L uis Bueno avait été battu à mort en octobre 2012 à Montady. Le procès devant la cour d'assises de Montpellier se poursuit. Verdict jeudi.
"Un homme est mort sans raison, c'est ça ?" Dans le box de la cour d'assises, Antoine Heleria et Jean-Joseph Salguero acquiescent en silence à la question du président Pons. "Qu'est-ce que la victime a fait pour mériter ça ?", insiste le magistrat. "Rien", admettent les accusés, qui n'expliquent pas non plus le déchaînement de violence survenu ce 8 octobre 2012 sur le boulodrome de Montady et qui a coûté la vie à Luis Bueno, 45 ans.
Tout le monde est saoul
La journée avait pourtant bien commencé pour ces gitans espagnols. Ils ont fêté les 18 ans d'Angelina, la femme de Salguero, un anniversaire copieusement arrosé au pastis, à la bière et au vin. Si bien que le trio - Antoine Gimenez, le troisième accusé, est décédé en détention provisoire - s'est rendu au bar de Montady pour continuer à boire. Sur place, ils croisent quatre jeunes femmes et la victime, un informaticien.
"Comme si le crâne se cassait"
Trois des quatre jeunes femmes qui ont assisté à la rixe ont défilé, mardi, à la barre (la quatrième était malade). Elles ont confirmé l’origine de la bagarre pour cette histoire de whisky. Sur le rôle d’Antoine Heleria, l’une n’a rien vu, les autres ont plus ou moins confirmé au minimum un coup de poing qui a mis groggy Luis Bueno. Elles ne sont pas revenues sur leurs déclarations sur les coups portés ensuite par Salguero. "Un premier coup comme s’il voulait écraser la tête de la victime, un deuxième comme s’il tapait dans un ballon", avait raconté l’une. "On a entendu un bruit horrible, comme si le crâne s’était cassé", pour une autre. "Effectivement, il est mort parce que son crâne s’est cassé", a confirmé le président Pons.Tout le monde est saoul, sympathise et décide de se rendre au boulodrome avec deux bouteilles de whisky qu'Antoine Heleria vient d'acheter au bar. La soirée aurait alors dégénéré parce que Luis Bueno n'aurait pas voulu cotiser pour l'alcool tout en se moquant d'Heleria qui aurait été arnaqué par le barman. De quoi énerver l'accusé qui aurait porté le premier coup, une gifle ou un coup de poing, selon certains témoins. Il conteste.
Le président Pons : "Quand on fait le total des coups reçus, on est loin du compte"
"Non, je l'ai juste poussé quand la bagarre a commencé", affirme le Biterrois, renvoyant la responsabilité de l'altercation et des coups à Antoine Gimenez, alors en libération conditionnelle après avoir purgé une peine pour meurtre. Ce que goûte peu le président : "M. Gimenez est mort, c'est facile ! Il n'est pas là pour se défendre." Antoine Heleria, qui était resté muet en garde à vue tout comme devant les experts, n'en démord pourtant pas : il n'y est pour rien. "Donc c'est une erreur judiciaire ? Passer d'une embrouille à un mort, il faut que des choses se soient passées !, s'agace le magistrat. Quand on fait le total des coups reçus, on est loin du compte ! Qui ment ? Des témoins disent que vous avez porté des coups de poing !""Je dis la vérité", maintien l'accusé.
La victime n'a pas eu le temps de se défendre
À ses côtés, son jeune beau-frère, Jean-Joseph Salguero, 23 ans, adopte une attitude radicalement différente et endosse les coups les plus graves. Il raconte être intervenu après que Gimenez et Heleria s'en sont pris à la victime. "L'embrouille faisait beaucoup de bordel, les filles essayaient de s'interposer, je voulais que ça s'arrête, j'ai vu M. Bueno pousser mon beau-frère, j'ai mis un coup de poing", indique-t-il. Il reconnaît aussi un premier coup de pied dans la tête, plus difficilement le deuxième alors que l'informaticien est au sol.
"Je ne vais pas contester la possibilité que ce soit vrai, admet-il, aux forceps. J'ai continué à frapper, je ne sais pas pourquoi." Il ne reconnaît pourtant pas les autres coups supposés révélés par l'autopsie sur la boîte crânienne de la victime. "Je ne m'en souviens pas", avance-t-il. "Le compte n'y est pas", lui rappelle la cour. Seule certitude admise de tous : Luis Bueno, lui, n'a porté aucun coup et n'a pas eu le temps de se défendre.
> Suite des débats ce mercredi et verdict jeudi.