Ils ne savent plus où donner de la tête. Tandis que les dirigeants européens tentent de convoquer un G7 finances pour faire face, les Américains récoltent la monnaie de leur pièce, tendue comme prévu par Standard & Poor’s.
Se réunir a-t-il d’ailleurs un sens, si aucune parade n’est en vue ? Les Européens sont arrivés au bout de leurs contradictions et ne vont pas pouvoir s’en sortir en accélérant le sauvetage de la Grèce, élargissant les missions du Fonds de stabilité et renforçant symboliquement la gouvernance économique. C’est pourquoi ils font un appel du pied hors de leurs frontières, c’est à dire au FMI. Pour gagner du temps en attendant son hypothétique intervention, il ne leur reste dans les mains que la BCE et les entrechats de son président, c’est mince s’ils ne sont pas accompagnés d’achats de titres italiens sur le marché, l’annonce d’hier soir d’Umberto Bossi étant à prendre avec des pincettes.
Une autre grande histoire est en train de se jouer aux Etats-Unis. Si les régulateurs s’y sont empressés de signifier aux banques que rien n’avait changé pour elles, suite à la dégradation de la note américaine, il ne va pas en être de même à l’international. « Du point de vue des risques compris dans les fonds propres, le calcul de la pondération des titres de dette du Trésor et d’autres titres garantis par l’Etat fédéral américain, des administrations publiques et des organismes parapublics ne changera pas » ont-elles précisé dans une circulaire. En d’autres termes, la notation de la dette change, mais la réglementation n’en tient pas compte !
Cela va être une autre paire de manches à l’extérieur du pays, car les bons du Trésor américain sont au centre du système financier. A la fois référence et collatéral incontestés, points d’appui et refuge. Leur dégradation va être l’occasion d’observer in vivo une réaction en chaîne que nul ne s’aventurait à simuler, en raison de ses impondérables. Tout le système financier mondial va en sortir fragilisé, n’ayant d’autre issue que de chercher forcé et contraint des solutions alternatives inexistantes, impliquant une réforme du système monétaire international qui ne pourra de toute manière ne se faire qu’à chaud, comme le reste !
Le Trésor américain n’a eu d’autre ressource pour commenter la décision de S&P que de dénoncer « une erreur » dans ses estimations prévisionnelles du déficit US, que celle-ci a ensuite maintenu comme étant « plus réaliste ».[ERRATA: elle l'a finalement corrigée, mais a maintenu la dégradation de la note] Les autorités européennes ont de leur côté passé hier plus de temps à justifier leurs vacances par le nombre de coups de téléphone qu’elles avaient passé dans la journée qu’à évoquer ce qu’elles allaient bien pouvoir faire ! « Le message, c’est le medium » (Mac Luhan).
Dans les deux cas, leur impuissance reflète une simple vérité : un tournant radical est nécessaire qu’ils ne veulent pas et ne savent pas négocier.
Comme chaque semaine, ce sont les marchés asiatiques qui vont dans la nuit de dimanche à lundi ouvrir la danse. Le danger immédiat sera l’amorce d’une spirale baissière sur la dette américaine, en raison d’un grand nombre de ventes, rompant avec la stabilité enregistrée ces derniers temps.