De notre envoyée en Avignon
On se lève tôt, à Avignon. Aujourd'hui, à 10h, c'est la coordination nationale des intermittents et précaires qui se réunit place du Palais des papes pour décider des actions à mener dans la journée. Une banderolle indique «Ce que nous défendons, nous le défendons pour tous.»
Ensuite, il faut courir à l'autre bout de la ville pour aller jusqu'à l'Université, site Louis-Pasteur pour écouter Olivier Py et les équipes artistiques d'ores et déjà présentes, ouvrir officiellement le 68ème festival par une conférence de presse qui sera certainement très courue.
Jouera, jouera pas ce soir? Qui sait? La grève votée majoritairement hier par les intermittents du festival à l'issue d'une réunion de quatre heures en plein soleil au Cloître des Célestins, ne veut pas forcément dire annulation d'un spectacle. Cela dépendra combien de techniciens de la cour sont en grève. Mais enfin, ne rêvons pas, c'est mal barré pourLe Prince de Hombourg et pour «Coup fatal» spectacle très original d'Alain Platel, Serge Kakudji, Fabrizio Cassol ou l'étonnant mariage des artistes de la République Démocratique du Congo et de la musique baroque. Kakudji est un merveilleux contre-ténor. Ce spectacle de théâtre et de musique doit se donner Cour du Lycée Saint-Joseph.
<aside></aside>« Je n'ai pas prise sur les décisions des intermittents, ce qui est normal, mais quant au ciel, je suis impuissant ! »
Olivier Py
Ce sont les deux premières de ce soir. Elles étaient prévues à guichets fermés. Si on ne joue pas il faudra rembourser, déplacer les billets. À moins que, comme le prévoit la météo, un orage vienne rafraîchir les esprits et mettre tout le monde d'accord un moment. On n'a pas oublié l'orage gigantesque qui noya la Cour d'honneur en juillet 2000 ou 2001 pour la première de L'Ecole des femmes avec Pierre Arditi et Agnès Sourdillon ou celui qui interrompit Dom Juan avec Andrzej Seweryn et Roland Bertin, juste au moment où «l'épouseur du genre humain» défait le Commandeur…
Comme l'a dit ce matin, en substance, sur les ondes de France Inter, Olivier Py: «Je n'ai pas prise sur les décisions des intermittents, ce qui est normal, mais quant au ciel, je suis impuissant!» L'autre grand rendez-vous de la journée est fixé à 16h45, Place de l'Horloge, par «Avignon, festival et compagnies», l'organisme animé par Greg Germain, qui fédère le «off». C'est la fameuse parade qui est cette année une marche silencieuse avec ballons. On ne sait pas s'ils seront rouges, comme le fameux carré repris aux Québecois et que l'on distribue dans l'entrée des bureaux du festival «In».
Cette marche conduira le cortège jusqu'aux remparts, par la rue de la République, face à l'ancienne gare. On imagine que les activistes du CIP (Coordination des intermittents et précaires), version nationale, en réunion «plénière» ces jours-ci à Avignon (comme elle l'avait fait pour le Printemps des comédiens à Montpellier, il y a un mois) ne manqueront pas d'intervenir.
Et sans doute faut-il compter sur d'autres gestes, actions, etc… De l'autre côté du Rhône, à cinq minutes de la Porte de l'Oulle, Villeneuve-en-Scène, un merveilleux festival sous chapiteaux (jusqu'au 23 juillet), festival consacré aux troupes itinérantes, accueille le public. Les spectacles se donnaient hier soir. Aujourd'hui, certains feront grève, d'autre non. Frédéric Poty, son actif directeur artistique en convient: les troupes itinérantes et cette année, quelques spectacles de compagnies plus classiques, sont parmi les plus pauvres du paysage théâtral. Et ils préfèrent jouer et prendre la parole, éclairer les spectateurs. Une position intelligente et fertile qui est d'ailleurs celle qu'ont choisie les intermittents du festival d'Avignon. La CGT-Spectacles qui a appelé à ce jour de grève nationale jure qu'elle ne veut surtout pas d'annulations, mais elle y conduit en ce vendredi!