• Affaire Sakineh en Iran : son avocat condamné à six ans de prison !

    Affaire Sakineh en Iran : son avocat condamné

    à six ans de prison !

    Modifié le 20-02-2012 à 17h14

    Temps de lecture Temps de lecture : 4 minutes

    LE PLUS. Daniel Salvatore Schiffer renouvelle l'appel déjà lancé à l'été 2010 alors que Javid Hutan Kian, l'avocat de l'Iranienne Sakineh, vient d'être condamné à 6 ans de prison, après plus d'un an d'emprisonnement et de torture. 
     

    Voilà maintenant un an et demi très exactement que quelques-uns de mes ami intellectuels et moi lancions, le 19 août 2010, sur le site du journal "Le Monde", puis cinq jours après, sur le site de l’hebdomadaire "Le Nouvel Observateur", un appel solennel, sous forme de "lettre ouverte aux autorités iraniennes", à la libération de Sakineh, cette jeune femme condamnée en 2006 à la lapidation pour adultère, ainsi que complicité de meurtre à l’encontre de son mari, par la République Islamique d’Iran.

     

    Ainsi, face à une mobilisation quasi planétaire, la justice iranienne finit-elle par surseoir à ce châtiment, particulièrement barbare : Sakineh fut donc condamnée pour ce supposé meurtre à dix ans de prison, tandis que la lapidation, peine communément appliquée par la charia en cas d’adultère, fut commuée - ce qui ne constitue guère un sort beaucoup plus enviable - en pendaison.

     

    Depuis ce deuxième verdict, qui fut rendu le 17 janvier 2011, il y a donc un peu plus d’un an, plus aucune nouvelle de Sakineh, laquelle a été alors mise au secret, sans plus pouvoir avoir de communication avec ses proches, dans le quartier spécial de haute sécurité de la prison de Tabriz, non loin de Téhéran.

     

    Sakineh Mohammadi Ashtiani et son fils Sajjad.

    Sakineh et son fils Sajjad, à Tabriz le 1er janvier 2011 (VAHID SALEMI/SIPA).

     

    Mais, en cette tragique et sombre affaire, Sakineh ne fut pas la seule victime : son fils, Sajjad Ghaderzadeh, ainsi que son avocat, Javid Hutan Kian, furent également arrêtés "manu militari", le 10 octobre 2010, pour avoir osé nouer des contacts avec l’Occident afin de tenter, à force de pressions morales sur les autorités politico-religieuses de leur pays, de sauver la pauvre Sakineh d’une mort aussi atroce.

     

    Certes son fils, quelques semaines après, a-t-il été libéré. Mais son avocat, lui, jamais ! Au contraire : emprisonné lui aussi depuis lors, il y a donc un an et demi déjà, dans la prison de Tabriz, et plus précisément encore dans la section réservée aux toxicomanes ainsi qu’aux malades du sida, il a été fréquemment torturé, battu violemment, au point que son état de santé s’avère aujourd’hui, selon des sources bien informées (dont l’agence internationale Herana, soucieuse du respect du droit humanitaire), inquiétant, voire alarmant.

     

    Davantage : cet avocat de Sakineh, Javid Hutan Kian, vient d’être officiellement condamné, par ces mêmes autorités judiciaires iraniennes, à six ans de réclusion criminelle, selon une information de la HRANA reprise par le site Internet de la Repubblica.

     

    Son prétendu délit, justifiant pareille et injuste sentence : "avoir attenté à la sécurité nationale en faisant propagande contre la République Islamiste et avoir porté atteinte à la réputation du Pays en accordant à des médias étrangers des interviews critiques à l’encontre des autorités iraniennes".

     

    D’où cet appel que je lance à nouveau à la conscience du monde civilisé : il est urgent, face à pareille iniquité, de demeurer plus que jamais vigilants et de ne surtout pas baisser, un tant soit peu, la garde. Il en va, sinon de la vie, du moins de la survie, jusqu’à des jours meilleurs peut-être, de personnes innocentes (Sakineh et Javid) mais pourtant abusivement emprisonnées dans d’infâmes cachots d’un Iran aujourd’hui moyenâgeux plus encore que rétrograde.

     

    L’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême en même temps que chef spirituel de la Révolution islamique d’Iran, entendra-t-il, lui qui est le seul à pouvoir encore gracier Sakineh, cet énième appel à la clémence ?

     

    Quant à la pétition contre la peine de mort qui, signée par des dizaines d’intellectuels internationaux et moi-même, a été présentée il y a quelques mois à peine, à l’ONU, il reste à espérer que, loin de demeurer un vœu seulement pieux, voire vain, elle servira effectivement de préambule à une résolution, officielle autant qu’universelle, allant en ce noble et juste sens : il en va du progrès de notre civilisation occidentale, sinon de l’avenir de l’humanité tout entière.

     

    Je rappelle ici les noms, ainsi que leur titre et fonction, des premiers signataires de notre "lettre aux autorités iraniennes", publiée donc, le 19 août 2010, sur le site du journal "Le Monde", et le 24 août 2010 sur le site de l’hebdomadaire "Le Nouvel Observateur", avant que de se voir publiée ensuite dans quelques-uns des plus grand médias européens ("La Repubblica" en Italie ; "Le Soir" et "La Libre Belgique" en Belgique ; "El Pais" en Espagne ; "Tageblatt" et "Le Jeudi" au Luxembourg) :

     

    Signataires :

     

    Marc Bressant (écrivain, Grand Prix du Roman de l’Académie Française)

    Luc Ferry (philosophe, ancien Ministre français de l’Education Nationale)

    Dario Fo (écrivain, dramaturge, prix Nobel de littérature)

    Viviane Forrester (écrivain)

    Caroline Fourest (essayiste, éditorialiste au "Monde" et à "France Culture")

    Max Gallo (historien, écrivain, membre de l’Académie Française)

    Marek Halter (écrivain)

    Alexandre Jardin (écrivain)

    Julia Kristeva (psychanalyste, écrivain)

    Edgar Morin (sociologue, philosophe)

    Gilles Perrault (écrivain)

    Michelle Perrot (historienne, Professeur émérite des Universités)

    Nicolas Rey (écrivain)

    Elisabeth Roudinesco (historienne, Université de Paris VII)

    Daniel Salvatore Schiffer (philosophe, écrivain)

    Roberto Saviano (écrivain)

    Michel Serres (philosophe, membre de l’Académie Française)

    Gilbert Sinoué (écrivain)

    Alain Touraine (sociologue, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales)

    Michel Wieviorka (sociologue, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales)

     

    A cet appel se sont associés, à travers la prestigieuse fondation "Science for Peace" du professeur Umberto Veronesi, treize autres personnalités de tout premier plan, dont cinq prix Nobel :

     

    Jacques Bernier (fondateur de l’Industrial Innovation Center de Montréal)

    Ingrid Betancourt (ancien otage des FARC, en Colombie)

    John Broome (philosophe, économiste)

    Claude Cohen-Tannoudji (prix Nobel de physique)

    Shirin Ebadi (prix Nobel de la paix)

    Umberto Eco (écrivain, sémiologue)

    Rita El Khayat (écrivain, anthropologue, psychanalyste)

    Gerhard Ertl (prix Nobel de chimie)

    Rita Levi-Montalcini (prix Nobel de médecine)

    Luc Montagnier (prix Nobel de médecine)

    Marcelo Sanchez Sorondo (Secrétaire de l’Académie Pontificale des Sciences)

    Umberto Veronesi (médecin, chirurgien, fondateur et directeur de la fondation "Science for Peace")

    Harald Zur Hausen (directeur de l’International Journal of Cancer)


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