• Haute-Savoie : les pistes de la police britannique

    Haute-Savoie : les pistes de la police britannique

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    L'examen méticuleux de la maison des victimes à Claygate, 25 kilomètres au sud-ouest de Londres, s'est poursuivi dimanche toute la journée et pourrait reprendre lundi.
    L'examen méticuleux de la maison des victimes à Claygate, 25 kilomètres au sud-ouest de Londres, s'est poursuivi dimanche toute la journée et pourrait reprendre lundi. Crédits photo : Steve Parsons/AP

    L'enquête examine trois pistes, celle d'un différend familial, celle des activités professionnelles de l'ingénieur et celle liée aux origines irakiennes des victimes.

    De notre correspondant à Londres

    Qu'est-ce qui, derrière l'image d'une «famille parfaite» décrite par un ami des al-Hilli, James Matthews, a pu déclencher l'implacable furie meurtrière de tueurs déterminés? C'est ce que cherchent à élucider à Londres les enquêteurs franco-britanniques, dont la coopération sur le quadruple meurtre de Chevaline (Haute-Savoie) «se passe pour le mieux», selon le colonel Marc de Tarlé, chef du détachement de quatre gendarmes au Royaume-Uni. L'examen méticuleux de la maison des victimes à Claygate, 25 kilomètres au sud-ouest de Londres, s'est poursuivi dimanche toute la journée et pourrait reprendre lundi. Samedi, des experts de la police scientifique en combinaison blanche, gants et protection capillaire, ont passé les lieux au peigne fin. Rien n'a été dévoilé sur les résultats de ces recherches, la police espérant entre autres mettre la main sur l'ordinateur de Saad al-Hilli, le père de famille.

    Sans rien négliger, l'enquête se con­centre dans trois directions, celle d'un différend familial, celle des activités professionnelles de l'ingénieur et celle liée aux origines irakiennes des victimes. Le frère aîné de Saad, Zaid, 53 ans, a été longuement interrogé comme témoin samedi et dimanche par les policiers britanniques, en présence de gendarmes français.

    Les deux frères ont vécu dans la maison de Claygate avec leurs parents, après l'exil d'Irak de la famille opposée au régime baasiste de Saddam Hussein dans les années 1970. Ils ont emménagé dans cette lointaine banlieue résidentielle après avoir passé quelques années à Pimlico, dans le centre de Londres. «C'était la maison de la famille étendue, Saad l'a reprise quand sa mère est morte il y a dix ans», raconte James Matthews. La mort l'an dernier de leur père, Kadhim, semble avoir provoqué une dispute entre les deux frères sur l'héritage. Zaid, qui voulait vendre, a quitté le domicile. Saad a bloqué l'exécution du testament de son père, qui aurait aussi porté sur des biens à l'étranger. Mais pas de grande fortune: Kadhim vivait près de Malaga, en Espagne, dans un studio acheté 50.000 euros il y a une dizaine d'années.

    Disant avoir appris la mort de son frère par les médias, Zaid s'est précipité dans un commissariat jeudi. Il y est retourné spontanément vendredi pour nier toute implication dès que son nom a été mis en cause. Ali al-Hilli, un cousin australien, lui a parlé au téléphone: «Il était dévasté. Il répétait: “pourquoi, pourquoi, pourquoi? Comment cela a pu arriver?”»

    Un expert des satellites

    Les enquêteurs vont interroger dès lundi les collègues de travail de Saad al-Hilli. L'ingénieur spécialisé dans la conception informatique est à la tête de sa propre société de conseil, Shtech, dont sa femme était associée ainsi que son frère, jusqu'à la brouille. Il avait également créé une autre structure, AMS 1087, dans le domaine de l'imagerie aérienne. Depuis novembre 2010, il travaillait comme consultant pour Surrey Satellite Technology Ltd (SSTL), une division du géant aéronautique EADS. Leader mondial de l'observation civile et militaire par petits satellites, la société compte des contrats avec la Russie, la Chine ou le gouvernement britannique. Saad se serait rendu en France en décembre dernier pour une mission professionnelle auprès d'une filiale de SSTL, DMC Imaging. Selon des experts du renseignement, le caractère sensible de son domaine d'activité aurait pu déclencher des convoitises, notamment de gouvernements du Proche-Orient. Al-Hilli n'était pourtant pas habilité secret-défense.

    La connexion irakienne est également examinée par les responsables de l'investigation. Dans quelle condition la famille al-Hilli a-t-elle quitté l'Irak et quels liens y a-t-elle gardé? Saad s'est rendu dans son pays d'origine après la chute de Saddam Hussein, notamment pour tenter de récupérer des biens appartenant à son père, apparemment sans grand succès. Selon un voisin de Claygate qui a tenu à conserver l'anonymat, il aurait pris la précaution d'emporter avec lui un gilet pare-balles et aurait plaisanté que, si on voulait s'en prendre à lui, «ce serait un coup frappé à la porte et une balle dans le front». Troublante prémonition. Par ailleurs, selon son ami James Matthews, Saad «n'était pas dans son état normal» avant son départ pour la France. Un voisin, Jack Saltman, a évoqué «un problème personnel» qui préoccupait Saad depuis plusieurs mois, sans en dire plus.

    Pour John O'Connor, un ancien policier de haut rang de Scotland Yard, interrogé par le Sunday Times, le quadruple meurtre porte la marque d'un contrat professionnel commandité par un État. Des pros aguerris, prompts à se volatiliser dans la nature, avec des chances minimes de les retrouver un jour.


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