• Stéphane Hessel et la Déclaration des droits de l?homme : mauvaise polémique

    Histoire 07/03/2013 à 16h09

    Hessel et la Déclaration des droits de l’homme : mauvaise polémique

    Pierre Haski | Cofondateur Rue89

    François Hollande aux funérailles de Stéphane Hessel, le 7 mars 2013 (WITT/SIPA)

    Dans son discours d’hommage à Stéphane Hessel, jeudi, François Hollande a évoqué en termes flous le fait qu’il « participa comme témoin privilégié à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme ». Certains se sont étonnés de la « formule bizarre » du Président.

     

    Trois jours plus tôt, l’ancien PDG de l’Agence France presse (AFP), Claude Moisy, avait dénoncé, dans une tribune au Monde, la « frénésie moutonnière des médias », qui pour beaucoup avaient répété en boucle, dans leurs nécrologies du grand disparu, qu’il avait participé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme, aux Nations Unies, en 1948, au sortir de la guerre.

    Qu’en est-il réellement ? Et Stéphane Hessel a-t-il laissé embellir sa légende comme certains de ses détracteurs ne se gênent pas pour le dire ?

    Collaborateur de Henri Laugier

    En fait, cette affaire en dit plus sur les médias que sur Stéphane Hessel. Car ce dernier, qui n’avait que 31 ans en 1948, n’était évidemment pas en position d’être l’un des rédacteurs de cette déclaration historique.

    Dans un livre qui fait référence, « Citoyens sans frontières » (Fayard), une série d’entretiens avec le journaliste Jean-Michel Helvig, paru en 2008, Stéphane Hessel évoque avec beaucoup de modestie son rôle pendant cette période.

    Hessel raconte qu’il est recruté, un peu par hasard, par le diplomate français Henri Laugier, qui dirige au siège des Nations Unies le département des affaires sociales et des droits de l’homme. Il se décrit comme « Executive officer du département des social affairs », c’est-à-dire, explique-t-il, « le plus proche collaborateur de Laugier ».


    Stéphane Hessel en 2010 (Audrey Cerdan/Rue89)

    Cela n’en fait d’aucune manière l’un des rédacteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont les auteurs sont d’un autre calibre que ce tout jeune diplomate en herbe. La liste, publiée sur le site Wikipédia, donc accessible à tous, est impressionnante :

    « La fonction est modeste »

    Le rôle de Stéphane Hessel ? Il l’explique lui-même :

    « Pendant les sessions de l’Assemblée générale, ou celles de la Commission des droits de l’homme qui se tiennent tantôt à New York, tantôt à Genève, je me tiens au côté du président de la Commission sociale de l’Assemblée ou de Mme Roosevelt, la présidente de la Commission des droits de l’homme.

    Je veille à ce que les rapports soient bien rédigés et communiqués. La fonction est modeste, je suis jeune, mais elle me met en contact avec tous les intervenants dans cette période d’affirmation de l’ONU.

    Ce sera peut-être la période la plus ambitieuse de ma vie, avec le sentiment prenant de travailler non pour l’éternité, mais pour l’avenir. On prépare le monde l’après-guerre avec la mémoire immédiate de ce qui s’est passé durant les cinq années de guerre. »

    C’est tout, et comme il le dit lui-même, c’est « modeste ».

    D’où est venue la légende qui fait de lui l’un des rédacteurs de la dite Déclaration ? Claude Moisy n’exclut pas le fait que Stéphane Hessel ait pu laisser se construire cette légende flatteuse par des formules ambigües.

    Mais force est de constater qu’à l’heure de la rédaction de notices nécrologiques, alors que les propres propos de Stéphane Hessel cités ci-dessus et d’autres encore sont sans ambiguïtés, beaucoup de journalistes ont répété la légende sans sourciller. Au risque de semer le doute sur le parcours d’un homme qui en a suffisamment fait dans sa vie pour qu’on n’en rajoute pas...


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