La Cour des comptes estime que l'effort budgétaire nécessaire pour respecter les engagements internationaux de la France en 2012 devrait être compris entre 6 et 10 milliards de mesures nouvelles, dans son audit des finances publiques remis lundi au gouvernement.
Pour 2013 et dans l'hypothèse d'une croissance économique de 1%, l'effort exigé - mesures fiscales et économies budgétaires supplémentaires - serait "nettement plus important" et atteindrait 33 milliards d'euros, prévient la Cour dans ce rapport de 250 pages remis officiellement lundi 2 juillet au Premier ministre Jean-Marc Ayrault.
Les "sages de la rue Cambon" estiment toutefois "possible" d'y parvenir, notant que cet effort serait "de même ampleur que celui réalisé par la France à la veille de l'entrée dans la zone euro", de 1994 à 1996.
La fourchette de 6 à 10 milliards évoquée pour 2012 est par ailleurs très proche des "7 à 10 milliards d'euros" que le gouvernement a indiqué rechercher pour respecter l'engagement pris par la France à l'égard de ses partenaires européens de ramener son déficit public de 5,2% du produit intérieur brut en 2011 à 4,5% à la fin de l'année.
Matignon se montre satisfait de ses orientations
Du côté du gouvernement, ces chiffres permettent de justifier la dynamique impulsée. Pour Matignon, l'audit de la Cour "valide" les "mesures et orientations" du gouvernement en matière de réduction du déficit, a estimé le ministère lundi dans un communiqué. "La situation des finances publiques laissée par le précédent gouvernement rend nécessaire une action déterminée de redressement", ajoutent les services du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault.
Le gouvernement avait pris soin de préparer le terrain de la rigueur. Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a annoncé dimanche que le gouvernement s'apprêtait à abaisser ses prévisions de croissance à 0,4% au mieux pour 2012 et entre 1% et 1,3% pour 2013, contre 0,5% et 1,7% attendus jusqu'à présent pour ces deux années.
La Cour recommande de supprimer des postes de fonctionnaires
Concernant la fonction publique, la Cour des Comptes a lancé un véritable avertissement. Didier Migaud a estimé que "seule une baisse des effectifs" de la fonction publique serait "à même de fournir des marges de manoeuvre en matière de politique salariale".
Un scénario de stabilisation des effectifs des fonctionnaires, a-t-il averti lors d'une conférence de presse, supposerait, "outre le gel du point d'indice, une réduction significative de l'avancement des fonctionnaires et un quasi gel des mesures catégorielles".
"Si le gouvernement veut avoir des marges de manoeuvre salariales, cela passe, dans la situation budgétaire actuelle, par une réduction des effectifs", a-t-il insisté alors que le gouvernement a promis leur stabilisation globale.
Selon Didier Migaud, la masse salariale de la fonction publique constitue "le principal enjeu budgétaire" dans la mesure où elle représente 13,6% du produit intérieur brut (PIB) de la France. A elle seule, a-t-il souligné, celle des fonctionnaires de l'Etat représente 80 milliards d'euros avec "une croissance tendancielle soutenue": 1,6% par an.
Hausse "difficilement évitable" de la TVA et de la CSG
Pour la Cour, une hausse d'impôts semble donc inévitable. Pour 2013, elle a estimé que l'objectif d'un retour des déficits publics à 3% du PIB supposerait certainement "une hausse des impôts à assiette large et fort rendement, comme la TVA ou la CSG (...) au moins à titre temporaire", alors que le gouvernement entend abroger dès cet été la "TVA sociale" votée par la précédente majorité et qui devait entrer en vigueur à l'automne.
La Cour fait valoir que "l'ampleur de la consolidation budgétaire nécessaire" rendra une hausse de la TVA ou de la CSG "difficilement évitable" l'an prochain si la France compte bien "assurer la trajectoire des finances publiques".
Elle s'inquiète aussi des effets de deux contentieux fiscaux qui ont valu à la France d'être condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne et qui pourraient peser à hauteur de près de 5 milliards d'euros sur l'exercice 2013 et de 1,75 milliard sur 2014.
Dérapage de la prime de Noël sous Fillon
Les "sages de la rue Cambon" estiment en revanche que les "menaces de dépassements" budgétaires pour 2012 -l'héritage de la gestion du gouvernement Fillon- sont d'une "ampleur réduite", comprise entre 1,2 et 2 milliards d'euros.
Parmi ces dérapages, le plus important pourrait provenir de la "prime de Noël" accordée aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) pour un montant de 450 millions d'euros.
(Avec AFP)