"Bercy pour ce moment", "gauche caviar et charisme de l'esturgeon" : tels étaient les sujets oratoires auxquels s'est prêté l'ex-ministre de l'Economie Arnaud Montebourg lors d'un concours d'éloquence des avocats du barreau de Paris jeudi 11 décembre au soir.
Accueilli dans la salle de la Mutualité, comble, avec musique, applaudissements et les mots de "Arnaud président", l'ex-ministre sorti du gouvernement fin août, a profité de cette joute oratoire pour distiller, sous couvert de métaphores, ses critiques ou remarques sur le gouvernement.
L'ancien ministre, qui fut huit ans avocat, s'en est d'abord pris à l'Ena, dont sont issus notamment son successeur à Bercy Emmanuel Macron et François Hollande, d'"école de savants, de sachants, de sectaires", ou encore d'"école de l'arrogance", par opposition au barreau, "école de l'humilité".
Mettre fin aux "monopoles archaïques"
Puis, répondant au premier sujet - "Faut-il dire Bercy pour ce moment ?", en référence au livre de Valérie Trierweiler, il a assuré vouloir faire "l'éloge de la loi Macron", mais en louant surtout ses intentions.
Devant les 12 avocats secrétaires de la conférence du stage vêtus de marinière, allusion au "made in France" qu'il avait défendu, Arnaud Montebourg a décrit le quotidien des Français devant subir de nombreux "monopoles archaïques de l'histoire" ou "oligopoles" des professions réglementées, allant des frais bancaires aux frais d'autoroutes, en passant par les prothèses dentaires ou les prescriptions de lunettes par les ophtalmologues.
Il a également affirmé que "la loi Macron a[vait] raison de remettre en question la postulation" chez les avocats. Cette loi était initialement la sienne, avant son éviction du gouvernement pour ses propos critiques envers la politique économique menée par l'exécutif. Lors de sa préparation, il avait vivement critiqué les privilèges des professions réglementées.
"Ne pas avoir peur de cliver"
Levant le nez de ses notes, l'ancien ministre rit et applaudit lorsqu'un secrétaire de la conférence lance : "Avec Hollande, on ne s'attend à rien mais on est déçu quand même".
Commentant le deuxième sujet - "Peut-on régner sur la gauche caviar avec le charisme d'un esturgeon ?"-, le ministre lance "c'est un magnifique concept, la gauche caviar, ce n'est pas rien, parce qu'elle existe !"
Les héritiers, la noblesse d'Etat, nés pour gouverner, [...] ils sont de gauche, ils sont de droite, ils sont interchangeables !", poursuit-il.
Puis, concluant sur le sujet du charisme, il ose :
Les esturgeons ne portent pas de chapka."
Allusion à François Hollande, dont la photo où on le voit en chapka et pelisse en fourrure offerts par le président du Kazakhstan, a provoqué tweets moqueurs et agressifs samedi.
Et après les conseils en rhétorique, de suggérer aux candidats passant ce concours (Ena), un conseil politique : "il ne faut pas avoir peur de cliver il y a du 'pour', il y a du 'contre' dans toutes les salles, et là vous pouvez commencer à vous adresser aux Français".
"Vous êtes joyeusement dissonant", "vous échappez à la tribu, au déterminisme du clan", l'a félicité l'avocat au barreau de Genève Marc Bonnant.
La compagne de Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti, l'ex-ministre de la Culture, était au premier rang du public.