Un an, heure pour heure, après l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo, jeudi 7 janvier à 11 h 30, un homme a été abattu par des policiers en faction devant un commissariat du 18e arrondissement de Paris, au 34 de la rue de la Goutte-d’Or, tandis qu’il les menaçait avec une « feuille de boucher », a précisé le procureur de la République, François Molins. Six douilles ont été retrouvées au sol. L’autopsie permettra de déterminer combien de tirs ont atteint l’agresseur.
Le quartier de Barbès a été rapidement bouclé, alors que de nombreuses interrogations perduraient sur le mode opératoire, l’identité et les motivations de l’assaillant. Un dispositif explosif factice – une pochette entourée de ruban adhésif dont dépassait un fil électrique – a été retrouvé dans le blouson de l’homme abattu par les forces de l’ordre, jetant le trouble sur la dimension terroriste de l’agression. La section antiterroriste du parquet de Paris a attendu près de quatre heures avant de se saisir de l’enquête en flagrance, requalifiée en « tentative d’assassinat sur personnes dépositaires de l’autorité publique en relation avec une entreprise terroriste ».
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Dans un communiqué, le procureur de la République de Paris, François Molins, a détaillé les raisons qui l’ont amené à saisir la section antiterroriste : la découverte sur le corps de l’assaillant d’« un papier sur lequel figurent le drapeau de Daech [acronyme arabe de l’organisation djihadiste Etat islamique], une revendication manuscrite non équivoque en langue arabe », et le fait que l’homme ait « exhibé son arme et crié “Allah akbar !” » avant d’être abattu.
« Je suis Abou… »
Selon les informations du Monde, le texte de revendication commence par une phrase en français déclinant une kounya (surnom musulman) : « Je suis Abou… » A la ligne suivante, il est fait mention d’une identité commençant par « Tarek B. » et, à la troisième ligne, de la ville de « Tunis ». La suite, rédigée en arabe, contient une allégeance à Abou Bakr Al-Baghdadi, chef de l’organisation Etat islamique, et affirme que cette attaque est une réponse aux bombardements en Syrie.
Entrées dans le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED), les traces papillaires de l’assaillant correspondent à une autre identité : celle d’un homme, interpellé en 2013 pour une affaire de vol en réunion à Sainte-Maxime (Var), et qui faisait depuis cette date l’objet d’une obligation de quitter le territoire français. L’individu s’était alors présenté devant les gendarmes comme « Sallah Ali », sans-domicile-fixe, né en 1995 à Casablanca, au Maroc. Son identité n’avait jamais pu être confirmée ; l’homme ne possédait pas de papier. Son état civil ainsi que son pays d’origine diffèrent des informations contenues dans le message de revendication.
« Fragilités psychologiques »
Des applications en arabe et des SMS envoyés d’Allemagne ont par ailleurs été retrouvés dans le téléphone de l’assaillant du commissariat, qui contient une carte SIM allemande, attestant du passage de son propriétaire outre-Rhin. La carte était toujours en cours d’analyse jeudi soir.
Alors que l’enquête est ouverte du chef de « terrorisme » et que l’identité de l’individu est encore incertaine, la ministre de la justice, Christiane Taubira, a affirmé en fin de journée sur le plateau d’i-Télé qu’« aucun lien » n’apparaissait dans le profil de cet homme avec « la radicalisation violente », évoquant même des « signes de déséquilibre » :
« Nous savons que c’est une ambiance extrêmement lourde et que des personnes qui ont des fragilités psychologiques, je n’ai pas dit que c’est le cas de cette personne, mais les personnes qui ont des fragilités psychologiques peuvent agir de cette façon (…). L’enquête fera la clarté de tout ça. »
La propagande de l’EI a ceci de particulièrement pernicieux qu’elle ne se contente pas de coordonner des attentats élaborés. Elle incite régulièrement, par la voix des nombreux djihadistes européens ayant rejoint ses rangs, n’importe quel « frère » à « tuer des mécréants », à l’aide d’un couteau s’il le faut. Un mot d’ordre susceptible de déclencher des passages à l’acte, y compris chez des personnes suicidaires souhaitant passer à la postérité.