C'est sans doute ce qu'on appelle un moment de vérité. Après des mois d'hésitation, le ministre des Finances,Michel Sapin a reconnu ce mercredi matin que les principaux objectifs économiques du gouvernement ne seraient pas tenus. La croissance sera beaucoup plus faible que prévue : 0,4% cette année au lieu des 1% annoncés. Les dépenses publiques vont continuer d'augmenter. Et le déficit des comptes publics ne sera pas maîtrisé avant des années (le ministre français des Finances a reconnu que la France devait une nouvelle fois repousser, à 2017 au lieu de 2015, son engagement à respecter la limite européenne dedéficit public, soit 3% du Produit intérieur brut, c'est la 3e fois que Paris repousse ainsi sa promesse).
En clair, malgré les hausses d'impôt, les recettes fiscales ne suffiront pas à financer le train de vie de l'Etat. "On ne va pas aller chercher des nouvelles recettes, c'est-à-dire des hausses d'impôt, et on ne change pas la stratégie sur la réduction des dépenses publiques. Mais on ne va pas au-delà, ni en recettes nouvelles avec des hausses d'impôt, ni en renforçant la baisse des dépenses publiques", a martelé Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement.
Volte-face de Sapin sur les économies de la France
Malgré cette croissance atone, l'économie française a recommencé timidement à créer des emplois au deuxième trimestre, avec 8.300 nouveaux postes (+0,1%) dans le secteur marchand, a annoncé mercredi l'Insee. Le ministre du travail François Rebsamen a appelé les patrons à aller "plus vite" dans la création d'emplois dans le cadre du Pacte de responsabilité. Et le bilan du pacte de responsabilité, dressé mercredi par François Rebsamen, reste faible : sur 50 branches professionnelles réunies par le ministre, 17n'ont engagé aucune négociation, un constat "inacceptable" pour le ministre du Travail, qui demande au patronat des "résultats" d'ici à la fin de l'année.
En échange de contreparties en matière d'emploi et d'investissement, le pacte prévoit 40 milliards d'euros d'aides publiques sur trois ans, financées par 50 milliards d'économie, que Michel Sapin a promis mercredi de réaliser malgré les difficultés économiques (et contrairement à ce qu'il avait annoncé la semaine dernière, soucieux qu'il était de compenser le mauvais effet de l'annonce sur le déficit français : selon lui, les économies sur la progression naturelle de la dépense publique de 21 milliards d'euros prévues l'an prochain seraient bien maintenues). Depuis l'accord sur le pacte paraphé le 5 mars par le patronat et deux syndicats (CFDT, CFTC), un seul secteur a pris des engagements : la chimie, avec 47.000 créations d'emplois d'ici à 2017.
Insuffisant pour rassurer nos partenaires européens. Se disant "fière" du budget allemand prévu en équilibre pour 2015, la chancelière Angela Merkel a appelé à "une stricte discipline" estimant que "ce qui vaut pour l'Allemagne vaut aussi pour l'Europe". Le même jour, l'ancien ministre français des Finances Pierre Moscovici était confirmé au poste de commissaire chargé des Affaires économiques, alors que l'Allemagne voyait d'un mauvais oeil l'idée de confier la surveillance budgétaire au représentant d'un pays qui repousse ses objectifs. "Il m'a semblé utile que ceux qui connaissent le mieux les problèmes de certains pays viennent de ces pays-là", a tranché mercredi Jean-Claude Juncker, le président de la future Commission, évoquant "la situation budgétaire de la France"...
VIDEO. Croissance : "La hausse des dépenses publiques est continue depuis 10 ans" :