• Pourquoi les agriculteurs se dirigent vers Paris

     

    Pourquoi les agriculteurs se dirigent vers Paris

    LE MONDE ECONOMIE | <time datetime="2015-09-02T12:17:06+02:00" itemprop="datePublished">02.09.2015 à 12h17</time> • Mis à jour le <time datetime="2015-09-02T18:59:24+02:00" itemprop="dateModified">02.09.2015 à 18h59</time> | Par

    <figure class="illustration_haut " style="width: 534px"> Des centaines d'agriculteurs convergent vers la capitale en vue de manifester jeudi 3 août. </figure>

    Le top départ a été donné par les Finistériens. Les premiers tracteurs se sont élancés mardi 1er septembre de la pointe bretonne. Objectif : Paris, pour la mobilisation des exploitants agricoles orchestrée par la FNSEA jeudi 3 septembre. Au même moment, Stéphane Le Foll rencontrait le commissaire européen Phil Hogan, pour préparer le sommet exceptionnel des ministres de l’agriculture des Vingt-Huit, organisé à la demande de la France, lundi 7 septembre.

    Lire aussi : Les éleveurs laitiers pris au piège de la surproduction

    La FNSEA ne s’en cache pas. Elle souhaite faire pression sur le gouvernement et reprendre en main ses troupes, en prélude à ce sommet bruxellois. C’est d’ailleurs à la sortie d’une réunion à l’Elysée avec François Hollande, le 24 août, que le premier syndicat agricole français avait annoncé la couleur. Il promettait de dégainer l’artillerie lourde avec plus de 1 000 tracteurs lancés à l’assaut de la capitale.

    <figure class="illustration_haut " style="width: 534px"> Cartographie des rassemblements d’agriculteurs à Paris, jeudi 3 septembre. </figure>

    Une « rallonge » exigée

    Le premier bataillon, breton comme il se doit, en revendique 70. Les représentants des fédérations régionales les plus éloignées viendront, eux, plus prosaïquement, en bus ou en train. Les tracteurs seront pour une bonne part acheminés par les céréaliers d’Ile-de-France, qui viennent d’engranger une fructueuse récolte. « Les céréaliers franciliens assiégeront Paris », claironnent-ils dans leur communiqué. Mais aussi par les betteraviers du Nord de la France, qui se sont associés au mouvement au même titre que les producteurs de colza. Arboriculteurs, producteurs de légumes et bien sûr, éleveurs, compléteront les troupes.

    La FNSEA, associée dans cette mobilisation aux Jeunes agricultures (JA), veut parler « au nom de l’agriculture française » et demander, une fois de plus, moins de normes environnementales, moins de contrôles et plus d’allégements fiscaux. Des mots d’ordre récurrents pour les tenants d’une agriculture productiviste. Ils dénoncent la perte de compétitivité des exploitations agricoles françaises exposées à la concurrence mondiale. Et les distorsions de concurrence, en particulier sociales, au sein même de l’Union européenne (UE).

    Confronté à un été chaud, avec de multiples actions menées sur le terrain par des éleveurs laitiers, des producteurs de porc et de viande bovine, le gouvernement tente de déminer le terrain. En plein cœur de l’été, le 22 juillet, l’exécutif a annoncé un plan d’urgence pour l’élevage. Les différentes mesures de soutien se chiffraient à 600 millions d’euros. Avant sa démonstration de force, Xavier Beulin, le président de la FNSEA, a demandé une « rallonge » à ce plan. Et lancé le chiffre de 3 milliards d’euros qui, selon lui, seraient nécessaires pour réduire l’écart de compétivité entre la France et l’Allemagne.

    « Effet d’aubaine »

    Les menaces de la FNSEA pèsent sur le gouvernement et tout particulièrement sur son porte-parole et ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll. Soucieux d’éteindre le feu,
    François Hollande a promis un nouveau train de mesures jeudi 3 septembre. M. Beulin et une délégation de la FNSEA devraient aussi être reçus ce jour-là à Matignon par le premier ministre, Manuel Valls.

    Pendant ce temps, M. Le Foll prépare le sommet extraordinaire de Bruxelles demandé par la France pour discuter des problèmes des éleveurs laitiers mais aussi porcins. Il a rencontré ses homologues espagnols et portugais puis le ministre allemand de l’agriculture. Mardi, il est allé à Bruxelles dialoguer avec le commissaire européen à l’agriculture, Phil Hogan, qui devra faire des propositions. Et a rediscuté ensuite avec son homologue allemand. La recherche d’un consensus n’est pas évidente. Les discussions portent essentiellement sur des mesures techniques censées enrayer l’effondrement du prix du lait et de celui du porc, causé par une surproduction.

    Lire aussi : « J’en ai marre de tes cochons ! »

    Tous les acteurs français de la filière laitière demandent un relèvement du prix d’intervention. Un prix minimum garanti auquel les pouvoirs publics peuvent acheter les excédents pour les stocker. Aujourd’hui, il est fixé à 210 euros la tonne et limité à 109 000 tonnes. Un certain nombre de pays, dont la Belgique, la Lituanie, la Pologne et le Royaume-Uni, ont déjà acheté à ce prix des stocks de poudre de lait écrémé. La filière laitière française demande que le seuil d’achat soit relevé à 270 euros. Une proposition qui ne sied guère à l’Allemagne, qui craint l’« effet d’aubaine ». Elle préférerait une augmentation des volumes d’intervention.

    Deux visions s’opposent

    La question de l’emploi de l’enveloppe des amendes récoltées au sein de l’UE pour les dépassements de quotas en 2014 sera aussi au cœur des débats. Bruxelles avait budgété un montant de 450 millions d’euros. Il atteindrait en fait 900 millions d’euros. Cette anticipation de la fin des quotas laitiers, fixée au 1er avril 2015, a d’ailleurs participé à la surproduction mondiale actuelle. Certains souhaiteraient que cette enveloppe budgétaire serve à financer les mesures de soutien à l’élevage. Mais c’est la Commission qui va faire le choix de son attribution. Et l’aide aux migrants fait partie de ses priorités politiques.

    Pour le porc, les discussions vont porter sur une prolongation des mesures de soutien au stockage privé pour, là aussi, réduire les volumes sur les marchés et soutenir les cours. Et surtout sur une négociation avec la Russie sur la levée pour tout ou partie des membres de l’UE de l’embargo sanitaire qui pèse sur les ventes d’abats depuis 2014.

    A l’occasion du sommet du 7 septembre, les éleveurs européens ont décidé de manifester. Mais l’unanimité n’est pas de mise. Le Copa-Cogeca, équivalent européen de la FNSEA, a appelé à manifester. Mais aussi l’European Milk Board (EMB), qui défend pour sa part un prix rémunérateur en tentant de contrôler la production au sein de l’UE. Deux visions de l’agriculture dans les rues bruxelloises. Car au-delà des mesures d’urgence, l’Europe doit réfléchir à sa politique agricole. Et peut-être trouver des solutions pour mieux faire cohabiter des modèles différents. Le lien au terroir, qui fait la richesse de la filière viticole française, les filières bio demandées par les consommateurs et les signes de qualité sont des atouts à faire prospérer tout autant que les grandes cultures industrielles.


    Tags Tags :
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :