C’était l’une des bombes à retardement qui menaçait l’exécutif. Manuel Valls a expliqué mardi que la réforme des modalités d’attribution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) se ferait en deux temps. Une manière de calmer une fronde venue des tréfonds du «marais» socialiste - ces élus légitimistes qui ne font pas de vague d'ordinaire - sans enterrer pour autant le projet, que le gouvernement présente comme une réforme de justice territoriale.  

Devant les députés socialistes, le Premier ministre a présenté deux scénarios. Première possibilité: vote de l’architecture de la réforme cette année dans le cadre du projet de loi de finances 2016 mais application au 1er janvier 2017. «On vote mais on continue de travailler sur les critères et on les applique en 2017», précise une source parlementaire socialiste. Deuxième solution, qui revient peu ou prou au même, vote de la réforme, application dès 2016 mais réévaluation de son impact sur les collectivités locales en cours d'année pour l'ajuster. Avant de pencher pour le premier scénario, celui du report d'un an. 

Après des semaines de consultations, de simulations et de réunions interministérielles au sommet, Manuel Valls est venu en personne déminer le sujet lors de la réunion du groupe PS à l'Assemblée, flanqué des trois ministres concernés par cette délicate réforme, Marylise Lebranchu (Décentralisation), André Vallini (Réforme territoriale) et Christian Eckert (Budget). 

L’actuel mode de répartition de la DGF, principale enveloppe distribuée par l’Etat aux collectivités, est, de l’aveu de tous, «inégalitaire» et «illisible» avec un empilement de 21 critères. S’appuyant sur le rapport remis cet été par la députée (PS) Christine Pirès Beaune et le sénateur (PS) Jean Germain, le gouvernement proposait donc de le réviser en ne retenant que trois critères. Problème : cette réforme s’inscrit dans un contexte de baisse des dotations aux collectivités locales décidé en 2015 pour trois ans, la DGF passant de 36,6 milliards d’euros pour 2015 à 32,93 milliards en 2016.

Villes moyennes affectées

Selon Bercy, grâce à cette réforme, deux tiers des communes seraient mieux loties, notamment les plus petites. Mais, pour ses détracteurs, les villes moyennes en pâtissent fortement. D’où la mobilisation de maires comme Olivier Dussopt pour Annonay (16 000 habitants) et Estelle Grelier à Fécamp (19 000), appuyés par Nathalie Appéré, maire de Rennes.

Les socialistes sont très divisés sur le sujet et la probabilité est grande que la solution qui sera finalement retenue mercredi matin ne contente personne. Pour le député et maire de Sarcelles, François Pupponi, il manque quelques semaines pour «affiner» le dispositif. Mais «si on reporte en 2017, il faut un traitement particulier des villes de banlieue car, avec la baisse de la DGF, elles se retrouvent dans une situation catastrophique», a-t-il plaidé lors de la réunion du groupe PS mardi. Christine Pirès Beaune, Dominique Potier ou Razzy Hammadi ont, eux, réclamé une application dès 2016 de cette «réforme de justice».

Laure Equy