• Elisabeth Badinter, une féministe à contre-courant

    Elisabeth Badinter, une féministe à contre-courant

    Chloé Demoulin - Marianne | Lundi 1 Août 2011 à 12:01

    Le 6 juillet dernier sur France Inter, Elisabeth Badinter dénonçait la façon dont certaines féministes avaient piétiné la présomption d’innocence et s’étaient servi sans scrupule de l’affaire DSK. Le magazine américain The New Yorker a dressé le portrait de celle qu’un sondage - publié par Marianne il y a un an - avait désigné comme « l’intellectuelle la plus influente » auprès des français.



    Ce ne sont pas moins de dix pages que le New Yorker a consacré à Elisabeth Badinter dans son édition daté du 25 juillet. Dix pages pour élucider le mystère Badinter : sa vie, son œuvre, ses combats. Non pas pour parler de « la fille de » son père qui était Marcel Bleustein-Blanchet, le publicitaire connu pour avoir créé Publicis. Non plus pour parler de « la femme de » Robert Badinter, ancien Garde des Sceaux de François Mitterrand qui a abolit la peine de mort. Mais bien essayer de comprendre comment cette intellectuelle férue du XVIIIe siècle – plongée en permanence dans des archives poussiéreuses - parvient à imposer des points de vue féministes qui font autorité (interdiction de la burqa), polémique (refus de la Parité) et captent l’attention des médias (défense de la crèche baby loup, soutien à Charlie Hebdo dans le « procès des caricatures »). Et tous cela, depuis le salon cossu de son appartement situé près du jardin du Luxembourg.

    (The New Yorker - 25/07/11)

    (The New Yorker - 25/07/11)
    Dans un sondage CSA paru dans Marianne en aout 2010, 24% des Français confiaient avoir modifié leur façon de penser après avoir pris connaissance des positions de la philosophe. Ce qui faisait d’elle l’intellectuelle la plus influente du pays devant Jacques Attali et Luc Ferry.

    C'est peut-être parce qu'Elisabeth Badinter cultive irrémédiablement sa propre voix. Comme le 6 juillet dernier sur France Inter, quand après avoir gardé le silence sur l’arrestation de DSK, elle s’emporte contre la manière « obscène » dont « des féministes » se sont servi « d’une possible injustice pour faire avancer » leur propre cause. Elle en profite même pour tacler au passage les féministes américaines qui n’ont aucune « leçon de morale » à donner aux françaises.

    Une féministe qui « n'a pas souffert »

    Ce qui la différencie des autres féministes ? A cette question, Elisabeth Badinter répond que c’est le fait qu’elle n’éprouve pas de ressentiment envers les hommes et sans doute qu’elle n’a « pas souffert », qu’elle est une privilégiée. Pour autant, elle ne pense pas que ce soit un handicap pour mener le combat du féminisme. Bien au contraire, elle prétend que « les classes privilégiées sont souvent les moins tolérantes vis-à-vis des inégalités ».

    Ce qui est sûr, c’est que pour chacun de ses livres (« L’amour en Plus », « Fausse route » et « Le Conflit »), Elisabeth Badinter, connu pour s'être opposée de façon virulente à la Parité - qu'elle considère comme une discrimination inversée, bénéficie d’une bonne couverture dans la presse. Mais « il n’y a pas vraiment d’interlocuteur de poids pour lui répondre », avoue au New Yorker Sylvie Kauffmann - directrice de la rédaction du Monde. Elle suscite certes la polémique dans les milieux féministes mais sa parole fait autorité.

    Tenante d'un féminisme républicain et laïque, elle lutte contre les fondamentalistes qui croient à une « Nature » féminine innée ou pensent qu’on est « passé à côté de l’expérience de la maternité si on a pas souffert ». Elle est persuadée que les jeunes femmes françaises sont entrain de « saper les combats féministes durement gagnés par leurs aînées ». Alors elle pointe du doigt les pro-allaitement comme Edwige Antier, les écolos qui sont contre les couches-culottes jetables   et les autorités médicales ou religieuses qui véhiculent un discours ambiant de culpabilité envers les femmes. Des prises de position qui ne font souvent que renforcer sa posture d'esprit libre, et assoir sa popularité auprès des Français.   

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