• Coup dur pour la Maison de l'histoire de France

    Coup dur pour la Maison de l'histoire de France

    Créé le 16-07-2012 à 14h34 - Mis à jour à 14h58 

    La ministre de la Culture a annoncé un "moratoire" sur ce dossier, projet culturel phare et contesté du sarkozysme. Ses détracteurs s'en félicitent.

     

    Photo prise le 22 janvier 2001 à Paris de l'Hôtel de Soubise qui abrite les Archives nationales à Paris et où doit être installée la Maison de l'histoire de France. (PATRICK KOVARIK / AFP)

    Photo prise le 22 janvier 2001 à Paris de l'Hôtel de Soubise qui abrite les Archives nationales à Paris et où doit être installée la Maison de l'histoire de France. (PATRICK KOVARIK / AFP)
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    L'avenir de la Maison de l'histoire de France est désormais en suspens. Mercredi 11 juillet, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti annonçait un "moratoire sur toute décision prise" par son comité, précisant que des décisions quant au devenir du musée, dont l'ouverture est prévue en 2015, seraient annoncées "dans un calendrier proche".

    Les formules employées n'augurent rien de bon quant au futur du projet, à l'origine de remous dans le milieu des historiens depuis l'annonce de sa création par Nicolas Sarkozy en 2009. Le contexte budgétaire "ne va pas dans le sens de la poursuite de programmes de travaux de prestige", a ainsi avancé Aurélie Filippetti, qui note "un déséquilibre net entre les investissements faits à Paris et en Ile-de-France par rapport au reste du territoire".

    "Une réflexion plus souple et critique sur l’histoire"

    La posture adoptée par la nouvelle ministre ne constitue en rien une surprise. Dans son ouvrage de campagne "Le Rêve français" (1), François Hollande n'avait pas hésité à torpiller le projet : "La transmission de l’histoire nationale ne peut être décrétée, ni le musée ou la 'maison' qui va avec", soulignait-il. Ajoutant que l'idée de la Maison de l'histoire de France, "avec l’improvisation administrative qui la caractérise, sa dimension de fait du prince sans concertation ni réflexion, son refus de prendre en compte les avancées de la recherche et le questionnement des publics, est un projet qui n’est pas à la hauteur des grandes initiatives culturelles françaises".

    En suspendant l'évolution du grand projet culturel de Sarkozy, la ministre donne satisfaction à ceux parmi les historiens qui ne cessaient de pointer un projet qu'ils considèrent comme politique, partisan et imposé. Et plaçaient beaucoup d'espoirs en l'alternance. La décision de Filippetti "est un choix de responsabilité et de raison", se félicite Vincent Duclert, professeur à l'Ecole des hautes études en sciences sociales et co-auteur de deux ouvrages très critiques (2) envers la Maison de l'histoire de France. Pour l'historien, il relève "de l'autorité politique de trancher sur le destin de ce projet, en dehors des pressions qu’exerçaient ses responsables pour sauver une entreprise très contestable et contestée".

    "La ministre a pris une bonne décision, qui permet de stopper un peu la machine en écartant pour le moment les risques que présente ce projet", renchérit quant à lui l'historien Nicolas Offenstadt (3), qui se réjouit d'une nouvelle équipe ministérielle "qui paraît ouverte à une réflexion plus souple et critique sur l’histoire".

    "Force de proposition"

    Pour celui qui s'est opposé sans relâche à la Maison de l'histoire de France depuis ses origines, des éléments de continuité avec le projet actuel, à l'instar d'un "portail internet de qualité sur l’histoire", sont pourtant envisageables... A condition de "rompre complètement avec l’objectif de promotion de l’identité nationale". Vincent Duclert, quant à lui, espère "l’abrogation" de la Maison et "son remplacement par une institution ambitieuse et apaisée". 

    A l'inverse, l'orientation prise par le dossier laisse sans doute possible un goût amer aux vingt historiens et conservateurs membres du Comité d'orientation scientifique et caution intellectuelle du projet. Son président, Jean-Pierre Rioux, qui assurait il y a quelques mois au "Nouvel Observateur" voir dans les critiques récurrentes envers la Maison de l'Histoire de France une opposition de principe, estime que "quoi qu'il arrive, il a sa force de proposition, même si chacun aujourd'hui feint de n'en avoir pas connaissance". La polémique semble avoir encore de beaux jours devant elle. 

     Audrey Salor - Le Nouvel Observateur 

    (1) Editions Privat, 2011, pp. 39 et 41-42.

    (2) "Maison de l'histoire de France", Enquête critique, Fondation Jean-Jaurès, avril 2012, avec Isabelle Backouche.

    (3) Professeur à Paris I Panthéon-Sorbonne, auteur de "L'historiographie", PUF, Que-sais-je ? 2011.


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