BEYROUTH/ANKARA (AP) — Damas a accepté, en tous cas "sur le principe" l'envoi en Syrie d'un mission d'observation de la Ligue arabe, a annoncé vendredi un haut responsable du régime. Mais le même jour, la répression des manifestations faisait à nouveau 11 morts dans le pays, alors que la pression internationale monte, la France exhortant l'ONU à hausser le ton.
En visite en Turquie, le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à prendre des mesures contre le régime de Bachar el-Assad, estimant qu'il était temps d'"accentuer les sanctions" contre Damas.
Mercredi les chefs de la diplomatie de la Ligue arabe, réunis à Rabat (Maroc), avaient confirmé la décision de suspendre la Syrie des rangs de l'organisation régionale face à la poursuite de la répression des manifestations, qui a fait au moins 3.500 morts depuis huit mois.
"La Syrie a accepté en principe la proposition de la Ligue arabe et nous étudions les détails" de cette mission de la Ligue arabe, qui prévoit d'envoyer une centaine d'observateurs sur place, a affirmé vendredi un responsable syrien, sous réserve d'anonymat.
Les participants avaient également donné trois jours au gouvernement syrien pour répondre à un plan de sortie de crise impliquant l'envoi d'une délégation de la Ligue arabe chargée de veiller au respect de ses différentes dispositions.
Selon des membres de l'opposition syrienne, la réaction de Damas est juste une tactique. "Nous avons prévenu dans le passé et nous prévenons à nouveau que ce sont les méthodes du régime pour gagner du temps", a observé Omar Idilbi, un membre du Conseil national syrien (CNS), qui rassemble plusieurs mouvements d'opposants au régime.
Le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Elaraby, a affirmé vendredi dans un communiqué qu'il avait reçu des "amendements" de Damas sur l'envoi d'observateurs, et que la Ligue arabe les étudiait.
Parallèlement, des militants syriens ont annoncé que onze personnes avaient été tuées vendredi par les forces de sécurité syriennes lors de manifestations anti-gouvernementales.
A Ankara, lors d'une conférence de presse avec son homologue turc Ahmet Davutoglu, le chef de la diplomatie français Alain Juppé a estimé que "le moment est venu d'accentuer les sanctions contre le régime syrien, qui n'a rien voulu savoir". "Nous soutenons ensemble (avec la Turquie) une résolution devant le Conseil de Sécurité."
"Il serait bon que le Conseil de Sécurité se prononce, il n'est pas normal que, sur une crise comme celle-là, le Conseil de Sécurité ne se prononce pas", a-t-il ajouté. "J'espère que ceux qui bloquent" une résolution contre la Syrie "vont enfin prendre conscience de la réalité."
Le chef de la diplomatie française a précisé que Paris souhaitait travailler avec la Ligue arabe et la Turquie, ainsi que l'opposition syrienne.
De son côté, le Premier ministre russe Vladimir Poutine a appelé vendredi à faire preuve de retenue dans l'élaboration d'un projet de résolution des Nations unies condamnant la répression meurtrière en Syrie.
"Nous sommes prêts à travailler avec la communauté internationale, mais nous exhortons à la retenue et à la prudence", a-t-il déclaré à des agences de presse russes alors qu'on lui demandait si Moscou allait soutenir une résolution de l'ONU.
Vladimir Poutine a dans le même temps assuré que la Russie n'allait pas ignorer "les opinions de (ses) partenaires" et qu'elle "coopérerait avec chacun".
La Russie est considérée comme un soutien du régime du président Bachar el-Assad, bien que des responsables russes aient rencontré d'importants représentants de l'opposition syrienne cette semaine à Moscou. Jusqu'ici, Moscou et Pékin avaient menacé d'opposer leur veto à toute résolution condamnant Damas au Conseil de sécurité.
Pour contourner tout risque de veto, la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne ont fait circuler jeudi un projet de résolution condamnant les violations des droits de l'Homme en Syrie à la commission des droits de l'Homme de l'Assemblée générale de l'ONU, avec quatre pays arabes -l'Arabie saoudite, le Qatar, la Jordanie et le Maroc, signe d'une opposition régionale croissante à Bachar el-Assad. AP
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