• "Reviens, Nicolas, ils sont devenus fous !"

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    "Reviens, Nicolas, ils sont devenus fous !"

    Créé le 25-11-2012 à 22h07 - Mis à jour à 22h31     lien

     

    L'UMP s'est engagée dans une conduite suicidaire qui risque d'affaiblir pour longtemps la droite républicaine. A moins qu'un fantôme familier ne vienne jouer les sauveurs...

    Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé et François Fillon en 2002, 10 ans avant la crise qui secoue actuellement l'UMP. (FACELLY/SIPA)

    Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé et François Fillon en 2002, 10 ans avant la crise qui secoue actuellement l'UMP. (FACELLY/SIPA)
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    Telle la secte de Jim Jones, l'UMP a avalé son breuvage empoisonné, non dans la forêt lointaine de Guyana, mais dans la jungle de la politique française. Le suicide collectif avait jadis eu pour ingrédients le jus d'orange et le cyanure. Cette fois, le mélange est tout aussi mortel : l'ambition et le cynisme.

    Dans une élection aussi serrée, alors que les accusations de fraudes se sont multipliées, le bon sens le plus élémentaire aurait dû conduire la présidence du parti ou, à tout le moins, ses instances arbitrales, à prononcer l'annulation du vote. L'UMP aurait mis en place une direction provisoire, laissé derrière elle ce mauvais souvenir et organisé un nouveau scrutin dans quelques semaines ou quelques mois. Au lieu de cette mesure salvatrice et évidente, qui aurait sauvé le parti de la droite républicaine, Jean-François Copé refuse toute médiation et s'accroche à un trône pourtant miné par la triche. Au lieu de cela, François Fillon s'apprête à porter le différend devant la justice, de manière à porter à son rival un coup dont il ne se relèvera pas.

    On aurait grand tort de renvoyer dos à dos les deux protagonistes. De longue main, Jean-François Copé et ses partisans ont tout mis en place pour frustrer François Fillon d'une victoire qu'il croyait acquise. En réduisant le nombre des bureaux de vote, en usant largement d'un système contestable de procurations, en utilisant à son seul avantage les fichiers informatiques (provoquant la démission de celui qui en était chargé), en annonçant sa victoire avant que les instances légales se soient prononcées, en refusant de corriger l'oubli de trois fédérations dans le décompte qui le plaçait en tête de quelques voix, l'Iznogoud de Meaux a biaisé le scrutin et provoqué la juste fureur de son adversaire. Lequel a fait preuve d'un invraisemblable amateurisme en laissant son rival détourner les moyens de l'appareil à son profit.

    Deux UMP vont maintenant s'affronter

    Mais l'UMP doit aussi s'en prendre à elle-même. Comme l'a benoîtement avoué l'un de ses dirigeants, les statuts du parti étaient conçus pour assurer l'élection d'un candidat unique. Dès lors qu'un semblant de démocratie est venu bousculer les anciennes habitudes, le vieux parti a vu ses vieilles structures éclater, ses vieilles coutumes s'effondrer, ses vieilles combines apparaître au grand jour des chaînes d'information continue. Faute d'avoir été réformée à temps, l'UMP a explosé en plein vol d'élection.

    Son sort est-il scellé ? En principe oui : deux UMP vont maintenant s'affronter, dans une organisation coupée en deux ou bien au sein de deux partis croupions qui se livreront un duel à mort. La droite républicaine, qui avait le vent en poupe face aux difficultés de la gauche au pouvoir, est affaiblie pour plusieurs années, le temps que l'un des deux adversaires passe de vie à trépas politique. Le Front national de Marine Le Pen et le Centre de Jean-Louis Borloo vont tenter de se partager ses dépouilles dans une opposition désormais morcelée et déconcertée, avec une bonne chance d'y parvenir.

    Et si Sarkozy revenait...?

    A moins bien sûr qu'un nouveau coup de théâtre ne vienne bouleverser une nouvelle fois cette intrigue tragi-comique. Quoique perdant dans les quatre ou cinq dernières élections, Nicolas Sarkozy, grâce à une défaite plus serrée que prévu, est devenu la référence ultime de nombreux militants, comme le montre le succès de la motion présentée par les cadets de la "Droite forte", qui ont promené son souvenir comme un ostensoir. Voué jusqu'à maintenant à une retraite active, l'ancien président, s'il souhaite revenir dans le jeu politique (ce qui reste à prouver), voit s'ouvrir devant lui une fenêtre béante. Laissons un instant parler notre imagination. Atterré par le sort de la formation qu'il a présidée, sentant l'aspiration profonde de la droite déboussolée, Nicolas Sarkozy lance un appel solennel au sursaut, demande un nouveau scrutin et annonce sa candidature.

    Qui pourrait, dans ce cas, l'empêcher de gagner les suffrages de militants soudain galvanisés par cette réapparition ? Le mot d'ordre de cette opération éclair est tout trouvé : "Reviens, Nicolas, ils sont devenus fous !". Sauveur de l'UMP, le conférencier des terres exotiques deviendrait sans coup férir le nouveau chef de l'opposition. Ainsi le duel Hollande-Sarkozy de la dernière élection deviendrait le pain quotidien du spectacle politique. La mort de l'UMP déboucherait sur la résurrection de Nicolas Sarkozy. Pour l'instant, il s'agit d'une pure fiction. Mais après tout il est permis de rêver. Ou de cauchemarder...


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