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L?Europe va-t-elle mettre un terme au barrage de Sivens ?
L’Europe va-t-elle mettre un terme au barrage de Sivens ?
Le Monde.fr | <time datetime="2014-11-19T15:41:06+01:00" itemprop="datePublished">19.11.2014 à 15h41</time> | Par Martine Valo
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La Commission européenne va-t-elle engager une procédure d'infraction à l'égard de la France au sujet du barrage de Sivens ? L’information a été donnée par la chaîne LCP-Assemblée nationale mardi 18 novembre. Mais la décision n'est pas encore prise. Elle pourrait l'être éventuellement lors de réunion collégiale des commissaires le 26 novembre si Karmenu Vella, le nouveau commissaire européen chargé de l'environnement, décide de faire une priorité de cette affaire des plus sensibles depuis le choc causé par la mort de Rémi Fraisse, tué par une grenade offensive. Or sans les financements européens, le projet de retenue d'eau sur la vallée du Tescou dans le Tarn serait compromis.
Le dossier Sivens, en tout cas, n'est pas inconnu à Bruxelles. De 2011 à l'hiver 2014 en effet, l'ex-députée européenne Catherine Grèze (EE-LV) n'a cessé d'alerter à ce sujet, multipliant ses arguments : dégâts environnementaux, coût exorbitant, conflits d'intérêts, enquête publique tronquée... Cependant son interpellation était peu ou prou toujours la même : par cinq fois elle a demandé : « La Commission approuve-t-elle de financer un projet qui conduirait à noyer une zone humide naturelle à protéger ? »
Lire aussi : Le barrage de Sivens, un dossier entaché de conflits d’intérêts
La commission a fini par s'auto-saisir et par demander à Paris, en novembre 2013, des explications sur ce chantier de 8,4 millions d'euros qui repose intégralement sur de l'argent public, dont 30% de fonds structurels européens. La réponse de huit pages fournie par le gouvernement le 7 mars 2014 n'a pas été rendue publique. Malgré la démarche du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet auprès de la Commission d'accès aux documents administratifs, le contenu ne leur en a pas été communiqué.
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Rassemblement pro-barrage de Sivens à Albi
Un millier de manifestants, agriculteurs et élus, se sont rassemblés samedi 15 novembre à Albi, à l'appel notamment de la FNSEA, pour exiger le maintien du projet de barrage de Sivens (Tarn). 01:14
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« L’eau n’est pas un bien marchand comme les autres »
Quoi qu'il en soit, l’argumentaire français ne semble pas avoir convaincu les fonctionnaires de Bruxelles qui ont continué à vouloir y voir plus clair sur ce projet de barrage. Leurs questions ont porté jusqu'à présent non pas sur le financement, mais sur le respect de la directive européenne sur l'eau. Ce texte auquel la France a bien du mal à se conformer affirme en préambule que « l'eau n'est pas un bien marchand comme les autres mais un patrimoine qu'il faut protéger, défendre et traiter comme tel ». Il expose en conséquence de manière détaillée les efforts auxquels les Etats-membres doivent se plier, en particulier avant de bâtir un ouvrage qui va affecter l'écoulement naturel d'une rivière, a fortiori lorsqu'il s'apprête à sacrifier une zone humide essentiel à l'équilibre écologique.
Pour pouvoir contrevenir à l'esprit de la directive, il faut montrer qu'un barrage peut répondre à de « nouvelles activités de développement humain durable » ou alors qu'il va contrarier un cours d'eau déjà très affecté par ailleurs. Il faut aussi prouver que toutes les alternatives ont bien été étudiées et surtout que cette construction réponde « à un intérêt général majeur », dont l'environnement et la société pourront tirer un bénéfice important.
Au vu de la législation communautaire, il n'est pas simple de justifier une retenue d'eau destinée essentiellement à desservir quelques dizaines d'agriculteurs. La Commission a donc le choix du ou des angles d'attaque environnementaux, si elle décide effectivement que Sivens mérite une procédure de contentieux. D'autant qu'elle peut s'appuyer sur une autre directive, celle sur l’habitat de la faune et de la flore.
Question de financements
Par ailleurs, le Collectif Testet ne s'est pas privé d'attirer l'attention de Bruxelles sur d'autres volets du dossier depuis le début du déboisement de la forêt, le 1er septembre. Pour Ben Lefetey, porte-parole de ce mouvement, la question des financements se pose avec acuité alors que l'on ne sait toujours pas quel serait le prix demandé aux agriculteurs irriguants bénéficiaires de l'eau de la retenue de Sivens.
Le rapport d'expertise commandé par Ségolène Royal et rendu fin octobre aborde ce chapitre, mais sans fournir de chiffres précis. Les experts se contentent de citer ceux pratiqués par le barrage voisin de Thérondel, soit environ 30 euros par hectare irrigué plus cinq centimes de pénalité par hectare pour les plus gros consommateurs. Mais ce surcoût est plafonné. On est loin d'une participation des usagers du barrage à son fonctionnement qui pourrait satisfaire les règles européennes.
Lire aussi : Qui est à l’origine du projet du barrage de Sivens ?
Si la Commission décidait de suspendre les 30 % de financement annoncés, le barrage de Sivens pourrait être définitement abandonné. Voià qui pourrait au passage ôter une redoutable épine du pied du gouvernement.
Tags : environnement- gouvernemnt- France- Europe- choix- mettre un terme- barrage de Sivens
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