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La suspension des allocations familiales efficace contre l'absentéisme scolaire ?
Société
La suspension des allocations familiales efficace contre l'absentéisme scolaire ?
<time datetime="2012-10-25T16:52:30+02:00" itemprop="datePublished">25 octobre 2012 à 16:52 </time>lien
Des élèves font leur rentrée scolaire le 2 septembre 2010 au collège Jean de Verrazan de Lyon. (Photo Jean-Philippe Ksiazek. AFP)décryptage Non, ont jugé les sénateurs socialistes en votant l'abrogation du dispositif mis en place par Eric Ciotti en 2011. Bilan d'une mesure controversée.
La loi Ciotti sur l’absentéisme scolaire vit ses dernières heures. Le Sénat a adopté jeudi matin une proposition de loi socialiste supprimant le dispositif mis en place en janvier 2011. Celui-ci prévoyait la suspension des allocations familiales en cas d’absences répétées et injustifiées. Après les sénateurs, les députés devraient se prononcer prochainement sur la loi Ciotti, et, en toute logique, l’abroger. Retour sur une mesure controversée du quinquennat Sarkozy, que la gauche a éreinté pour son «inefficacité».
Les origines
Définitivement adoptée en septembre 2010, la loi initiée par le député UMP Eric Ciotti est en fait une resucée de plusieurs dispositifs antérieurs. Elle entre en vigueur début 2011 et vise à renforcer la lutte contre l’absentéisme scolaire. Un phénomène qui touchait, en 2010-2011, 5% des élèves du second degré, avec une pointe à 14,8% en lycée professionnel.
Son principe : un régime gradué de suspension des allocations familiales versées aux parents des élèves absentéistes. En cas de quatre demi-journées d’absence non justifiées par mois, l’inspecteur d'académie adresse un «avertissement» aux parents. Si les problèmes persistent, la Caisse d’allocations familiales (CAF) est saisie, et doit suspendre le versement des allocations.
A partir de là, deux solutions : soit l'élève retourne en cours, la suspension est alors levée et les versements rétablis rétroactivement. Soit l'élève demeure absent, et les allocations sont alors supprimées. A l'époque, la gauche, les principaux syndicats d’enseignants et la première fédération de parents d’élèves (FCPE) s'élèvent contre la loi Ciotti, qu’ils jugent inadaptée et injuste socialement.
L’abrogation du dispositif
«Ce n’est pas un bon mécanisme», avait jugé le candidat Hollande lors de la campagne présidentielle, promettant de le supprimer. Quatre mois après l'élection, la ministre chargé de la Réussite éducative, George Pau-Langevin, passe à la vitesse supérieure. Le 12 octobre, elle fustige un dispositif «simpliste qui a été appliqué un nombre de fois tout à fait ridicule». Le cœur de l’argumentaire de la gauche repose là : les cas de suspension des allocations familiales ont été tellement rares depuis janvier 2011 que c’est bien la preuve que la loi est inutile. Autre élément à charge, selon George Pau-Langevin : «A 77% le dispositif est inefficace car l’enfant ne retourne pas à l'école.»
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La guerre des chiffres
Peut-on évaluer l’efficacité de la loi Ciotti ? La tâche est compliquée, affirme le sénateur socialiste David Assouline, rapporteur de la proposition de loi. «Les dispositifs d'évaluation qu’elle prévoyait sont restés lettre morte, écrit-il. Seuls des éléments purement quantitatifs d’application des dispositifs sont disponibles.» On sait ainsi que depuis depuis janvier 2011, la loi Ciotti a généré 949 suspensions d’allocations.
Contacté par Libération, le ministère de l’Education nationale précise : «Sur l’année scolaire 2011-2012, 79 149 signalements ont été reçus par les directeurs académiques. 75% de ces signalements ont donné lieu à un premier avertissement adressé aux familles.» Pour 1 418 d’entre elles, une demande de suspension des allocations à la CAF a été effectuée, débouchant sur 619 suspensions effectives. Par la suite, 142 familles ont bénéficié d’un rétablissement de leur allocations familiales. Conclusion du ministère : «Le retour à l’assiduité des élèves n’est effectif que pour 22% des cas des élèves aux allocations supprimées. Si on regarde le rapport entre le nombre de premiers signalements et celui des suspensions des allocations effectivement prononcées par la CAF, on est sur un chiffre minime : 0,78% ce qui indique que la suppression des allocations pour cause d’absentéisme n’est pas efficace.»
En décembre 2011, le ministre de l’Education, Luc Chatel, avait fait dire aux chiffres une tout autre chose. «Il y avait 32 000 familles qui avaient été alertées parce que leur enfant était absentéiste. [A l’issue de la phase d’avertissement], 160 familles seulement ont fait l’objet d’une suspension. Cela veut dire qu’on a résolu 99,5 % des cas uniquement en convoquant les parents. Cela veut dire que la menace d’une suspension des allocations familiales, qui a été très décriée, ça marche.»
Dans le détail : un impact sur l’absentéisme difficilement mesurable
Dans son rapport, David Assouline remarque que «rien dans les statistiques disponibles ne suggère que le dispositif ait été efficace». En clair, les chiffres d’absentéisme scolaire ne montrent pas un avant et un après loi Ciotti. «Il faut souligner que les enquêtes demeurent fragiles en raison de difficultés dans la remontée des données», temporise le sénateur socialiste. C’est pour «affiner son diagnostic» qu’il a contacté le recteur de Créteil pour dresser un bilan local de la loi de septembre 2011.
Première observation : il existe «une grande disparité d’application du dispositif dans les trois départements de Seine-Saint-Denis (93), du Val-de-Marne (94) et de Seine-et-Marne (77)». Ainsi, le 93 est marqué par un «sous-signalement» massif. «C’est notamment l’effet de la réticence des professionnels qui ne veulent pas voir pénaliser des familles modestes dans un département où se concentrent de lourdes difficultés sociales.» La loi Ciotti a donc conduit à un effet pervers : une baisse des signalements d’absentéisme pour contester sa logique répressive.
Dénonçant la logique de la «double peine» de la loi Ciotti, qui contribue «à éloigner encore davantage de l'école des familles déjà méfiantes vis-à-vis de l’institution scolaire», David Assouline défend au contraire la proposition de loi de sa collègue socialiste Françoise Cartron. Selon lui, ce sont bien la «solennité de la procédure et du rappel à la loi» qui importent, et non la sanction elle-même. «Tout l’effet dissuasif est conservé par la proposition de loi, qui ne supprime que le volet punitif sans utilité.»
Le sénateur de Paris a également fait passer un amendement qui prévoit, «en cas de persistance du défaut d’assiduité», «de proposer aux personnes responsables de l’enfant une aide et un accompagnement adaptés et contractualisés». Un enseignant référent pourra être nommé pour suivre les mesures mises en œuvre avec l’enfant absentéiste, afin qu’il ne vienne pas, plus tard, grossir les rangs des 150 000 décrocheurs du système scolaire.
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Le Sénat supprime la loi Ciotti sur l'absentéisme
<time datetime="2012-10-25T08:49:51+02:00" itemprop="datePublished">25 octobre 2012 à 08:49</time> (Mis à jour: <time datetime="2012-10-25T13:13:18+02:00" itemprop="dateModified">13:13</time>) lien
La ministre déléguée à la Réussite éducative, George Pau-Langevin, le 14 septembre à Paris. (Photo Joel Saget. AFP)La proposition de loi doit encore passer devant l'Assemblée nationale avant que ce dispositif, destiné à lutter contre l’absentéisme scolaire, ne soit abrogé.
Le Sénat a adopté jeudi une proposition de loi socialiste qui supprime la loi très contestée d’Eric Ciotti (UMP) de septembre 2010 destinée à lutter contre l’absentéisme scolaire notamment en suspendant les allocations familiales. L’ensemble de la gauche a voté pour, les sénateurs UMP et centristes, à l’exception de l’un d’entre eux, ont voté contre. La proposition de loi doit encore recevoir l’aval de l’Assemblée nationale. Mis en place en janvier 2011, le dispositif prévoit en cas d’absentéisme trop fréquent et non justifié, après une convocation des parents et un avertissement, que l’inspection d’académie puisse exiger de la Caisse d’allocations familiales (CAF) la suspension partielle des allocations.
Pour Françoise Cartron, l’auteur de la proposition de loi, «le dispositif est clairement inadapté, injuste et inefficace». «Seule une réelle ambition pour l'école aurait pu apporter une réponse efficace, juste, aux problématiques multiples et complexes qui sont à l’origine du décrochage scolaire», a-t-elle jugé.
Selon la ministre chargée de la réussite éducative, George Pau-Langevin, alors qu’il y a 12 millions d'élèves en France, 619 suppressions d’allocations ont été effectuées pour l’année scolaire 2011-2012, dont 142 seulement ont été rétablies. «A 77% le dispositif est inefficace car l’enfant ne retourne pas à l'école», a-t-elle souligné.
«La suspension des allocations familiales n’est qu’un moyen de dissuasion», a répondu Sophie Primas (UMP). «Il est effectif dans un nombre restreint de cas, fort heureusement, puisque son objectif est d’abord l’instauration de la responsabilisation active des parents», a-t-elle ajouté. De son côté, le rapporteur du texte, David Assouline (PS), a proposé un amendement au code de l'éducation, qui a été voté, prévoyant qu’en cas de persistance du défaut d’assiduité, le directeur de l'établissement scolaire propose aux personnes responsables de l’enfant une aide et un accompagnement adaptés et contractualisés, avec la désignation d’un enseignant pour suivre les mesures mises en œuvre.
(AFP)
Tags : Allocations familales- absenteïsme scolaire- efficacité
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