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La France, royaume du favoritisme d’Etat
Argent public, fortunes privées
Le compromis proposé, le 25 novembre, par la justice californienne dans l’affaire Executive Life n’inclut pas la holding de M. François Pinault, dont les rapports étroits avec M. Jacques Chirac sont connus. L’interpénétration entre responsables politiques et patrons d’entreprises privées pose la question de la neutralité de la puissance publique. Comment l’Etat pourrait-il lutter contre l’insécurité sociale quand celle-ci résulte d’incivilités d’industriels ayant pignon sur rue ?
par Olivier Toscer, décembre 2003AperçuLe 15 octobre 2003, le gouvernement de M.Jean-Pierre Raffarin rompt l’arrangement qu’il avait conclu un mois et demi plus tôt avec la justice américaine dans le but de clore le dossier Executive Life. Contre une amende de 440 millions d’euros, les pouvoirs publics pouvaient mettre fin aux poursuites engagées par la justice américaine après le rachat frauduleux par le Crédit lyonnais, alors nationalisé, d’une compagnie d’assurances californienne. Mais M. François Pinault, milliardaire et ami intime du président de la République, et M. Jean Peyrelevade, ancien directeur adjoint de cabinet de M. Pierre Mauroy à Matignon, puis président-directeur général de la banque aujourd’hui privée, tous deux personnellement impliqués dans cette affaire, seraient restés dans le collimateur du parquet de Los Angeles.
L’Etat préfère donc rechercher un nouvel accord qui protège cette fois tous les acteurs français impliqués, qu’ils soient publics ou privés. Le coût pour les finances publiques de l’arrangement judiciaire risque d’en être considérablement alourdi. D’autant que l’Etat prendra en charge les amendes imposées à Artémis, le holding personnel de M. François Pinault, l’une des plus grandes fortunes de France, et à M. Jean Peyrelevade, un banquier privé.
La gestion du dossier Executive Life illustre cette méthode, très ancienne, consistant à privatiser les gains et à nationaliser les pertes. Engendré par la promiscuité entre la technocratie d’Etat et les élites privées, protégé par le faible degré de connaissance de la chose économique par le public (d’autant que les médias, protagonistes et profiteurs de ce genre d’arrangement, en parlent assez peu...), le favoritisme d’Etat éclaire les politiques économiques suivies par tous les pouvoirs, de droite ou de gauche, depuis un peu plus de vingt ans.
L’affaire Executive Life est l’une des queues de comète de l’affaire du Crédit lyonnais, une carambouille à base de gaspillage, de légèreté et de brigandage. Pour les finances publiques, le désastre de la banque encore publique (...)
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