• Intermittents : où en est la crise ?

    Intermittents : où en est la crise ?

    Le Monde.fr | <time datetime="2014-06-27T12:24:52+02:00" itemprop="datePublished">27.06.2014 à 12h24</time> • Mis à jour le <time datetime="2014-06-27T15:27:55+02:00" itemprop="dateModified">27.06.2014 à 15h27</time> |Par Clarisse Fabre

    lien Des pancartes lors de la manifestation des intermittents à Montpellier, le 16 juin 2014.

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    <figcaption data-caption="Des pancartes lors de la manifestation des intermittents à Montpellier, le 16 juin 2014. | AFP/SYLVAIN THOMAS">Des pancartes lors de la manifestation des intermittents à Montpellier, le 16 juin 2014. | AFP/SYLVAIN THOMAS</figcaption></figure>

     

    Les festivals d'été, dont Aix et Avignon, vont commencer dans un grand climatd'incertitude alors que le gouvernement a engagé la concertation. En effet, le combat n'est pas terminé : jeudi 26 juin, une journée de mobilisation a été décrétée, alors que le ministère du travail a agréé le même jour la convention chômage du 22 mars, nœud de la contestation.

    Qui paie en cas de grève ou d’annulation de festival ?

    Faire grève ou annuler un festival est loin d'avoir le même impact d’un point de vue financier. Les artistes et techniciens qui font grève ne sont pas payés : c’est le cas du festival du Printemps des comédiens, à Montpellier, où la grève a été reconduite jour après jour depuis son ouverture (seul un spectacle interprété par des personnes handicapées sera joué), par souci de ne pas créer de traumatismes chez les comédiens. Et c’est bien pour « frapper » les grévistes au porte-monnaie que le conseil général de l’Hérault, principal financeur du Printemps des comédiens, a décidé de ne pas annuler le festival.

    Car annuler entraîne, a contrario, des frais d’ordre divers pour les financeurs publics ou partenaires privés du festival. C’est ce qui se produit actuellement au festival Uzès Danse, annulé samedi 14 juin, au lendemain de son ouverture, dans le but de prévenir des tensions. L’annulation s’apparente en effet à une rupture du contrat unilatérale de la part de la direction du festival, laquelle nécessite indemnisation. Le personnel intermittent doit être payé pour la période initialement convenue par contrat ; le paiement des spectacles doit être honoré, même si des arrangements peuvent être trouvés avec les compagnies. En revanche, la direction du festival peut escompter quelques économies – frais de transport, hôtellerie ou restauration pour les équipes artistiques et techniques invitées.

    1,9 MILLIONSPrenons le cas du festival d’Avignon, annulé comme tant d’autres en 2003, lors de la précédente crise des intermittents. Selon nos informations, les pertes liées à l’annulation se sont établies à 2,8 millions d’euros, tandis que 900 000 euros d’économies ont été effectuées. Soit un trou de 1,9 millions d’euros, réglé à l’époque par les tutelles du festival (Etat et collectivités locales). Pour éviter la cessation de paiement, la banque du festival lui avait au préalable autorisé un « découvert » de 2,5 millions d’euros.

    Lire notre rappel sur le précédent de 2003

     

    <figure>Dimanche 22 juin, jour de l'ouverture du festival Montpellier Danse, plus de trois cents intermittents ont envahi la scène du Théâtre de l'Agora et provoqué l'annulation de la représentation d'"Empty Moves", d'Angelin Preljocaj.</figure>

     

    Pourquoi les grosses manifestations sont-elles globalement épargnées ?

    S’attaquer aux puissants, symboles du capitalisme, ou à ceux qui abusent du recours à l’intermittence, et préserver au contraire les structures dites « fragiles », pourrait être la ligne idéale d’action des militants. Mais c’est loin d’être le cas, pour diverses raisons.

    Une raison politique, tout d’abord : c’est souvent dans les festivals les plus en pointe sur le plan artistique que l’on trouve les programmateurs les plus engagés, et les équipes les plus promptes à débrayer. Ainsi, il n'est guère étonnant que le Printemps des comédiens, avec sa programmation de « combat » de l'édition 2014, se soit autant engagé dans la lutte.

    Preljocaj plutôt que Sébastien

    Mais il y a, aussi, des raisons d’ordre pragmatique : il existe des citadelles imprenables. Ainsi, toujours à Montpellier, les militants se sont vite aperçus qu’il n’était pas possible, techniquement – ou à moins de prendredes risques – de parasiter l’émission en direct de Patrick Sébastien, à l’occasion de la Fête de la musique, samedi 21 juin.

    Finalement, c’est la création du chorégraphe Angelin Preljocaj, Empty Moves, part I, II & III, qui a été empêchée, à la suite de l’envahissement du plateau par 250 intermittents. « En plus, les intermittents étaient sûrs qu’on n’allait pas appeler lapolice. Dans le fond, on est en soutien avec le mouvement, même si on pense qu’il faut trouver d’autres formes d’action que l’annulation de spectacles », explique un membre du ballet Preljocaj.

    Voir notre reportage vidéo tourné lors de cette occupationIntermittents : dans les coulisses d'un blocage de spectacle

     

     

    Certes, les intermittents arrivent à réaliser des « prouesses » techniques en termes d’occupation (le chantier de la Philharmonie en est la preuve), ou de parasitage (lorsqu’ils parviennent à perturber le journal télévisé de France 2).

    Et le précédent de 2003 montre que les grands festivals peuvent être largement concernés. Mais le paysage de 2014 n’est plus le même : les collectivités locales sont à bout de souffle, financièrement, et un vent de contestation peut emportercertaines manifestations artistiques. Le fait que le festival Uzès Danse ait été amené à lâcher prise aussi vite, et à déclarer l’annulation dès le 14 juin, au lendemain de son ouverture, n’est pas anodin : le Centre de développement chorégraphique est fragile sur le plan économique, et l’on sait que les tournées, qui génèrent de l’emploi et des heures de travail, sont particulièrement difficiles dans le secteur de la danse.

    Lire notre décryptage Si vous n'avez rien suivi à la crise des intermittents

    Lire aussi (en éditions abonnés) notre reportage La grève au jour le jour des intermittents inquiète les festivals

     

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