondation naissante, les goûts et l’histoire du fondateur. 

    La peinture française 

    Puis une série d’expositions explore l’œuvre d’artistes français : Viallat, Ben tout d’abord. Difficile de faire du nouveau avec ces vieux loups, d’autant qu’ils ont beaucoup été montrés dans la région. Les expositions ont au moins l’avantage de montrer la fidélité de Madramany à ces artistes des années 1970. Mais la véritable passion du collectionneur valencien est dédiée à l’œuvre de Jean le Gac. Celui-ci se voit consacrée une exposition en 2006 qui fait date dans la biographie du peintre de la galerie parisienne Templon. Madramany continue d’ailleurs de prêter de nombreuses œuvres du peintre pour des expositions, à Paris ou ailleurs. 

    Balbino Giner Garcia 

    L’exposition en cours, celle de Balbino Giner, coproduite avec le consortium des musées de València, retrace le parcours du peintre né à València et mort à Perpignan. Plus d’une centaine d’œuvres sont accrochées, pour reprendre les traces singulières laissées par l'artiste. Une peinture aux styles éclatés, de l’académisme tardif des années trente à un expressionisme à la Kirchner. Le grand nombre d’œuvres et l’accrochage thématique rendent difficile la compréhension globale. L’exposition peine à nous faire saisir l’intérêt réel de l’œuvre de Balbino, les superlatifs ne faisant pas un commissariat. Mais l’œuvre elle même est tellement inégale que l’exercice est périlleux. Au moins, hommage est rendu à ce prophète en son pays. 

    Entre deux eaux 

    Le centre, après six ans d’existence, joue un rôle phare dans le paysage perpignanais, où l’art contemporain n’est souvent qu’une ballade entre gens qui sont nés quelque part. On aime vraiment lorsque Madramany est plus indépendant, et découvre de jeunes artistes allemands tels que Eichhorn (2006), ou français (Corpet 2007, ou Penchréac’h, à venir). Mais sans doute, pour rencontrer le succès public et médiatique, faudrait-il programmer, à la manière des fondations, d’importantes et historiques expositions estivales, n’ayant pas forcément de lien de territoire avec la Catalogne. Quitte à élargir à l’histoire de l’art moderne, autant présenter des artistes majeurs qui, attirant des publics plus nombreux, feront bénéficier de leur aura les autres expositions du centre. Une telle démarche impliquerait de passer un cap structurel bien sûr, mais également culturel dans une région où l’histoire de l’art ressemble parfois à une condamnation. C’est l’espoir que porte aujourd’hui le centre d’art de Vincent Madramany. 

    « Balbino Giner Garcia », A cent mètres du centre du monde (A.C.M.C.M), 3, avenue de Grande Bretagne 66000 Perpignan.www.acentmetresducentredumonde.com. Jusqu’au 13 juin 2010.


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