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INDE"L'élection en Uttar Pradesh est cruciale pour le parti au pouvoir"
Kunal Majumder, journaliste pour l'hebdomadaire Tehelka, a suivi la campagne électorale en Uttar Pradesh. Alors que l'élection entre dans sa 6e phase, le mardi 28 février, il répond aux questions de Courrier international.
28.02.2012 | Propos recueillis par Naïké Desquesnes | Courrier internation
Qu'est-ce qui fait de l'élection régionale en Uttar Pradesh un exercice démocratique exceptionnel ?
Le processus électoral en Uttar Pradesh, l'Etat le plus peuplé d'Inde avec ses 200 millions d'Indiens, s'étale sur un mois entier et se divise en sept phases. Si cet Etat avait été un pays, il aurait été à la cinquième place mondiale en ce qui concerne la population ! Nous sommes donc en train d'observer l'un des exercices démocratiques les plus importants au monde. Beaucoup considèrent que notre commission électorale est la gardienne de la démocratie indienne car, depuis plus de soixante ans, elle a permis la tenue d'élections relativement libres et régulières. Certains de ses membres sont si stricts qu'ils sont même haïs par les politiques... C'est sans doute pour cela que les électeurs ne boudent pas les urnes. Cette fois-ci, ils ont participé en masse. Durant les cinq premières phases, le taux de participation a été de 60 %, soit presque 20 % de plus que lors de la dernière élection régionale, en 2007.
La "reine des intouchables", Mayawati Kumari, qui est aussi la ministre en chef sortante [plus haute fonction à l'échelle régionale], fait aujourd'hui campagne pour garder le pouvoir. Comment analyser les cinq années qu'elle a passées à la tête de l'Etat ?
Mayawati est une femme politique remarquable, qui a fait du Bahujan Samaj Party (BSP), le parti des intouchables, une force politique qu'on ne peut plus ignorer. Elle appartient à la caste des intouchables, la plus basse dans la hiérarchie sociale indienne, mais elle a réussi à s'imposer dans un paysage politique dominé par les hautes castes. Est-elle en bonne position pour emporter un nouveau mandat ? Rien n'est moins sûr. Durant les cinq dernières années, son mandat a été terni par de nombreuses affaires de corruption. Devenue une leader mégalo, elle a dépensé des sommes astronomiques dans la construction de statues à son effigie dans la capitale de l'Etat, Lucknow. Récemment, elle s'est même félicitée d'avoir fait de Lucknow le Paris de l'Inde, à quoi beaucoup ont répondu qu'elle n'avait sans doute jamais vu Paris ! Elle a tout de même réussi à lutter contre l'insécurité et la criminalité en Uttar Pradesh de manière efficace. La situation s'est nettement améliorée. Hélas, elle a régulièrement refusé la réalisation de projets de développement dans les districts qui n'avaient pas voté pour elle, se concentrant seulement sur ceux où son électorat dalit était le plus nombreux.
Lors de cette élection, l'enjeu est immense pour le parti du Congrès, au pouvoir au niveau national. Les journaux indiens parlent beaucoup de la campagne de Rahul Gandhi, l'héritier de la dynastie Gandhi-Nehru. Réussit-il à convaincre les foules ?
En réalité, le parti du Congrès n'a pas autant d'importance que les médias nationaux veulent nous le faire croire. Le combat se joue entre le Samajwadi Party, la formation de Mulayam Singh, et le BSP, la formation de Mayawati Kumari. Pour Rahul Gandhi, qui fait campagne actuellement, il s'agit simplement de se mettre à l'épreuve, de voir s'il est capable d'être un leader populaire. J'ai assisté à quelques-uns des meetings de Rahul et il a énormément de mal à susciter l'enthousiasme parmi les jeunes. Il ne connaît pas le terrain, n'est pas de la région. Son adversaire, Akhilesh Yadav, le fils de Mulayam Singh, est bien plus populaire. Il est originaire d'Uttar Pradesh, il est jeune, il a commencé à faire campagne bien avant Rahul. Akhilesh Yadav est la véritable surprise de cette élection, bien plus que Rahul Gandhi.
On dit que cette élection est une répétition générale avant les législatives de 2014, qui détermineront la composition de l'Assemblée nationale indienne.
Cette élection est cruciale pour le parti actuellement au pouvoir en Inde, le Congrès. Si le Congrès réussit à emporter un nombre important de sièges, alors cela permettra de légitimer Rahul Gandhi comme nouveau leader du parti pour les élections de 2014. En Inde, l'Uttar Pradesh est la région des Premiers ministres. Même le premier Premier ministre pakistanais était d'Uttar Pradesh ! Rahul est pour le moment protégé par le parti, qui semble vouloir lui donner sa chance en laissant de côté une autre figure montante, sa sœur Priyanka. Il tente aussi de faire évoluer le discours politique indien, se concentrant sur le développement, les aspirations des jeunes et des minorités, plutôt que de se cantonner au discours traditionnel sur les castes et les communautés. Mais il doit encore faire ses preuves...
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Tags : INDE, élections, Uttar Pradesh, cruciale, parti au pouvoir
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