• Le Conseil constitutionnel valide une déchéance de nationalité contestée

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    Le Conseil constitutionnel valide une déchéance

    de nationalité contestée

    Le Monde.fr avec AFP | <time datetime="2015-01-23T08:17:23+01:00" itemprop="datePublished">23.01.2015 à 08h17</time> • Mis à jour le <time datetime="2015-01-23T11:20:42+01:00" itemprop="dateModified">23.01.2015 à 11h20  lien </time>

    L'essentiel

    • Le Conseil constitutionnel a rejeté la demande de l'avocat d'Ahmed Sahnouni qui contestait la déchéance
    • de nationalité de son client.
    • Depuis les attentats en région parisienne, le gouvernement réfléchit à inclure la mesure dans l'éventail
    • des outils de lutte contre le terrorisme.

    La façade du Conseil constitutionnel.

    L'avis était très attendu. Le Conseil constitutionnel a validé, vendredi 23 janvier, la déchéance de la nationalité française du Franco-Marocain Ahmed Sahnouni. Le Conseil avait été saisi le 31 octobre 2014 par le Conseil d’Etat, qui lui avait transmis une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

    Ahmed Sahnouni, né à Casablanca en 1970 et naturalisé français en février 2003, s'est vu retirer la nationalité française le 28 mai par un décret signé par Manuel Valls et le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve. Il avait été condamné en mars 2013 à sept ans de prison pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». Il est libérable à la fin de 2015.

    Un Français ne peut être déchu de sa nationalité – les traités internationaux interdisant la création d’apatrides –, mais l’article 25 du code civil permet de déchoir de sa nationalité un binational condamné pour atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation ou terrorisme. La déchéance ne peut être prononcée que dans un délai de dix ans à compter des faits, et dix ans après l’acquisition de la nationalité française – quinze ans pour terrorisme. La déchéance de nationalité a été utilisée huit fois depuis 1973.

    La décision du Conseil, dans un climat qui n’incite guère à renforcer les droits de la défense pour les personnes condamnées pour terrorisme, n’est pas une surprise. La haute juridiction avait déjà statué sur un point semblable en 1996, et considéré que la différence de traitement des personnes nées françaises ou ayant acquis la nationalité ne violait pas le principe d’égalité. Il avait seulement réservé le délai de quinze ans aux seuls faits qualifiés de terrorisme.

    Lire aussi : Les contradictions de Manuel Valls sur la déchéance de nationalité

    UN OUTIL DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME

    Le premier ministre, Manuel Valls, n'exclut pas de faire de cette mesure un outil de la lutte contre le terrorisme. « Une question légitime se pose sur les conséquences auxquelles on s'expose quand on décide de s'en prendre à la nation à laquelle on appartient, soit parce qu'on y est né, soit parce qu'elle vous a accueilli », a-t-il expliqué.

    Pour les djihadistes étrangers, M. Valls a précisé que vingt-huit expulsions administratives avaient eu lieu ces trois dernières années. Pour les djihadistes français, il a annoncé « une réflexion transpartisane sur la réactivation de la peine d'“indignité nationale” ». Et, pour les binationaux, il a rappelé que le Conseil constitutionnel se prononcerait vendredi sur la « décision individuelle prise en 2014 » par le gouvernement.

    Lire aussi notre décryptage : Non, on ne peut pas déchoir de sa nationalité « toute personne qui part faire le djihad »

    « DES FRANÇAIS PLUS FRANÇAIS QUE D'AUTRES ? »

    Devant le Conseil, présidé par l'ancien premier ministre Lionel Jospin, son avocat Nurettin Meseci a plaidé le 13 janvier la rupture d'égalité entre Français de naissance et Français naturalisés introduite, selon lui, par ce texte. « Existe-t-il des Français plus français que d'autres ? », a lancé l'avocat. « Si le législateur imagine que la lutte contre le terrorisme passe par la déchéance de la nationalité, il se trompe, c'est un mauvais chiffon agité devant l'opinion publique », a-t-il aussi estimé.

    L'avocat a également dénoncé la disproportionnalité d'un texte qui a fait passer en 2006 de dix à quinze ans la période pendant lesquelles peut être prononcée une déchéance de nationalité, après son acquisition et après la commission des faits terroristes pour lesquels l'individu est condamné. Il a enfin critiqué « un détournement de procédure » visant, selon lui, « à expulser son client vers le Maroc, où il risque d'être condamné à vingt ans de prison » pour les mêmes faits.

    Intervenant ensuite pour l'association « SOS-Sans-papiers », Me Henri Braun a estimé que la déchéance de la nationalité méconnaissait le respect au droit à la vie privée car il s'accompagnait souvent d'une expulsion qui séparait les familles. Il a également considéré que le texte constituait « une atteinte injustifiée aux situations légalement acquises ».

    Lire : Déchéance de nationalité : une impossibilité juridique ?

    LE GOUVERNEMENT POUR LE REJET DE CETTE QPC

    Le représentant du gouvernement, Xavier Pottier, a estimé que les deux premiers griefs évoqués étaient « infondés », et les deux autres, « inopérants ». Il a réclamé en conséquence le rejet de la QPC.

    Le Conseil constitutionnel a déjà jugé le grief de l'inégalité et considéré en 1996 qu'« eu égard à la gravité particulière que revêtent par nature les actes terroristes, cette sanction a pu être prévue sans méconnaître les exigences des droits de l'homme », a-t-il rappelé.

    Quant à l'allongement de dix à quinze ans, il l'a justifié par « la stratégie mise en œuvre par certains réseaux terroristes consistant à implanter des “cellules dormantes” dont certains des membres s'efforcent d'acquérir la nationalité du pays d'accueil et ne passent à l'action que longtemps après ».

    Lire aussi : Indignité nationale : « La France aurait beaucoup à perdre »

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