Une prise d'otage meurtrière, une attaque armée contre un bureau local du Parti de la justice et du développement (AKP) du président Recep Tayyip Erdogan, une fusillade devant la direction de la sécurité d'Istanbul et deux quartiers populaires en ébullition... En un peu plus de vingt-quatre heures, Istanbul a connu une flambée de violences politiques, à deux mois des élections législatives du 7 juin prochain.
En fin d'après-midi, mercredi 1er avril, une fusillade a éclaté devant le siège de la police de la métropole turque, dans le quartier de Fatih, sur la rive européenne. Le gouverneur de la région d'Istanbul, Vasip Sahin, a annoncé en début de soirée qu'un homme et une femme étaient impliqués dans cette attaque.
La femme, qui portait sur elle des explosifs, a été tuée par les policiers, tandis que l'homme, blessé, a réussi à prendre la fuite. Des médias turcs ont annoncé par la suite que celui-ci avait également été rattrapé par les forces de l'ordre. Au moins un policier a été légèrement blessé dans l'échange de coups de feu, selon les premières informations.
VIDEO: Two assailants shot in attack on #Istanbul police HQ http://bit.ly/1I56BAT
La généralisation de la Déclaration Sociale Nominative est fixée au 1er janvier 2016.
« Vengeance de la mort de BeRkin »
Les médias pro-gouvernementaux ont rapidement imputé l'attaque au mouvement marxiste DHKP-C (Front révolutionnaire de libération du peuple), classé comme groupuscule terroriste par la Turquie, les Etats-Unis et l'Union européenne.
La fusillade survient au lendemain de la prise en otage, dans un tribunal d'Istanbul, d'un procureur par deux militants du DHKP-C. L'assaut donné par les policiers en soirée, mardi 31 mars, s'est conclu par la mort des deux preneurs d'otage. Le magistrat, Mehmet Selim Kiraz, est également décédé après avoir été grièvement blessé lors de l'intervention policière.
Il était en charge de l'enquête sur la mort du jeune Berkin Elvan, tué par une grenade lacrymogène reçue en pleine tête lors des émeutes de Gezi, en juin 2013. Les militants de ce mouvement d'extrême gauche, qui a pris fait et cause pour la « vengeance de la mort de Berkin », menaçaient d'exécuter leur otage si des « excuses publiques » n'étaient pas faites par les policiers, dont aucun n'a été reconnu responsable du décès de l'adolescent.
<figure class="illustration_haut " style="width: 534px"> </figure>Lire : Un magistrat turc meurt dans une prise d’otage à Istanbul
Ce mercredi matin, les policiers ont procédé à une vague d'arrestations de militants supposés du DHKP-C à Antalya, Izmir et Istanbul, notamment dans certaines universités stambouliotes. Une quarantaine de personnes auraient été placées en garde à vue. Deux hommes ont également été arrêtés après avoir fait irruption, armés, dans un bureau local de l'AKP du quartier de Kartal, à l'est d'Istanbul. Les médias turcs ont publié une séquence vidéo montrant un homme accrochant à la fenêtre de l'édifice un drapeau turc frappé d'une épée.
Two armed men break into ruling AKP building in Istanbul http://bit.ly/1I3PkIn
échéances électorales
Ce sursaut de violences intervient à deux mois des élections législatives, alors que la société turque est particulièrement polarisée entre partisans et adversaires du président – et ancien premier ministre – Recep Tayyip Erdogan, qui entend profiter du prochain scrutin pour obtenir une majorité qualifiée lui permettant de transformer la Turquie en régime présidentiel.
Les attaques des dernières heures pourraient également permettre au gouvernement de justifier l'adoption d'un « paquet de lois sécuritaires », contestées, qui accordent davantage de pouvoirs aux forces de l'ordre.
Mercredi soir, des affrontements avaient lieu entre policiers et manifestants dans deux quartiers de la mégalopole turque, à Okmeydani, quartier d'origine du jeune Berkin Elvan, un fief du DHKP-C, ainsi qu'à Gazi, un quartier majoritairement alévi (une branche du chiisme, minoritaire en Turquie), d'où étaient originaires les deux preneurs d'otage tués par les policiers mardi soir. Sur les réseaux sociaux, des partisans du parti au pouvoir ont appelé à se rendre dans ces quartiers pour en découdre avec les manifestants.
Istanbul's Gazi neighbourhood seeing clashes as DHKP-C militant killed in hostage operation funeral not allowed in.