Ce pourrait être la journée la plus meurtrière depuis le début de la révolte syrienne : selon l'opposition, plus de 200 civils ont été tués dans la nuit du vendredi 3 février au samedi 4 février dans des bombardements du régime sur Homs, haut-lieu de la contestation. Le régime a démenti être à l'origine du massacre. 

Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé a affirmé que les autorités syriennes avaient "franchi un pas supplémentaire dans la sauvagerie". Le chef de la diplomatie française estime que "le massacre de Homs est un crime contre l'humanité" et que"ses auteurs devront en répondre", peu avant un vote du Conseil de sécurité de l'ONU.

Homs, à 110 km au nord de Damas, est surnommée par les opposants "capitale de la Révolution". Le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe la plupart des courants de l'opposition et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui établit des bilans quotidiens depuis le début de la révolte, parlent tous deux de plus de 200 morts.

260 morts selon le Conseil national de sécurité

"Les forces d'Assad ont bombardé (...) des zones résidentielles à Homs, dont Al Khalidiya et Qoussour, faisant au moins 260 morts, des civils, et des centaines de blessés, dont des hommes, des femmes et des enfants", affirme le CNS. Ce dernier accuse les forces d'Assad d'"avoir aussi bombardé Jisr al-Choughour (nord-ouest), les banlieues de Damas, et l'est de Ghouta (près de Damas) dans ce qui semble être une préparation à des massacres similaires".

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a fait état de tirs de mortiers sur Homs, faisant au moins 217 morts, des civils, et plusieurs centaines blessés. Ce bilan ne peut pour l'instant être confirmé par des sources indépendantes, mais des vidéos diffusées sur Youtube peu après l'annonce du massacre et rassemblées par Al-Jazira, montrent des cadavres défigurés amassés à même le sol et des scènes de chaos où des ambluances tentent de se frayer un chemin. 

Un activiste dont la chaîne a recueilli le témoignage raconte la situation dramatique à l'hôpital public de la ville. "Nous tentons de déplacer certains blessés vers un hôpital privé car le dispositif médical ne peut plus suivre. Il y a une pénurie de sang, d'oxygène et de matériel de premier secours", explique-t-il depuis l'hôpital. Attention, la vidéo ci-dessous comporte des images particulièrement choquantes.

Trente ans avant, le père de Bachar Al-Assad perpétrait le massacre de Hama

Le régime du président Bachar al-Assad, qui ne reconnaît pas l'ampleur de la révolte populaire, a opposé un démenti par le biais de l'agence officielle Sana. "Une source de presse dément le pilonnage par l'armée de certains quartiers de Homs, colporté par les chaînes de télévision qui incitent" à la violence, précise cette dernière. L'agence affirme que les civils "montrés par les chaînes de télévision satellitaires sont des citoyens qui ont été kidnappés et tués par des hommes armés".

Ce massacre intervient presque 30 ans jour pour jour après celui de Hama, en février 1982, perpétré par Hafez Al-Assad, le père de Bachar Al-Assad. Le président de l'époque avait réprimé dans le sang la révolte menée par la mouvement islamiste contre son régime. L'opération armée avait fait plusieurs dizaines de milliers de morts.

Sana a accusé les hommes armés de "vouloir exploiter ces informations pour (faire pression) au Conseil de sécurité" de l'ONU qui tente de mettre au point une résolution condamnant la répression.

Vote sur un projet de résolution édulcoré au Conseil de sécurité

Les 15 pays membres du Conseil doivent voter samedi sur un projet de résolution. Selon des diplomates, ils se prononceront sur un texte qui "soutient pleinement" les décisions prises par la Ligue arabe en janvier pour assurer une transition vers la démocratie en Syrie. Mais les détails de la transition, en particulier le transfert des pouvoirs du président syrien Bachar al-Assad à son vice-président, ont été laissés de côté pour ne pas heurter Moscou.

Malgré cela, la Russie a déclaré samedi par la voix de son ministre desaffaires étrangères que le projet  ne lui convenait "absolument pas". Allié traditionnel de Damas, le pays dispose d'un droit de veto qui lui permet de bloquer la résolution. Un précédent texte avait été bloqué en octobre dernier par un veto russe et chinois.

Pour Alain Juppé, "le déchaînement de violence [à Homs] souligne l'urgence que le Conseil de sécurité des Nations unies sorte de son silence". "Ceux qui freineraient l'adoption d'une telle résolution prendraient une lourde responsabilité devant l'histoire", at-il averti. Après plus de dix mois de violences, le bilan total de la révolte s'élèverait selon les militants à au moins 6 000 morts . 

FTVi avec AFP