• Mickael Dos Santos, du BEP peinture au djihad

    Mickael Dos Santos, du BEP peinture au djihad

    Le Monde.fr | <time datetime="2014-11-19T18:11:43+01:00" itemprop="datePublished">19.11.2014 à 18h11</time> • Mis à jour le <time datetime="2014-11-19T20:34:24+01:00" itemprop="dateModified">19.11.2014 à 20h34</time> | Par

     

    <figure class="illustration_haut " style="width: 534px"> Devant l'immeuble où Mickaël Dos Santos vivait, le 19 novembre. </figure>

    Maria Dos Santos a 71 ans. Elle a quitté la région de Lisbonne à l’âge de 25 ans pour venir « faire des ménages » en France. Après une vie de labeur, elle est aujourd’hui à la retraite. Elle regardait tranquillement « Antenne 2 », mercredi 19 novembre, quand elle a vu la photo de « Mickael » s’afficher à l’écran. Malgré un bonnet noir et cette longue barbe qu’elle l’a déjà vu porter, elle a immédiatement reconnu son petit-fils. Dans le poste de télé, le journaliste a prononcé les mots « décapitation », « djihad », « Syrie »… Elle a aussitôt appelé sa fille Ana, la mère de Mickael.

    Ana Dos Santos fait des ménages, elle aussi, depuis son arrivée en France. Elle a allumé la télé à son tour. Au téléphone, les deux femmes ont longuement pleuré. Ana Dos Santos a annulé tous les ménages qui étaient à son programme. Elle a quitté son domicile de Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne) pour être entendue mercredi après-midi dans les locaux de la direction générale de la sécurité intérieure pour confirmer l’identité de son fils.

    Quelques heures plus tard, le parquet de Paris confirmait que son fils, Mickael Dos Santos, 22 ans, « jeune converti », originaire de Champigny-sur-Marne, figurait bien parmi les djihadistes décapitant dix-huit otages syriens dans la vidéo diffusée dimanche par l'organisation Etat islamique.

    DANS LES RADARS DES SERVICES DE RENSEIGNEMENT

    Le premier Français apparaissant sur la vidéo, Maxime Hauchard, originaire d’un petit village de l’Eure, avait été identifié dès lundi.

    Mickael Dos Santos est parti rejoindre l’Etat islamique en Syrie en août 2013. C’est à cette époque qu’il apparaît dans les radars des services de renseignement. Il fait alors partie d’un groupe de jeunes qui avaient pris pour habitude de se retrouver à la mosquée de Villiers-sur-Marne, puis s’envole subitement pour la Syrie. Son nom apparaît dans l’information judiciaire ouverte par le parquet de Paris sur cette filière le 10 octobre 2013.

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    IL ADORAIT LA TEKTONIK

    « C’est mon petit-fils, je le vois à la télé, tout le temps, tout le temps, je l’ai reconnu tout de suite », assure au téléphone Maria Dos Santos, bouleversée. « Il était si gentil, si gentil, ils ont dû le droguer pour qu’il devienne comme ça. Il était catholique, il a fait le catéchisme, je ne sais pas comment ils lui ont tourné la tête. »

    La grand-mère se souvient du jour où Mickael Dos Santos a disparu, il y a un an et demi. « Nous devions tous partir au Portugal, comme tous les étés, avec ses parents et ses deux petits frères. Mais il n’a pas voulu nous suivre. Il est resté seul à Champigny. Et c’est là que nous avons appris qu’il était parti en Syrie. »

    Si le départ de Mickael Dos Santos a surpris ses proches, sa radicalisation était en cours depuis plusieurs années. Sa petite amie de l’époque, Elizabeth*, aujourd’hui âgée de 24 ans, se souvient de leur rencontre et de sa soudaine conversion. « Nous nous sommes rencontrés en 2008 au lycée professionnel Samuel-de-Champlain, à Chennevières-sur-Marne. Il avait 16 ans, moi 18. Il était en BEP peinture. C’était un petit jeune “fashion”, qui se la pétait un peu. Il adorait la tektonik, et postait même des vidéos de ses tours de danse sur YouTube ».

    UNE CONVERSION SOUDAINE

    La jeune femme décrit le Mickael de cette époque comme un catholique pratiquant, passionné de football et de musique, un bon élève ayant grandi « dans une famille équilibrée ». « Entre février et mai 2009, il a fait un stage en entreprise avec un ami musulman modéré. Il s’est mis d’un coup à parler du Coran, des sourates. De plus en plus souvent. Un jour, c’était en mai, il m’a annoncé qu’il voulait se convertir. Il m’a demandé de porter le voile et de quitter l’école. C’est là qu’on s’est séparé. Il s’est radicalisé d’un coup, il est passé du coq à l’âne. Il s’est converti une semaine après notre séparation. »

    Maria Dos Santos se souvient que son petit-fils a commencé à se laisser pousser la barbe à cette époque, et à porter « des robes longues ».

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    « IL NE MANGEAIT PLUS À TABLE EN FAMILLE »

    « On ne lui disait rien, pour ne pas le fâcher. Quand sa mère lui parlait de sa conversion, ça l’énervait, il voulait qu’elle se convertisse aussi. Il ne parlait plus avec son père à cause de ça. Il ne mangeait plus à table en famille, mais dans sa chambre, où il priait tout le temps ». Sa famille perd le fil. Sa mère est désemparée. « La personne qu’elle avait sous son toit était devenue un étranger », se souvient Elizabeth.

    La radicalisation de ce jeune homme, qui vivait avec sa mère dans une petite barre d'immeuble devant la Marne, avait été relevée dès 2009 par l'encadrement de son lycée. Très prosélyte, il faisait partie d’un petit groupe de lycéens qui séchaient les cours pour prier dans les couloirs et les salles de classe vides, selon un proche. Il avait abandonné ses études juste avant l’examen du baccalauréat professionnel.

    Après cette identification, Mickael Dos Santos et Maxime Hauchard sont aujourd’hui les deux premiers Français à avoir été filmés à visage découvert lors d’une séance de décapitation.

    * Le prénom a été modifié à la demande de l’intéressée.


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