C'était un discours d'apaisement. Dimanche 25 août, à la clôture de l'université d'été du Parti socialiste, Jean-Marc Ayrault a appelé le gouvernement à serrer les rangs après les tiraillements de l'été, et les socialistes à la cohésion, plaidant aussi pour l'union à gauche avant les scrutins de 2014 face à la droite et à la "nouvelle extrême droite".
Pour son grand discours de rentrée, le premier ministre, régulièrement et vivement applaudi, est apparu très sûr de lui et offensif, se posant en véritable patron de la majorité. Il a également cherché à rassurer sur la future réforme des retraites ainsi que sur la contribution climat énergie.
- Les clivages au sein du gouvernement
Jean-Marc Ayrault a mis en garde sa majorité contre les "jeux personnels qui viennent ruiner les efforts" du gouvernement. "Le débat entre sensibilités est légitime, il est même nécessaire. Il y a des congrès pour cela, a-t-il estimé. Il peut y avoir des désaccords. Mais il y a des instances du parti pour les exprimer."
Se défendant d'avoir une "vision caporaliste" de la politique, le chef de la majorité a dit que "chaque fois que le débat est sur la place publique avant même d'avoir été posé entre nous, c'est une faute contre notre collectif". "Je vois des clubs et parfois des miniclubs se créer. J'entends des prises de position (...) qui donnent quelques secondes de célébrité ou de visibilité à leurs auteurs", a lancé M. Ayrault devant plusieurs ministres, comme Manuel Valls et Arnaud Montebourg. "Mais j'entends surtout (...) des Français qui ne goûtent pas et ne retiennent qu'un sentiment de flou et de désaccord", a-t-il déclaré. La veille, il avait déjà ironisé devant des journalistes à propos des ministres qui recherchent "leur minute de célébrité".
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<figure class="illustration_haut"> </figure>Jean-Marc Ayrault a particulièrement mis en garde la ministre de la justice, Christiane Taubira, et le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, contre toute "opposition" entre police et justice, qui "affaiblit l'autorité de l'Etat". Selon lui, "il n'y a pas deux approches, deux lignes, deux politiques, mais qu'une seule ligne au sein du gouvernement qu['il] condui[t] : la ligne, c'est celle de l'efficacité". Il a rappelé que l'objectif de la future réforme pénale devrait à la fois abolir l'automaticité des peines mais aussi éviter toute libération automatique de détenu. Il n'a toutefois pas évoqué la peine de probation annoncée la veille par Mme Taubira.
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- Les élections municipales et européennes de 2014
Le premier ministre a demandé l'union des partis de gauche et des écologistes, un véritable "impératif d'unité", pour "faire barrage" au Front national en mars 2014. Un appel relayé par le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, qui a promis une "croisade républicaine contre l'extrême droite" et une mobilisation des socialistes pour démonter les propositions du programme frontiste.
"Cette nouvelle extrême droite a changé de masque sans changer de visage", a mis en garde Jean-Marc Ayrault, accusant la "droite classique" d'être "sous l'influence" de cette "nouvelle extrême droite, plus avenante, plus habile et plus présentable". Alors que le Parti de gauche prône l'autonomie des listes au premier tour dans de nombreuses villes, le premier ministre, comme le premier secrétaire, a fait valoir que "communistes, radicaux, écologistes" et "socialistes" étaient "pour l'essentiel, d'accord" au niveau local.
- La réforme des retraites
Le gouvernement s'apprêtant à connaître un automne difficile avec une réforme très délicate des retraites, le premier ministre s'est également voulu rassurant sur ce thème. "Je connais l'inquiétude de nos concitoyens : des plus âgés qui redoutent des baisses de pension, des plus jeunes qui craignent de ne jamais toucher de retraite", a déclaré M. Ayrault. Selon lui, la "difficulté" de financement du système des retraites se "situe dans l'intervalle entre aujourd'hui et 2035". Le premier ministre a rappelé que le dynamisme démographique permettrait une amélioration de la situation dans une vingtaine d'années. "Mais nous ne nous contenterons pas d'une réforme qui se bornerait à une simple mesure de gestion financière et d'ajustement budgétaire", a-t-il assuré.
Jean-Marc Ayrault a promis la prise en compte de la pénibilité, "parce que l'espérance de vie à la retraite n'est pas la même pour un ouvrier ou un cadre". Il a aussi assuré que la situation des femmes, particulièrement victimes du chômage et de carrières morcelées, serait mieux prise en compte.
Le chef du gouvernement consultera les partenaires sociaux lundi et mardi à Matignon, à l'heure des ultimes arbitrages de cette réforme qui doit être examinée en conseil des ministres le 18 septembre.
- La contribution climat énergie
Jean-Marc Ayrault a également assuré que la future contribution climat énergie, annoncée jeudi par le ministre de l'écologie, Philippe Martin, ne "modifierait pas le niveau des prélèvements" fiscaux en France. Elle "ne sera pas un impôt de plus, mais une réforme fiscale, une réorientation de la fiscalité", a-t-il expliqué.
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"Il s'agit de modifier peu à peu, progressivement, les bases sur lesquelles reposent notre fiscalité en dissuadant les comportements polluants et en favorisant les comportements vertueux", a expliqué M. Ayrault, ajoutant que "l'écologie, ce n'est pas un discours pour les campagnes électorales et un grand silence après".