• La tête en friche de Jean BECKER


    "La Tête en friche" de Jean Becker est une ode à la lecture et à l'amitié amoureuse entre un analphabète et une vieille femme interprétés par deux comédiens magistraux.

    Première phrase de Sur la lecture, de Marcel Proust, préface qu'il écrivit en 1905 à l'occasion de sa traduction de Sésame et les lys de John Ruskin:« Il n'y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. » Germain, la cinquantaine débonnaire, n'a pas connu ce doux bonheur. Il est quasi analphabète. Il a la tête en friche. Comprenez que son esprit n'a pas été irrigué par le plaisir de la lecture, que sa belle âme n'a pas été cultivé sur les bancs de l'école.

    Germain vit de petits boulots. Il fait les marchés, coupe son bois, le travaille, s'occupe de son potager, de son chat, de sa petite amie, Annette (Sophie Guillemin). Il vit avec sa mère dingue, hystérique (Claire Maurier) qui le méprise. Ou plutôt fait semblant de le mépriser. Comme ses «copains» de bistrot Landremont (Patrick Bouchitey), Jojo (Jean-François Stévenin)… qui n'ont de cesse de le chambrer. Son bon fond est son principal défaut et sa principale qualité. Aucune malice chez cet homme démuni.

    Gérard Depardieu s'est glissé dans la salopette bleu de chauffe de Germain avec l'aisance du connaisseur. Il « est » tout entier Germain. «Il aurait pu être moi», a déclaré l'acteur. Lorsqu'il rencontre Margueritte avec deux «t» une vieille dame passionnée de lecture (magnifique Gisèle Casadesus), dans un jardin public où il aime compter les pigeons auxquels il appose des prénoms, sa vie en sera toute bouleversée.

    Les mots sont le monde de Margueritte. Ils passent par sa voix douce. Germain a l'intelligence et la mémoire auditives. Aime entendre cette grand-mère lui lire, maternelle, La Peste, d'Albert Camus, dont il devine les rats, La Promesse de l'aube, de Romain Gary… Il n'est pas peu fier de citer ces auteurs devant ces camarades incrédules lorsqu'il tape le carton et boit ses canons.

    Jour funeste

    Elle lui offre un Petit Robert dont il peine à se servir mais goûte la joie des définitions. Margueritte perd petit à petit la vue. Germain l'analphabète deviendra sa canne blanche, lui fera à son tour la lecture jusqu'à ce jour funeste où elle quittera sa maison de retraite pour des raisons financières. On ne racontera pas la suite.

    Ce film dégage un charme étonnant, d'une beauté toute simple, toute pagnolesque, dans la grande tradition. Les dialogues de Jean-Loup Dabadie le film est l'adaptation du roman de Marine-Sabine Roger sont d'une poésie naturelle. Entre Gérard Depardieu et Gisèle Casadesus, une magie immédiate. Ils étaient faits pour se rencontrer. Le colosse aux pieds d'argile et la brindille à forte tête. Tous deux croient à la beauté des choses. La Tête en friche , un film simple d'une grande bonté, si frais, si bienveillant et si bouleversant…


    MALOU1360:

    Un moment de poésie rare dans un monde qui a perdu ses repères et ses fragilités! Des comédiens épatants qui ne jouent pas mais vivent leurs rôles. On sent en eux une jubilation profonde et une complicité absolue. La simplicité et le goût du BEAU, que nous avons perdus, éclatent ici en pleine lumière : un pur moment de bonheur pour les spectateurs partagé par les acteurs.

    Une grande réussite humaine culturelle et cinématographique : avec la lecture et  certains extraits de CAMUS, écrivain lui aussi de l'Absolu et de la Beauté et des grandes erreurs humaines .

    Merci pour ce moment de grâce M. Jean BECKER!


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