• la justice et services de téléchargement

    De Napster à Megaupload, le long affrontement entre la justice et les services de téléchargement

    LEMONDE.FR | 23.01.12 | 20h14   •  Mis à jour le 24.01.12 | 08h54

    Depuis 1999 et l'apparition de Napster, le téléchargement illégal a connu de nombreuses mutations. Au fil des procès, de très nombreux services ont fermé puis laissé la place à de nouveaux outils.

    Des pionniers du P2P transformés en services d'offre légale

     

    Napster, Kazaa, Morpheus, Grokster.

    Napster, Kazaa, Morpheus, Grokster.Le Monde.fr

    • Des logiciels centralisés
    • Avec un moteur de recherche intégré
    • Tous condamnés en justice

    A son zénith, Napster, pionnier des logiciels de P2P, a compté entre 40 et 50 millions d'usagers. Mais le logiciel de partage, fondé en mai 1999 par Shawn Fanning et Shawn Parker, se heurte, quelques mois plus tard, en septembre 2001, aux ayants droit. La Recording Industry Association of America (RIAA, équivalent américain de la Sacem) demande 20 milliards de dollars (14,4 milliards d'euros) de dommages et intérêts... Après un accord à l'amiable, elle n'en obtiendra finalement que le centième. Mais Napster n'a pas tout perdu. En 2008, le service est racheté, au prix fort (121 millions de dollars, soit 87 millions d'euros), par le groupe de distribution Bestbuy. Fin 2011, Napster est fusionné avec le service de streaming légal Rhapsody.

    Kazaa a, pour sa part, dû verser 115 millions de dollars aux ayants droit musicaux. Comme Napster, l'ancienne gloire du téléchargement en P2P s'est muée en service de musique légal, uniquement disponible aux Etats-Unis.

    Emule et les logiciels décentralisés

     

    Emule, LimeWire, eDonkey.

    Emule, LimeWire, eDonkey.Le Monde.fr

    • Les moteurs de recherche sont complétés par des annuaires qui font leur apparition
    • Ces logiciels n'appartiennent pas à une entreprise, et sont donc moins vulnérables juridiquement
    • Les procédures judiciaires visent à la fois les annuaires et les développeurs des logiciels, mais ceux-ci survivent

    Après la fermeture de Napster, Emule prend son essor. Développé de manière communautaire, sans serveurs centralisés, le service est moins vulnérable juridiquement que ses prédécesseurs. Mais la fermeture de plusieurs serveurs, en 2006 et 2007, et l'arrivée de nouvelles technologies de partage de fichiers, comme BitTorrent, réduisent l'influence du service.

    A la fin de 2007, le client Limewire était présent sur un tiers des PC dans le monde. Attaquée en justice par la RIAA, l'entreprise du même nom a dû cesser ses activités, au terme d'une longue procédure.

    BitTorrent et l'ère des annuaires

     

    BitTorrent, µTorrent, Azureus, The Pirate Bay.

    BitTorrent, µTorrent, Azureus, The Pirate Bay.Le Monde.fr

    • Les annuaires n'hébergent aucun fichier
    • BitTorrent n'est pas en soi illégal – en revanche, il est aisé de savoir qui télécharge quoi sur le réseau
    • Début, aux Etats-Unis principalement, des procédures de masse contre des internautes

    A partir de 2002, BitTorrent, un protocole d'échange de fichiers développé par l'informaticien Bram Cohen, connaît un succès fulgurant. Grâce à une meilleure gestion des connexions et du partage des fichiers, il permet d'échanger des fichiers à grande vitesse. Plusieurs programmes, dits "clients", permettent d'utiliser ce protocole : Azureus, BitTornado... Les ayants droit changent de tactique : plutôt que de s'attaquer à BitTorrent lui-même, qui a également de nombreuses applications légales, ce sont les annuaires de liens, dont le plus emblématique est The Pirate Bay, et, surtout, les utilisateurs qui sont visés : le principe de fonctionnement même de BitTorrent fait qu'il est aisé de collecter les adresses de machines téléchargeant un fichier. Aux Etats-Unis, la RIAA lance une vaste campagne de plaintes contre des milliers d'internautes, mais la tactique fera long feu : les ayants droit se retrouvent rapidement dans une position intenable où ils réclament des centaines de millions de dollars à des étudiants ou à des mères célibataires.

    The Pirate Bay a échappé de peu à une saisie de nom de domaine, par les autorités américaines, durant l'été 2010. Mais s'il est toujours en ligne, la justice suédoise a confirmé, fin 2010, en appel, les peines de prison ferme infligées aux fondateurs du site. Fin 2011, les ayants droit belges ont également demandé aux fournisseurs d'accès du pays de bloquer The Pirate Bay. Cela n'a pas empêché deux fondateurs de lancer, en août, un site de téléchargement direct, baptisé "Bayfiles".

    Le streaming

     

    GrooveShark, Deezer, RadioBlogClub.

    GrooveShark, Deezer, RadioBlogClub.Le MOnde.fr

    • Les fichiers sont diffusés "à la demande"
    • Certains services signent des accords avec les maisons de disque

    A partir de 2003, avec Radioblogclub, une nouvelle manière d'écouter de la musique en ligne apparaît : la diffusion à la demande. Radioblogclub n'héberge pas directement les fichiers, mais la Sacem parviendra à obtenir sa fermeture et la condamnation de ses créateurs. Ses successeurs, dont Deezer, démarrent sans avoir conclu des accords avec les ayants droit, mais signent au fur et à mesure une "régularisation" par le biais d'accords de partage de revenus. Plus complexe, le cas de Grooveshark, visé par une plainte aux Etats-Unis : les créateurs du site sont accusés d'avoir chargé eux-mêmes des milliers de morceaux protégés par le droit d'auteur, en connaissance de cause.

    Le téléchargement direct

     

    Megaupload, RapidShare, FileServe.

    Megaupload, RapidShare, FileServe.Le Monde.fr

    • Ce sont les sites qui hébergent les fichiers
    • Ils retirent sur demande des ayants droit les fichiers contrefaits
    • Ils proposent des services d'abonnement payants et certains récompensent les uploadeurs

    Popularisés par le développement du haut débit, de nombreux sites dits de "téléchargement direct" se lancent dans le sillage de RapidShare, à partir de 2006. Ces sites hébergent les fichiers, téléchargeables d'un simple clic. Sont-ils illégaux ? La plupart suppriment, sur demande des ayants droit, les fichiers qui leur sont signalés. RapidShare perdra plusieurs procès mais parviendra à rester en ligne.

    Depuis 2010, les autorités américaines ont recours à une procédure plus radicale, depuis le lancement de l'opération "In Our Sites" : la saisie directe du nom de domaine du site. Quand un internaute se connecte à un de ces sites, comme Ninjavideo, il tombe sur le message suivant : "Ce site a été saisi par les douanes (...) sur mandat d'un tribunal fédéral." On l'informe également que la violation du droit d'auteur est passible de cinq ans de prison et 250 000 dollars d'amende, le trafic de biens de contrefaçon de dix ans de prison et deux millions de dollars d'amende. C'est précisément la procédure qui a été employée contre Megaupload, dont plusieurs serveurs ont également été saisis.

    Plus de 350 sites ont déjà été "saisis", dans le cadre de cette opération, qui va plus loin que l'offre de films piratés. "In Our Sites" vise aussi l'offre illégale de musique, de logiciels, de jeux et même de biens physiques comme des vêtements, des produits électroniques et des médicaments. Mais la saisie de noms de domaine a ses ratés. En février 2011, la sécurité intérieure américaine a fermé "par erreur" 84 000 sites Web, dans une opération censée lutter contre la pédopornographie en ligne.

    >> Lire : "Peer-to-peer, la fin d'un protocole ?"

    Laurent Checola et Damien Leloup
     

    Les faits Lois antipiratage : sous pression, Washington fait machine arrière


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :