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    Ce que cache le "pacte" de compétitivité promis par Hollande

    Créé le 26-10-2012 à 11h49 - Mis à jour à 18h35   lien

    DECRYPTAGE Le chef de l'Etat a écarté l'idée d'un "choc de compétitivité", c'est-à-dire d'un transfert massif et brutal des cotisations sociales sur l'impôt. Il devrait être étalé sur cinq ans.

     

    François Hollande (AFP)

    François Hollande (AFP)
     

    Ne parlez plus de "choc" ni de "trajectoire". Sur la compétitivité, la gauche au pouvoir veut désormais un "pacte" autour duquel tout le monde est prié de s'entendre. C'est François Hollande en personne qui a utilisé le mot jeudi 25 octobre, dans l'espoir de mettre fin aux disharmonies gouvernementales. "En ces matières, il n'y a pas de formule magique, il n'y a pas de réponse unique, c'est un ensemble de moyens, de dispositions, de politiques, qui doivent être mobilisés. Je propose donc un pacte entre tous les acteurs", a lancé le chef de l'Etat devant un parterre d'entrepreneurs réunis par Oséo. 

    Le terme est promis à un bel écho médiatique dans les prochains jours. A la sortie d'une réunion à Matignon, ce vendredi, sur la compétitivité (la deuxième de la semaine), Pierre Moscovici l'a repris à son compte. "Comme l'a dit hier (jeudi, ndlr) le président de la République, ce gouvernement, cet exécutif prépare un pacte de compétitivité", a expliqué le ministre de l'Economie et des Finances sans donner aucun détail.

    En employant ce mot de "pacte", François Hollande cherche à sortir le sujet de la compétitivité de l'interminable débat sur le coût du travail. Et surtout du "choc" de 30 à 40 milliards d'euros, préconisé par le Medef et l'opposition, qui passerait par le transfert massif de cotisations patronales vers un cocktail d'impôts (TVA, CSG, impôt sur le revenu, coup de rabot sur des niches fiscales...). L'argument porte d'autant plus que l'ex-président d'EADS Louis Gallois, missionné par le gouvernement pour faire des propositions, et Frédéric Saint-Geours, directeur des marques de PSA, tous deux étiquetés "patrons de gauche", s'y sont déclarés favorables (voir ici et ). 

    Un choc trop risqué pour la consommation 

    Le président de la République a reconnu jeudi que le coût du travail, ou plutôt le poids des cotisations sociales dans le salaire brut, était "l'une des dimensions" du problème "mais pas la seule". Aussi a-t-il promis un "basculement" des charges. La mise au point est on ne peut plus claire, au moment où les disharmonies au sein du gouvernement rendaient illisibles ses intentions et nourrissaient les procès en incompétence. Rien qu'à Bercy, Benoît Hamon est plutôt contre, Pierre Moscovici et Arnaud Montebourg plutôt pour, à condition pour le premier qu'il vise les bas salaires et pour le second qu'ils soient conditionnés à l'investissement. Le ministre du Travail Michel Sapin insiste de son côté pour que les secteurs exposées à la concurrence internationale soient les seuls concernés.

    Pour autant, il ne faut pas s'attendre à un transfert de charges massif et immédiat. "Je déconseille l'idée du choc, qui traduit davantage un effet d'annonce qu'un effet thérapeutique", a écarté François Hollande. Le "basculement" dont il est question "se fera dans le temps" pour ne pas "affecter la demande intérieure". A entendre ces mots, il semble que, pour l'exécutif, cette mesure, si elle se traduit par une hausse de la TVA ou de la CSG, pèsera sur le pouvoir d'achat des Français. Or, la consommation étant le dernier moteur de l'économie hexagonale, un choc risque surtout de la déstabiliser à court terme. En outre, comme le raconte Libération ce vendredi, l'Elysée redoute que les marges dégagées par ce choc soient in fine "mangées" par des hausses de salaires revendiquées à l'intérieur des entreprises au prétexte de la pression sur le pouvoir d'achat.

    Un calendrier étalé plutôt qu'une mesure intempestive

    Avec le pacte promis, il s'agit donc d'éviter "de brutaliser l'économie française", selon Pierre Moscovici, en privilégiant "une action constante, continue, qui va s'étaler sur la totalité du mandat", voire au-delà. D'après une source gouvernementale citée cette semaine par l'AFP, l'objectif devrait bien être un transfert d'environ 30 milliards d'euros, mais seulement à l'horizon 2017. Au début du mois, Le Monde avait évoqué l'hypothèse de 40 milliards d'euros sur cinq ans. Quoi qu'il en soit, le mot de "pacte" choisi par François Hollande semble renvoyer à un engagement à moyen terme. Un agenda, en quelque sorte. 

      -> Lire l'interview d'Euxode Denis, de l'Institut de l'entreprise: "Un choc est préférable au pacte de François Hollande"

    Toutefois, le "pacte de compétitivité" qui se dessine ne sera pas limité à la redéfinition du coût du travail. Jeudi, le chef de l'Etat s'est rappelé aux bons souvenirs de la campagne électorale en évoquant la modulation de l'impôt sur les sociétés en fonction de la taille des entreprises. Le troisième de ses 60 engagements évoque trois taux différents (35% pour les grandes, 30% pour les petites moyennes et 15% pour les petites), ainsi que l'incitation au réinvestissement des bénéfices. 

    Le gouvernement veut une réforme globale et ambitieuse

    François Hollande a évoqué d'autres pistes, comme "l'accès aux capitaux, le prix de l'immobilier, la complexité administrative, la rigidité du marché du travail, l'inadéquation des formules, voire même de la formation, le poids de la fiscalité" et "l'énergie". "Ce pacte doit être global, il doit concerner l'ensemble des aspects de la compétitivité, la compétitivité hors coût et la compétitivité coût", a renchéri Pierre Moscovici, exégète de la parole présidentielle. 

    Réforme globale, le chantier de la compétitivité promet, sur le papier, d'être le grand oeuvre économique du quinquennat Hollande. Ce qui explique le tempo très lent adopté par le gouvernement, qui donne quelque peu l'impression de patiner sur le sujet. D'après Libération et Le Figaro, la stratégie générale sera connue peu après la remise du rapport Gallois, le 6 novembre. Des premières mesures -techniques et hors-coût- seront alors annoncées, avant une deuxième série fin décembre, sans doute sur le marché du travail, quand les partenaires sociaux auront bouclé la négociation sur la sécurisation de l'emploi. Mais la partie la plus brûlante du sujet, le coût du travail, ne sera abordée qu'au mois de janvier. On n'a donc pas fini d'entendre parler du "pacte de compétitivité".


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