• Alain Finkielkraut fait ses premiers pas

    sous la coupole de l’Académie

    Le Monde.fr | <time datetime="2016-01-29T12:38:52+01:00" itemprop="datePublished">29.01.2016 à 12h38</time> • Mis à jour le <time datetime="2016-01-29T14:19:11+01:00" itemprop="dateModified">29.01.2016 à 14h19</time> | Par

     

     

    <figure class="illustration_haut " style="width: 534px"> Alain Finkielkraut , avec l'écrivain Dominique Bona, à l'Institut de France, le 28 janvier 2015 </figure>

     

     

    Sous la coupole, les travées sont pleines. Toutes les vies d’Alain Finkielkraut se sont donné rendez-vous, les anciens maoïstes, les professeurs de gauche, les « réacs » de service, les écrivains Milan Kundera et Yasmina Reza, Fabrice Luchini qui virevolte, Régis Debray qui observe. Même Manuel Valls est venu s’asseoir, au premier rang. Comme si, au lendemain de la démission de Christiane Taubira, partie pour ne pas avoir à défendre la loi sur la déchéance de nationalité, le premier ministre avait voulu afficher son soutien au penseur inquiet de l’identité française, désormais immortel à l’Académie française.

    Au son des tambours, les habits noirs brodés de rameaux d’oliviers avancent à petit pas. Vingt et un mois plus tôt, l’élection d’Alain Finkielkraut à l’Académie avait été tumultueuse. Ses opposants les plus virulents ont pourtant préféré « sécher » la cérémonie de son intronisation, ce 28 janvier. Ni Dominique Fernandez, ni Michel Serres, ni François Weyergans ne sont là. Huit croix noires avaient marqué le refus de voir « Finky » siéger quai de Conti ? La belle affaire ! L’académicien Jean-Marie Rouart, une des mémoires de l’institution rappelle que l’anthropologue Claude Lévi-Strauss en avait recueilli dix, et l’helléniste Jacqueline de Romilly douze. Rouart lui-même n’en a récolté que deux, mais après avoir échoué quatre fois…

    Tout de même, proclame le nouvel élu radieux, « un nom cacophonique, dissuasif, invendable (…), et même osons le dire, un nom à coucher dehors, est reçu sous la coupole de l’institution fondée, il y aura bientôt quatre siècles, par le cardinal de Richelieu ! » « Finky », ce chevalier blanc d’une France en pleine désagrégation, ce « nouveau réactionnaire » qui fustige sans cesse la gauche, l’école, les banlieues, l’islam, l’art contemporain, Internet, ce défenseur de la littérature, de l’Histoire et d’une éducation d’élite, est enfin radieux.

    Pourfendeur de la « bien-pensance »

    Son plus gros défi consiste à devoir faire l’éloge de celui auquel il succède au fauteuil 21 de l’Académie, Félicien Marceau, écrivain à succès aujourd’hui oublié, passionné de Balzac, esprit très français bien qu’il soit d’origine belge, mais condamné par contumace en 1946 pour « trahison » et faits de collaboration. Finkielkraut, qui n’aime rien tant que la bagarre contre « la bien pensance » a pris le problème à bras-le-corps :

    « Un défenseur exalté de l’identité nationale, oublieux de ses origines vagabondes et astreint à faire l’éloge d’un collabo : il n’y a pas de hasard, pensent nos vigilants et ils se frottent les mains, ils se lèchent les babines, ils se régalent à l’avance de cet édifiant spectacle. »

    Il s’en tire en ramenant Marceau à une petite collaboration sans envergure où il a évité de sombrer dans l’antisémitisme. Et en profite pour fustiger à nouveau, oubliant Marceau pour parler de lui-même, « la mémoire devenue doxa, la mémoire moutonnière, dogmatique et automatique, la mémoire de l’estrade, la mémoire revue, corrigée et recrachée par le système » et ses adeptes qui « s’indignent de ce dont on s’indigne, ils se souviennent comme on se souvient. »

    Voilà maintenant venu le temps de dresser le portrait du nouvel académicien. C’est l’historien Pierre Nora, grand supporter de l’arrivée d’Alain Finkielkraut à l’Académie, qui s’est proposé. Sous la plume de Nora défile depuis quarante ans la mémoire de la nation. Il est bien plus prudent que Finkielkraut, qui s’emballe toujours « et ne sait pas ne pas réagir », comme le dit son ami Kundera. Il est moins noir, aussi. Mais il sait que les angoisses de l’auteur de l’Identité malheureuse ont fini par rejoindre celles d’une partie du pays.

    Il a donc préparé un discours à la fois bienveillant et parsemé de petites piques d’ironie. « Quel personnage télévisuel vous êtes devenu ! Survolté, convulsif, habité d’une gestuelle identifiable », moque-t-il gentiment. Mais il veut aussi débattre avec le philosophe.

    « D’accord avec vous sur le constat – la désintégration de l’ensemble national, historique et social et même le naufrage d’une culture dans laquelle nous avons tous deux grandi –, j’exprimerai mon désaccord sur les causes de cette décomposition, lance-t-il d’une voix claire. Vous aviez tendance à en faire porter la responsabilité principale sur l’immigration et à réduire le phénomène à la confrontation avec l’islam. A mon sens, le mal vient de plus loin, de la transformation douloureuse d’un type de nation à un autre que tout mon travail d’historien cherche à analyser . Ses causes sont multiples et l’immigration me paraît avoir joué surtout un rôle d’accélérateur, de révélateur et de bouc émissaire. »

    « Transgresseur de l’omerta publique »

    Sur son siège, Alain Finkielkraut, sanglé dans son habit, s’agite, lève les yeux au ciel, bataille déjà intérieurement. Mais l’historien ajoute : « L’identité nationale serait peut-être aussi malheureuse s’il n’y avait pas un seul immigré, car le problème de la France ne me paraît pas la puissance de l’islam, mais la faiblesse de la République. Peut-être les événements de cette dernière année sont-ils en train de me donner tort… » Nora n’ignore pas les controverses que suscite Alain Finkielkraut. Ni sa place dans le débat public. « Vous êtes le transgresseur de l’omerta publique, celui qui dit – fort bien – ce que les politiques ne peuvent pas dire et ce que les journalistes ne veulent pas dire. » Mais il souligne aussi la « haute culture » de cet érudit qui trimballe toujours un gros cartable chargé de livres annotés.

    Pour finir , c’est au pessimiste, à celui qui cache son humour sous une plainte constante que l’historien s’adresse : « La compagnie vous a ouvert les bras, vous allez connaître avec elle ce que c’est qu’une identité heureuse ». En sortant, sous les flashs des photographes, le nouvel immortel Finkielkraut rit comme un enfant.

    Lire aussi : Alain Finkielkraut à l’Académie française, de cape et d’épée


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    Mort d’Ettore Scola, maître du grotesque

    et des regrets

    Le Monde.fr | <time datetime="2016-01-19T23:05:11+01:00" itemprop="datePublished">19.01.2016 à 23h05</time> • Mis à jour le <time datetime="2016-01-21T08:56:08+01:00" itemprop="dateModified">21.01.2016 à 08h56</time> | Par

    Ettore Scola à Cannes, en 1982.

    Il avait dirigé les plus grands acteurs italiens, à commencer par Sophia Loren et Marcello Mastroianni dans Une journée particulière, présenté à Cannes en 1977, chroniqué les bouleversements de la société italienne depuis ses marges, comme le bidonville romain d’Affreux, sales et méchants (1976), et tiré parmi les premiers le bilan amer des désillusions de l’après Mai 68 dans La Terrasse (1980). Ettore Scola, maître du cinéma italien des années 1960 à la fin du XXe siècle, est mort, mardi 19 janvier, dans une clinique romaine, à 84 ans. « Son cœur s’est arrêté de battre par fatigue », ont annoncé son épouse et ses filles, citées par le Corriere della Sera.


    Ettore Scola est né le 10 mai 1931 à Trevico, en Campanie. Sa famille s’installe bientôt à Rome, où il commence des études de droit tout en manifestant un intérêt pour le dessin satirique (des décennies plus tard, il exposera dans une galerie parisienne). Il collabore à la revue humoristique Marc’Aurelio, tout comme les scénaristes Age et Scarpelli ou Federico Fellini.

    Sa vocation juridique cède définitivement le pas au cinéma au début des années 1950. Le jeune homme est d’abord scénariste. En douze ans, de 1952 à 1964, il collabore au script de dizaines de films, qui pour la plupart n’ont pas marqué l’histoire du cinéma, comme Deux Nuits avec Cléopâtre (avec Sophia Loren dans le rôle titre) ou Toto dans la Lune, variation cosmique des tribulations du comique napolitain. On retient quand même sa contribution aux scénarios des premiers grands films de Dino Risi, Le Fanfaron, Les Monstres ou La Marche sur Rome.

    Enlisement de la société italienne

    En 1964, il passe à la réalisation avec Parlons femmes, un film à sketches, comme c’était la mode à l’époque en Italie, dans lequel joue déjà l’un de ses interprètes d’élection, Vittorio Gassman. Suit en 1968 Nos héros réussiront-ils à retrouver leur ami mystérieusement disparu en Afrique ?, film d’aventure satirique tourné entre l’Italie et l’Angola, avec Alberto Sordi et Bernard Blier. Puis Drame de la jalousie (1970) le fait remarquer par la critique française, sensible au mélange de grotesque et de réalisme de cette histoire d’amour triangulaire située dans un quartier pauvre de Rome. Le film est interprété par Monica Vitti, Giancarlo Giannini et Marcello Mastroianni et vaut à ce dernier un prix d’interprétation au Festival de Cannes. Il réalise ensuite Permette, Rocco Papaleo ? (1971) et La Plus Belle Soirée de ma vie (1972), d’après La Panne, pièce de Friedrich Dürrenmatt, avec Michel Simon et Sordi.

    A cette époque, Ettore Scola tourne des documentaires pour le Parti communiste italien, sur les fêtes de l’Unita, le quotidien du parti ou les luttes à la Fiat. En 1974, il connaît un succès international avec Nous nous sommes tant aimés, qui suit le parcours de trois amis – un avocat (Gassman), un professeur (Stefano Satta Flores) et un prolétaire (Nino Manfredi) – de la fin de la guerre aux années 1970. Le film met ainsi en scène l’enlisement de la société italienne dans le système démocrate-chrétien, tout en rendant hommage au néoréalisme de l’après-guerre. « Notre cinéma est toujours mêlé aux faits de la société italienne, nous avons hérité cela du néoréalisme : “Toujours suivre l’homme”, indiquait Zavattini. Même en changeant de langage, de style, je crois que le message est resté », explique alors le réalisateur dans un entretien accordé au Monde.

    « Typologie de l’isolement, de la différence sociale »

    Scola revient ensuite au grotesque, avec Affreux, sales et méchants, qui a pour décor un bidonville romain menacé par l’urbanisation galopante, et met en scène la cupidité de ses habitants, dominés par un tyran qu’incarne Nino Manfredi. Le film remporte le prix de la mise en scène à Cannes en 1976. Après une satire de la télévision (Mesdames et messieurs, bonsoir), il réalise ce qui reste son film le plus célèbre, Une journée particulière (1977). Il y raconte la rencontre, le 6 mai 1938, entre une ménagère romaine (Sophia Loren) et un intellectuel homosexuel persécuté par le régime fasciste (Marcello Mastroianni). En bruit de fond, la radio raconte une autre rencontre, entre Mussolini et Hitler. Le réalisateur aimait à rappeler qu’il portait l’uniforme des « fils de la louve », l’organisation enfantine fasciste, ce jour-là.

    A Jacques Siclier, qui l’interrogeait dans les colonnes du Monde, Scola expliquait : « On fait toujours à peu près le même film. J’ai toujours été préoccupé par une typologie de l’isolement, de la différence sociale. Je ne pars pas d’un sujet, mais d’une idée que je transpose dans le grotesque et l’humour, car je trouve que c’est une façon noble et tragique de représenter les problèmes contemporains. » Mais pour les besoins de ce film, Scola se départit tout à fait de son humour sardonique. Peut-être pour compenser, il réalise la même année avec son complice Dino Risi Les Nouveaux Monstres, version actualisée, plus vulgaire, plus érotique, plus méchante, des Monstres de 1963.

    Désillusions de la gauche italienne

    Son film suivant, La Terrasse, est lui tout d’amertume. A travers les mondanités d’intellectuels romains (Mastroianni, Tognazzi, Gassman, Trintignant, Reggiani), Scola fait le portrait des désillusions de la gauche italienne. Ettore Scola est alors au sommet de sa gloire, italienne et internationale. Il est régulièrement sélectionné en compétition au Festival de Cannes et collectionne les trophées. Mais Passion d’amour (1981) et La Nuit de Varennes (1982), comédie historique autour de la tentative de fuite de Louis XVI, ne rencontrent pas le même succès.

    Il reste un triomphe à venir, celui du Bal (1983), adaptation virtuose et muette d’un spectacle du metteur en scène français Jean-Claude Penchenat, qui met en scène des couples évoluant sur la piste d’un établissement populaire. Le film rassemble presque un million de spectateurs en France et est nommé à l’Oscar. Suivront encore neuf longs-métrages de fiction qui n’égaleront pas leurs prédécesseurs. Même la réunion de Jack Lemmon et Marcello Mastroianni dans Macaroni (1985), même le retour à la fresque historico-intimiste avec La Famille (1987) ne convainquent pas tout à fait. Le dernier film de cette série, Gente di Roma, sorti en France en 2004, a pour toile de fond les manifestations contre Silvio Berlusconi. Alors qu’il avait annoncé sa retraite, Ettore Scola a donné un dernier film, un documentaire présenté à la Mostra de Venise en 2013 intitulé Qu’il est étrange de s’appeler Federico, dans lequel Scola évoquait son aîné, son ancien collègue de Marc’Aurelio, Fellini.

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    NOUS NOUS SOMMES TANT AIMES - Bande-annonce VO par CoteCine

     

     


    NOUS NOUS SOMMES TANT AIMES - Bande-annonce VO par CoteCine Ettore Scola en quelques dates

    10 mai 1931
    Naissance à Trevico (Campanie).

    1952
    Premier scénario, « Canzoni di mezzo secolo ».

    1964
    Premier film en tant que réalisateur, « Parlons femmes ».

    1974
    Succès international de « Nous nous sommes tant aimés ».

    1978
    Deux nominations aux Oscars pour « Une journée particulière », sorti en 1977.

    1983
    Dernier succès en France avec « Le Bal ».

    19 janvier 2016
    Mort à Rome.

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    Voici le premier jour de votre vie sans David Bowie

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    David Bowie , sans conteste, était un génie . Que l’on ait aimé toute l’œuvre du personnage , ou seulement quelques albums , la trajectoire de cet extraterrestre de la pop a au moins une fois croisé celle de tout amateur de musique qui se respecte. Alors que  Blackstar , son nouvel album monumental vient de sortir, David Bowie décide de quitter cette terre et d’aller voir ailleurs si son talent touchera autant d’autres mondes et d’autres civilisations. Hommage à un  Homme qui venait d’ailleurs , et qui met toute sa planète d’accueil en deuil.

    11/01 16:00

    On a lu tout et son contraire sur David Bowie. Normal, le bonhomme a tout fait, touché à tout ( cinéma , musique, mode ), flirté avec les plus grands, participé à la création de pas mal de courants musicaux , certains qu’il a anticipé, d’autres dont il s’est inspiré . Avant Bowie le musicien, Bowie l’acteur , Bowie l’androgyne, Bowie l’alien, Bowie l’inspirateur, et Bowie le copieur, on se souviendra surtout de "Bowie le Caméléon ", quand on repensera, à tête reposée, à la brillante carrière de ce grand grand monsieur du rock (au sens large). Bowie était un artiste, tout simplement . Esthète du bizarre et érudit fasciné par l’étrange, Bowie était un type qui a su donner ses lettres de noblesse à un phénomène contre-culturel, la culture pop-rock (et électro vers la fin), tout en gardant assez de fantaisie – pour ne pas dire de folie - pour délivrer des œuvres ambigües, tordues, toujours borderline et surprenantes.

    Un parcours exemplaire

    C’est bête à dire, mais mis en perspective avec son époque, l’œuvre David Bowie est un sans faute , même quand il décide de répondre aux sirènes du marketing en 1983 avec Let's Dance (album dans lequel il reprendra " China Girl " au profit de son ami – alors vraiment dans la débine – Iggy Pop ).

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    David Bowie a toujours été, soit dans son temps, soit à 20 000 années lumières de la hype dominante , et même quand il suit (l’electro- indus Outside , le drum’n’bass Hearthling ), il accouche de chefs-d’œuvre, d’albums marquants, de monolithes incontournables pour tout amateur de musique exigeant. Celui qui avait adopté l’art du revirement musical comme une stratégie créative continu, a également toujours su s’entourer, ou s’inviter sur les projets les plus innovants et passionnants de son temps. Pour ne citer que quelques collaborations/interventions parmi les plus récentes, on découvrait il y a peu que Blackstar , son tout nouvel album, bénéficiait de la présence de James Murphy de LCD Soundsystem , et que Kendrick Lamar, le jeune rappeur Californien, l’avait grandement influencé. On le croisait également sur le Reflektor d’Arcade Fire en 2013, ou encore sur Return To Cookie Mountain , album mythique de TV on The Radio en 2006. Entre temps, il signait avec The Next Day , son avant dernier disque, un brillant comeback, entre nostalgie et modernité, qui en laissa plus d’un stupéfait.

     

    L’homme aux mille vies

    Artiste schizophrène, Bowie était aussi mystérieux dans son intimité que dans sa vie publique (il ne laissa rien filtrer sur son cancer, que très tardivement). Sexuellement ambivalent, extrêmement intelligent, communiquant surdoué, le bonhomme ose tout, même les excès. Qu’il s’agisse de drogues, de gestes ostentatoires et provocateurs (de retour d’un tumultueux séjour Los Angeles en 1976, il salut la foule qui l’accueil d’un impeccable salut hitlérien), Bowie était le parfait "21st Century Schizoid Man". Accusé de fascination pour le nazisme, il débarque en 1976 accompagné d’un orchestre entièrement composé de musiciens noirs pour Station to Station et produit une musique qui doit autant à Nil Rodgers qu’à Kraftwerk, mélangeant des genres supposés antagonistes. Avec le producteur et musicien Brian Eno, il s’initie à l’art de la production , et aux musiques allemandes d’avant-garde (Harmonia ou Neu!) et signe ce que les spécialistes appelleront sa " trilogie" Berlinoise, se posant comme le précurseur de la new wave. Ami fidèle , il tire de la panade des musiciens cultes tels qu’Iggy Pop ou Lou Reed , deux personnalités dont il relance la carrière tout en vampirisant les egos. Une capacité à inspirer et à s’inspirer lui vaudra autant d’admiration que de haine.

    Désormais tous orphelins

    Evidemment, on ne compte plus les groupes, projets, figures , du rock, de la pop, de la new wave et du post-punk ou de l’électro influencés (et pas toujours uniquement musicalement) par l’œuvre protéiforme de David Bowie : LCD Soundsystem, Savages, Soulwax, Matthew Dear, Arcade Fire , Hot Chip, Madonna, Kayne West, Disappears (qui rejouaient tout Low récemment au Musée d’ Art Contemporain de Chicago), Joy Division (Ian Curtis était un fan absolu de David Bowie) et New Order , Bauhaus , Björk, Pharrell Williams , une bonne part de la scène électro, tous sont orphelins de Bowie aujourd’hui . Mais le deuil ne sera pas uniquement porté dans le domaine de la musique, car l’artiste qui avait le don pour synthétiser l’esprit de son temps, était aussi continuellement en quête d’ autre chose. Bowie était un intellectuel , qui s’inspirait et inspirait les autres, à partir de médiums que beaucoup auraient pu juger disparates et opposés. Il fut un temps la star d’un jeu vidéo par exemple, et collabora avec le compositeur David Cage sur le jeu The Nomad Soul en 1999. Il fit aussi beaucoup l’acteur, incarnant un être débarqué sur terre par erreur dans The Man Who Fell To Earth , un vampire en couple avec Catherine Deneuve dans Les Prédateurs , un soldat rebelle à l’autorité dans Furyo, ou Andy Warhol dans Basquiat , pour n’en citer que quelques-uns.

    Ce matin, à l’ annonce de son décès à 69 ans - d’un cancer contre lequel il se battait depuis 18 mois –nul doute que la planète entière retient son souffle (à 13h15, on recensait plus de 2 millions de tweets à la mémoire de l’artiste). Au milieu des violences et de la folie contemporaine, les êtres comme David Bowie savaient mettre en perspective, nous faire oublier, le temps d’un album, d’un morceau, la pesanteur d’ être humain. 

     

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  • Blackstar, le cadeau d'anniversaire de David Bowie

    Le 08 janvier 2016 par
     
    Blackstar, le cadeau d'anniversaire de David Bowie
    Lazarus est le second clip de "Blackstar", le nouvel album de David Bowie

    Le Caméléon célèbre aujourd'hui ses 69 ans avec un 25e album très attendu et dévoile un nouveau clip pour fêter ça.

    Il avait déjà marqué les esprits en 2013 en annonçant ce même jour son retour en studio après 10 ans d'absence : le 8 janvier est un jour à surveiller pour tous ceux qui suivent de près ou de loin David Bowie, son anniversaire étant désormais synonyme de surprises et de nouvelles du chanteur.

    Avec la sortie officielle aujourd'hui de Blackstar, c'est le retour d'un Bowie triomphal qui se confirme, comme le laissait présager les extraits distillés depuis l'automne. Enregistré avec des musiciens de jazz au studio Magic Shop à NYC, ce disque mêle sur 7 titres les cuivres, le rock et l'électro dans une expérimentation détonnante qui en fait l'un des projets les plus avant-gardistes de l'icône britannique depuis longtemps. Après avoir mis en ligne quelques jours avant noël Lazarus, troisième titre de ★, Bowie fête d'ailleurs la sortie de son 25ème album en offrant aujourd'hui le clip vidéo de ce titre également écrit pour la comédie musicale du même nom.

    On y retrouve le Bowie masqué du clip de Blackstar, alité à l'hôpital en proie à des cauchemars et hanté par une sorte de  croque-mitaine caché sous son lit. Six minutes durant, le chanteur britannique s'y dévoile pénitent, presque blessé, portant sa voix magnifique et théâtrale sur des airs aussi électriques que jazzy, avec un saxophone très présent sur la dernière partie du titre. Un univers musical troublé dans lequel Bowie apparait une nouvelle fois parfaitement à l'aise, appuyant ses élans angoissés sur le mélange des genres qu'il apprécie tant.

    Le chanteur avait annoncé dès l'automne son nouvel album, mais c’est déjà assorti d’un clip vertigineux de 10 minutes qu’il avait dévoilé  Blackstar, premier extrait éponyme de ce nouveau disque. On y découvrait pour la première fois en images ce Bowie mystique, parfois masqué, en forme de prophète new-age d’une étoile noire où se télescopent des mondes étranges et des créatures de science-fiction :

    Inquiétant et fascinant, Bowie apparait déjà transfiguré dans ce clip dirigé par le réalisateur suédois Johan Renck, et qui mêle les univers fétiches de la rockstar, de l’espace intersidéral à la métamorphose des corps.


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