• Le Sénégal offre une leçon de démocratie aux putschistes maliens

    Le Sénégal offre une leçon de démocratie aux putschistes maliens

    Par Vincent Hugeux, publié le 26/03/2012 à 13:21, mis à jour à 13:51


    Le Sénégal offre une leçon de démocratie aux putschistes maliens

    Le Sénégal a mis fin à la présidence d'Abdoulaye Wade par les urnes, ce dimanche. Le nouveau chef de l'Etat s'appelle Macky Sall. Pendant ce temps, au Mali, des putschistes ont écarté le président Amadou Toumani Touré.

    afp.com/Issouf Sanogo

    Abdoulaye Wade a été battu à la régulière par Macky Sall, nouveau président du Sénégal. Pendant ce temps au Mali, le président Amadou Toumani Touré a été évincé par un putsch militaire anachronique. 

    Un tel acte manqué ferait les délices de tout psychanalyste: ce dimanche 25 mars, à l'instant de voter, le président sortant Abdoulaye Wade s'est présenté devant l'urne les mains vides; il avait oublié son bulletin dans l'isoloir. Tandis qu'un putsch militaire anachronique plonge le Mali voisin, autre vitrine de la démocratie à l'africaine, dans une nuit couleur kaki, le triomphe de son challenger et ex-Premier ministre Macky Sall, 50 ans, apparaît comme une éclaircie salvatrice.  

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    Le Sénégal a mis fin à la présidence d'Abdoulaye Wade par les urnes, le nouveau chef de l'Etat s'appelle Macky Sall. Pendant ce temps, un putsch a eu lieu au Mali. Contraste... Vincent Hugeux, grand reporter à la rubrique Monde de L'Express, répond à vos questions, ce lundi à partir de 16h30.

    Après une décennie de dérive monarchique, le Sénégal renoue ainsi avec la tradition inaugurée en l'an 2000, à la faveur d'une alternance exemplaire. Dont Wade avait été le bénéficiaire et, au côté de son prédécesseur socialiste Abdou Diouf, l'acteur-clé. Comme le fit alors l'actuel secrétaire général de la Francophonie, le "Gorgui" -le Vieux, en wolof- a dès dimanche soir reconnu sa cinglante défaite et félicité par téléphone celui qu'il considérait, avec un rien de condescendance, comme son "apprenti". Au moins le "maître" aura-t-il réussi sa sortie. 

    Le modèle sénégalais revient de loin. Voilà près d'un an que le clan Wade a semé les germes de la débâcle. A l'époque, l'ancien opposant libéral avait tenté d'imposer, au prix d'un énième replâtrage constitutionnel, le "quart bloquant", antidote éprouvé aux caprices du suffrage universel. La réforme lui aurait permis de prolonger son bail, avec 25% des voix, via un scrutin à tour unique. Et, dans la foulée, d'instaurer un "ticket" à l'américaine, histoire d'installer son aîné et héritier présomptif Karim dans le fauteuil de vice-président.  

    Abdoulaye Wade vaincu à la régulière

    Peine perdue: le tollé suscité alors, dont les émeutes du 23 juin 2011 furent le point d'orgue, contraindra le Machiavel dakarois à rengainer son montage. C'est d'ailleurs sous l'étendard du M23 -pour Mouvement du 23 juin- que bataillait depuis lors l'alliance hétéroclite de partis et d'ONG citoyennes hostiles à la candidature de Me Wade à un troisième mandat consécutif. Scénario au demeurant contraire à la loi fondamentale du pays. Par son entêtement, ce dernier aura administré à ses "sujets" un électrochoc salutaire. 

    Fils émancipé du wadisme, Macky Sall doit certes son succès à une campagne opiniâtre et méthodique, mais aussi à cette insurrection civique. Ainsi qu'au au travail accompli par un formidable tissu associatif, qu'il incitât les jeunes à s'inscrire sur les listes électorales ou orchestrât des sessions de formation d'observateurs, volontaires de la vigilance antifraude. Tels sont les ressorts de la maturité et de la vitalité démocratiques sénégalaises, vertus tant vantées depuis la mise en ballottage du sortant octogénaire. 

    Contraste avec le putsch au Mali

    L'éviction à la régulière de ce dernier fournit-elle aux cousins maliens des raisons d'espérer? Oui, en ce qu'elle atteste l'inanité des régressions autocratiques dès lors que celles-ci se heurtent au veto résolu de citoyens engagés.  

    Au Mali, les putschistes invoquent l'échec de la lutte contre la rébellion touarègue et "la restauration de la démocratie" pour se justifier.

    Au Mali, les putschistes invoquent l'échec de la lutte contre la rébellion touarègue et "la restauration de la démocratie" pour se justifier.

    Reuters/Mali TV via Reuters TV

    La naissance, à Bamako, d'un Front uni pour la sauvegarde de la République et de la démocratie, coalition de formations politiques et de mouvements de la société civile, contribue à l'isolement de mutins qui n'ont su rallier à leur douteuse cause qu'un parti mineur, fourvoyé par un leader opportuniste. De même, l'entrée en dissidence des anciens chefs de gouvernement Ibrahim Boubacar Keïta -alias IBK- et Modibo Sidibé ou de l'ex-ministre Soumaïla Cissé fragilise une aventure unanimement condamnée à l'étranger.  

    Aventure absurde: pour justifier leur pronunciamiento, les putschistes invoquent l'échec de la lutte contre la rébellion touarègue et "la restauration de la démocratie". Or, le chaos ambiant permet aux insurgés nordistes de pousser leurs pions et rend illusoire la tenue le 29 avril du premier tour de la présidentielle. Encore bravo...


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