Correspondant à Pékin

C'était sa dernière grande apparition publique. Le premier ministre Wen Jiabao, qui va laisser dans quelques jours sa place, a ouvert ce mardi la session annuelle du Parlement chinois (ANP). L'occasion de faire un bilan sur une décennie de pouvoir et de tracer la ligne pour les années à venir, devant quelque 3.000 délégués réunis au Palais du peuple.

Ces cinq dernières années, pour Wen Jiabao, auront été celles de «victoires éclatantes». Il a vanté les succès chinois dans l'aventure spatiale, la plongée en grande profondeur, le système de navigation satellitaire ou le lancement d'un superordinateur. Sans oublier le premier porte-avions chinois, même si ses essais sont encore balbutiants. Le premier ministre sortant n'en a pas moins évoqué les «contradictions» qui menacent cette belle aventure et la stabilité: les atteintes à l'environnement, la corruption et les inégalités sociales.

Wen Jiabao a réaffirmé l'objectif de croissance de 7,5 % en 2013, tout en avertissant qu'il ne serait pas facile à atteindre. Le modèle s'essouffle et sa transformation doit être «accélérée». La nouvelle priorité sera le «bien-être» de la population, une façon de reconnaître qu'il n'a pas augmenté au même rythme que le PIB durant la dernière décennie. Le cap, en fait, n'est pas nouveau. Il s'agit «d'élargir la demande intérieure», la consommation devant devenir «une force motrice de plus en plus puissante pour la croissance économique». Pour cela, au long de sa harangue de deux heures, Wen Jiabao a expliqué qu'il fallait «renforcer le goût de consommer» des Chinois et «améliorer le pouvoir d'achat». Il a pointé du doigt le taux d'épargne encore trop élevé. C'est le leitmotiv depuis 2008, et le mouvement se fait lentement. «Rien de bien neuf, commente le professeur Hu Xingdou, du Beijing Institute of Technology. Le diagnostic était connu et les solutions restent vagues. En clair, ce sera à son successeur de jouer…»

Réduire le fossé social

L'un des chantiers priori­taires sera la réduction du fossé entre riches et pauvres, en zone rurale notamment. Un vaste plan d'urbanisation de 40.000 milliards de yuans (4.930 milliards d'euros) sur dix ans doit attirer 400 millions de ruraux vers les villes, sur une population de 1,3 milliard d'habitants. Wen Jiabao a préconisé une réforme du système du hukou, rigide et impopu­laire, qui est un frein à la consommation. Ce permis de résidence crée en effet des dizaines de millions de citoyens de seconde zone dans les villes, en privant les migrants d'accès aux services de base.

La session annuelle de l'ANP doit cette année avaliser la nouvelle direction choisie au 18e congrès du Parti, tenu en novembre. Xi Jinping, nouveau secrétaire général, doit être officiellement désigné président de la République en remplacement de Hu Jintao, et Li Keqiang, 57 ans, doit succéder à Wen Jiabao à la tête du gouvernement. Le 17 mars, la transition politique chinoise sera terminée. Et le nouveau tandem, théoriquement aux affaires jusqu'en 2023, commencera à abattre ses cartes.

Hausse à deux chiffres pour le budget de la défense

Le budget chinois de la défense va continuer de bénéficier  d'une belle hausse à deux chiffres, à 10,7 % en 2013. L'augmentation est un peu moindre que l'an dernier (11,2 %), mais elle reste supérieure à la croissance  et riche en symboles, alors que les tensions territoriales avec nombre de pays voisins se sont aggravées ces dernières années. Le budget chinois atteindra ainsi plus  de 740 milliards de yuans (90 milliards d'euros). Le budget réel est supérieur à ces chiffres officiels, les programmes  de recherche et d'armements, ainsi que les opérations extérieures, n'étant pas pris  en compte. La plupart des experts estiment que le vrai budget est  2 à 2,5 fois supérieur au chiffre officiel. Enfin, pour la troisième année consécutive, le budget militaire sera inférieur à celui  de la sécurité intérieure,  qui s'élèvera à 769,1 milliards  de yuans, avec une augmentation de 8,7 %. 

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