Le ministre tunisien de l'Intérieur, Lofti ben Jeddou, a annoncé vendredi qu'un salafiste radical, Boubacar Hakim, déjà recherché pour contrebande d'armes venant de la Libye voisine, était le principal suspect dans l'assassinat de Mohamed Brahmi, l'opposant tué jeudi. Boubacar Hakim serait également impliqué dans l'assassinat en février dernier d'un autre opposant laïc, Chokri Belaïd. Selon les autorités, la même arme - un pistolet automatique de calibre neuf mm - a en effet servi dans les deux cas.
"Les premiers éléments de l'enquête ont montré l'implication de Boubaker Hakim, un élément salafiste extrémiste", a déclaré à la presse le ministre tunisien de l'Intérieur Lotfi Ben Jeddou. "L'arme utilisée pour abattre Mohamed Brahmi est la même qui a servi à tuer Chokri Belaïd", a révélé le ministre. L'autopsie a montré que l'opposant, tué devant son domicile, avait été atteint par 14 balles de 9 millimètres, a indiqué le bureau de Procureur de la République.
"Un élément terroriste parmi les plus dangereux"
Selon lui, Boubaker Hakim est "un élément terroriste parmi les plus dangereux, objet de recherches au niveau international L'homme, âgé de 30 ans, natif de Paris et répertorié comme "ouvrier expatrié", était déjà recherché en Tunisie pour détention et trafic d'armes, a ajouté M. ben Jeddou. Il a échappé récemment à la police qui a donné l'assaut à son domicile. "Il a pris la fuite, abandonnant ses effets personnels et des armes", a indiqué de son côté Mustapha Taieb Ben Amor, directeur de la sûreté publique. "Des armes à feu, deux bombes artisanales, des munitions et un révolver et des armes blanches ont été saisis", a-t-il précisé.
Il a indiqué qu'à ce jour huit suspects impliqués dans les deux meurtres ont été identifiés, mais aucun n'a été arrêté. Un portrait de l'homme portant la barbe a été montré à la télévision au moment où le ministre d'adressait à la presse.
Vague de protestation
En réponse à une question, le ministère de l'Intérieur, un indépendant en poste depuis mars, a exclu l'implication de partis politiques dans l'assassinat des deux opposants de gauche. "L'enquête ne l'a pas démontré, nous ne disposons d'aucun élément prouvant l'implication d'une partie politique" en Tunisie, a-t-il assuré.
De son côté, le chef de Nidaa Tounes, le principal parti d'opposition tunisien, a imputé au gouvernement la responsabilité de l'assassinat de M. Brahmi, estimant que "si ce gouvernement avait dévoilé l'identité des commanditaires et des tueurs de Chokri Belaïd, nous n'en serions pas là". "Il n'y a pas eu de sérieuses poursuites judiciaires, cela a encouragé les criminels à récidiver", a déclaré Béji Caid Essebsi à l'AFP.
La mort de Mohamed Brahmi a entraîné une vague de protestation. La Tunisie observe aujourd'hui une grève générale très suivie - notamment dans le secteur aérien puisque presque tous les vols au départ et à l'arrivée du pays ont été annulés - et les partisans de l'opposition manifestent en nombre dans les rues.