• Pression, salaires, flicage: malaise dans les Apple stores

    Pression, salaires, flicage: malaise dans les Apple stores

     Par Raphaële Karayan - publié le 19/09/2012 à 18:24, mis à jour à 18:50  
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    Si les négociations entre salariés et Apple France n'aboutissaient pas, les Apple stores français pourraient connaître leur première grève, le jour de la sortie de l'iPhone 5. En fait, le mouvement est parti des Etats-Unis l'année dernière. L'occasion de se pencher sur les conditions de travail dans ces magasins.

    APPLE. Bientôt une grève dans les Apple stores parisiens?
    APPLE. Bientôt une grève dans les Apple stores parisiens?
    REUTERS/David Gray

    Que se passe-t-il chez Apple ? Une ébauche de mouvement social, menaçant le lancement de l'iPhone 5 en France, commence à mettre un peu de désordre dans ses boutiques épurées. Des négociations concernant les salaires et les conditions de travail devaient avoir lieu ce mercredi. En cas d'échec, certains évoquent un blocage des magasins vendredi, jour de la sortie du nouveau smartphone de la marque. Si l'initiative paraît surprenante, elle est en fait l'écho d'un mouvement plus global de contestation qui a démarré en 2011 aux Etats-Unis.

    Premier mouvement social, 10 ans après la création des magasins

    C'est en mai 2011 (année du 10e anniversaire du premier Apple store) qu'un employé, Cory Moll, recruté en 2007, se donne pour mission de rassembler les salariés des magasins au sein d'un mouvement - ce n'est pas un syndicat à proprement parler - qu'il baptise Apple Retail Workers Union. Son objectif : donner plus de poids aux revendications en termes de salaires et de conditions de travail. Dans des interviews à la presse américaine, il parle alors de problèmes d'encadrement et de pratiques managériales injustes. Son initiative réussit à prendre à San Francisco et à Munich, où Apple Allemagne finira par reconnaître officiellement en décembre 2011 la création d'un syndicat. Le mouvement prend également forme en Italie, où le 28 octobre 2011, jour du lancement de l'iPhone 4S, les salariés manifestèrent pour protester contre leurs conditions de travail. Début janvier 2012, Apple Retail Workers Union annonce qu'il contactera directement les organisations locales pour décider des actions à mener.

    A partir de ce moment là, en réaction ou non, les choses commencent à bouger. En novembre 2011, Cnet apprend qu'Apple a initié un programme de formation obligatoire pour apprendre à ses cadres ce qu'est un syndicat et comment les gérer. En juin 2012, Apple annonce à ses troupes aux Etats-Unis des hausses de salaires à la performance, pouvant aller jusqu'à 25%, contre quelques petits pourcents habituellement. Pour Cory Moll, l'augmentation atteindra près de 20%.

    C'est à cette époque que l'ambiance se gâte dans les Apple stores parisiens, qui n'ont pas vu, eux, la couleur de ces augmentations. Mac4Ever rapportait alors exactement les griefs exposés par le salarié qui témoignait ce mardi dans L'Entreprise. Amplitude horaire et flexibilité accrues, disparités salariales inexplicables... Les leaders du mouvement exprimaient alors leur volonté de concrétiser la protestation. Ils ont choisi la semaine du lancement de l'iPhone 5 pour se faire entendre (pour l'instant de manière très polie en portant des bracelets, à la manière de grévistes japonais).

    Salaires : des raisons de se plaindre ?

    Aux Etats-Unis, un vendeur dans un Apple Store gagne entre 8 et 18 dollars de l'heure. Un "Genius" (les employés qui travaillent au support technique, le Genius Bar) est mieux payé, entre 13 et 26 dollars. Son salaire annuel moyen, selon Business Insider, s'élève à près de 39 000 dollars. Le New York Times souligne que ces rémunérations sont supérieures à la moyenne du secteur de la distribution, et bien au-dessus du minimum légal (7,25 dollars de l'heure). Mieux vaut être vendeur chez Apple qu'à WalMart, Gap ou Target. En outre, Apple offre une couverture maladie et des réductions sur les produits maisons, qui vont jusqu'à 500 dollars sur un Mac et 250 dollars sur un iPad. Alors pourquoi les salariés d'Apple s'estiment-ils sous-payés ?

    Ils ont plusieurs raisons de se plaindre. Ils sont plus diplômés que la moyenne des salariés du secteur de la distribution, ils ne sont pas rémunérés à la commission, et surtout ils rapportent largement plus que le vendeur moyen tous secteurs confondus (les Apple stores sont les enseignes les plus rentables au mètre carré), mais cela ne se retrouve pas sur leur fiche de paie.

    Conditions de travail : pression et contrôle

    Que savons-nous, au-delà des salaires, des conditions de travail dans les Apple stores? Grâce à la presse américaine, assez pour savoir que travailler pour Tim Cook, c'est comme entrer en religion : une ascèse de tous les instants, visant un idéal bien plus noble que la performance commerciale. Oui monsieur. Chez Apple, on ne fait pas que réparer ou vendre. On "enrichit la vie des gens", dit le manuel de formation des "Mac Genius", dont Gizmodo a dévoilé les détails fin août.

    Ce manuel est une mine de règles très strictes - quasi militaires - de comportements, à faire, à ne pas faire. Des attitudes corporelles au vocabulaire à employer (ultra policé et politiquement correct), en passant par les relations entre employés, il dicte tous les faits et gestes des employés. Il est par exemple interdit d'utiliser le mot "malheureusement" pour annoncer une mauvaise nouvelle au client, il ne faut pas dire "problème" mais "question", ne pas parler mal des clients ou des autres employés même en aparté, et par-dessus tout il convient d'être em-pa-thique ! Une gymnastique intellectuelle qui touche à l'endoctrinement sectaire et ajoute à la pression que subissent les salariés.

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