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Au Sénégal, forte mobilisation au premier tour d'une présidentielle à risques
Au Sénégal, forte mobilisation au premier tour d'une présidentielle à risques
LEMONDE.FR avec AFP | 26.02.12 | 09h45 • Mis à jour le 26.02.12 | 17h41
Les Sénégalais votent dans le calme dimanche 26 février, pour le premier tour d'une présidentielle qui oppose quatorze candidats, dont le dirigeant sortant – très contesté – Abdoulaye Wade. Quelque 5,3 millions d'électeurs sont appelés à participer à ce scrutin, le plus tourmenté de l'histoire du pays, après des violences qui ont fait entre six et quinze morts en un mois.
Les quelques 11 900 bureaux de vote dans le pays seront ouverts de 8 heures à 18 heures (heures locales et GMT). Face au président sortant concourent trois de ses anciens premiers ministres, Moustapha Niasse, Idrissa Seck et Macky Sall, ainsi que le patron du Parti socialiste, Ousmane Tanor Dieng. Bien qu'aucun taux de participation officiel n'ait été publié, journalistes et observateurs ont pu constater que de longues files d'attente s'étaient formées dimanche matin devant les bureaux de vote, tant à Dakar et ses banlieues que dans plusieurs villes de province.
"Je trouve que c'est réjouissant de voir tant de citoyens sénégalais qui sont là pour aller voter, qui attendent leur tour calmement", a déclaré Thijs Berman, chef des observateurs de l'Union européenne (UE), dans un centre de vote à Khar Yalla, un quartier populaire de la capitale. Toutefois, dans plusieurs localités du département de Bignona, en Casamance, région en proie à une rébellion indépendantiste depuis trente ans, les bureaux n'avaient pas encore ouvert en milieu de matinée en raison de menaces de rebelles, selon des témoins.
ABDOULAYE WADE VOTE SOUS LES HUÉES
L'actuel chef de l'Etat et candidat à la présidentielle, Abdoulaye Wade, a quant à lui voté sous les huées de plusieurs centaines de personnes à Dakar. Accompagné de son fils Karim et de sa fille Sindiély ainsi que du ministre de l'intérieur Ousmane Ngom, il a déposé son bulletin dans un bureau du quartier du Point E, où il possède une résidence. Il en est très vite reparti, sans faire de déclaration. Les applaudissements de quelques dizaines de partisans et des membres de sa délégation n'ont pas pu couvrir les huées de la foule, postée dans et autour de l'école transformée en bureau de vote. Le président sénégalais s'est toutefois dit persuadé d'avoir une "majorité écrasante" dès le premier tour, assurant qu'une révolte des Sénégalais contre lui n'est pas possible, dans un entretien au Journal du Dimanche.
Youssou Ndour a prévenu, à sa sortie du bureau de vote dimanche, que les Sénégalais "n'accepteront pas un coup de force électoral". "Ce qui compte, ce qui est important pour les Sénégalais, c'est le changement, le vrai changement", a déclaré le chanteur et opposant, dont la candidature à la présidentielle a été rejetée par le Conseil constitutionnel, et qui a été blessé mardi lors de la dispersion de manifestants à Dakar. "Abdoulaye Wade, en tant qu'organisateur de ces élections, doit absolument veiller à ce qu'elles soient crédibles, qu'elles ne fassent aucune contestation de la part de l'opposition parce que nous n'accepterons pas qu'un coup de force électoral puisse se passer ici au Sénégal", a-t-il ajouté.
"UN COUP D'ÉTAT ÉLECTORAL"
La nouvelle candidature d'Abdoulaye Wade est jugée "illégale" par l'opposition, pour qui il a épuisé ses deux mandats légaux après son élection en 2000 et sa réélection en 2007. Ses partisans soulignent au contraire que des réformes de la Constitution en 2001 et 2008 lui donnent le droit de se représenter. Le Mouvement du 23 juin (M23) – coalition de partis d'opposition et d'organisations de la société civile – a proposé samedi l'organisation d'une nouvelle élection présidentielle, "dans un délai de six à neuf mois", "à laquelle le président Wade s'engage à ne pas se présenter". Il s'agit d'empêcher "un coup d'Etat électoral", à savoir la proclamation de la victoire d'Abdoulaye Wade dès le premier tour de l'élection.
Les tensions politiques dans un pays qui fait figure de modèle démocratique dans une Afrique de l'Ouest instable ont fait craindre une fuite en avant. Au point que l'ex-président nigérian Olusegun Obasanjo, chef de la mission d'observation de l'Union africaine au Sénégal a appelé samedi à "échapper au chaos" en limitant à deux ans le mandat du président sortant Abdoulaye Wade, 85 ans dont douze au pouvoir, s'il est réélu dimanche – alors que la durée du nouveau mandat présidentiel est de sept ans. Une proposition rejetée par les deux camps.
Des milliers de Sénégalais de France élisent leur président près de Paris
Plusieurs milliers de Sénégalais vivant en France ont afflué dès dimanche matin dans les bureaux de vote installés à la Plaine-Saint-Denis, au nord de Paris, pour participer au premier tour de la présidentielle dans leur pays. Les 51 bureaux de vote, installés dans un des immenses hangars de cette ancienne zone industrielle aux portes de Paris, n'ont cessé, depuis leur ouverture à 8h30, d'être submergés par des électeurs venus de toute la région. Au total 30 309 citoyens sont inscrits sur les listes électorales et peuvent voter jusqu'à 18 heures. A la mi-journée, "tout se passe très bien, il y a une forte affluence, une forte participation qui témoigne de la maturité démocratique de nos concitoyens", a déclaré le consul général Léopold Faye, reconnaissant toutefois un "léger cafouillage" au début des opérations électorales. - (avec AFP)
Tags : Sénégal, élections, Wade, Opposition
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