• Russie : Poutine tente d'éviter une aggravation de la contestation

    05/03 | 17:30 | Yves Bourdillon et Benjamin Quenelle

    Russie : Poutine tente d'éviter une aggravation de la contestation

    Alors que sa victoire électorale semble entachée de fraudes, l'homme fort du pays fait déployer des forces de police massive, mais laisse aussi miroiter une libération de condamnés, dont Mikhaïl Khodorkovski. Les investisseurs, eux, saluent la levée d'incertitudes politiques.

    Ecrit par
    Yves BOURDILLON
    Yves BOURDILLON
    Journaliste
      
    BENJAMIN QUENELLE
    Correspondant à Moscou
    Son dernier article

    Déploiement massif de policiers et de militaires dans le centre de Moscou mais aussi allusion à une possible libération de Mikhaïl Khodorkovski ; le Kremlin a essayé lundi 5 mars d'intimider et d'amadouer à la fois la contestation, au lendemain de la victoire de Vladimir Poutine avec 64 % des voix, mais victoire entachée de fraudes selon des observateurs russes et étrangers.

    Les dirigeants du mouvement de contestation qui avait mis le pouvoir sur la défensive après les législatives de décembre ont affirmé hier que l'ampleur des falsifications rendait le résultat du scrutin illégitime, mais que leur mouvement devait rester légal et pacifique. Ils ont organisé une manifestation qui a rassemblé dans le calme près de 20.000 personnes en soirée sur la place Pouchkine, dans le centre de Moscou, encadrée par d'imposantes forces de sécurité.

    Menaçant d'user du bâton mais jouant aussi de la main tendue, le pouvoir a essayé de désamorcer la colère de cette classe moyenne urbaine qui fournit la majorité des bataillons de contestataires et réclame un authentique Etat de droit. Alors que Vladimir Poutine dénonçait dans son discours de victoire une opposition prête à « détruire l'Etat pour usurper le pouvoir », le président sortant, Dimitri Medvedev annonçait lundi une révision imminente de la condamnation de 32 personnes, dont l'ancien patron Mikhaïl Khodorkovski, exproprié et condamné à rester en prison jusqu'en 2016 sous l'accusation d'avoir volé la plus grande partie du pétrole vendu par l'ex-numéro un russe du secteur, Ioukos (à se demander comment alors il avait pu régler les salaires de 50.000 personnes pendant dix ans). Une telle libération serait assurément un signal fort, de nature à rassurer les investisseurs russes et étrangers qui doutent généralement de l'équité du procès fait à l'ancien magnat. Mais une des figures de la contestation, Boris Nemtsov, expliquait lundi aux « Echos » qu'il ne fallait pas être dupe d'une telle annonce faite « comme par hasard aujourd'hui » et que le pouvoir « est naïf s'il croit ainsi désamorcer les protestations ». En outre, Dimitri Medvedev est coutumier d'annonces non suivies d'effet après l'intervention de celui qui s'avère être, plus que jamais, l'homme fort du régime, Vladimir Poutine.

    Nouveaux rassemblements

    Toutefois, l'élection de ce dernier à un troisième mandat signait, aux yeux des investisseurs, la levée d'une série d'incertitudes politiques. La Bourse de Moscou a ouvert en hausse hier et la banque Alfa a estimé que, « s'il n'y a pas encore de certitude sur les réformes qui seront menées [...], les risques politiques de ces derniers mois devraient baisser, ce qui va soutenir les marchés d'actions russes », encore relativement bon marché. Pour Chris Weafer, économiste à Troika Dialog, les investisseurs vont maintenant suivre de près la composition du prochain gouvernement et voir « comment Poutine va tenir ses promesses électorales sans éreinter le budget, ni accroître la dépendance du pays » aux hydrocarbures, qui fournissent déjà la majorité des recettes fiscales ou en devises. Les manifestations dans les rues deviennent une routine dans la vie politique russe, ce qui devrait amener les marchés à « réagir aux événements de façon moins nerveuse qu'auparavant », a ajouté Alfa Bank. Les marchés vont être servis : l'opposition va vraisemblablement appeler à de nouveaux rassemblements samedi pour protester contre des fraudes qui ont permis, selon l'ONG Golos de gonfler le résultat de Vladimir Poutine de 13 points. Alors que les chefs d'Etat européens « souhaitaient bonne chance » au leader russe non sans embarras, l'Osce jugeait le scrutin « inéquitable », soulignant avoir repéré des incidents au moment du décompte des voix dans un tiers des bureaux supervisés. A côté de cas de « carrousels » bien documentés , la transmission de nombre de procès-verbaux aux commissions électorales a échappé aux observateurs...

    YVES BOURDILLON (ENVOYÉ SPÉCIAL) ET BENJAMIN QUÉNELLE (CORRESPONDANT À MOSCOU)

    (Photo AFP)

    EN VUE Vladimir Poutine


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