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"Que la Tunisie devienne un Etat de droit"
"Que la Tunisie devienne un Etat de droit"
Najet Mizouni est la tête de liste pour "Tous ensemble pour la Tunisie". © DR
PORTRAIT - Najet Mizouni est candidate à la Constituante dont le scrutin s'est ouvert en France.
Elle est Tunisienne de naissance et "Française de cœur". Najet Mizouni, 59 ans, est candidate en France pour représenter les Tunisiens de l'étranger à l'élection de l'Assemblée constituante. Cette ancienne syndicaliste, professeur de droit public à l'Université Paris 8, est à la tête de la liste "Tous ensemble pour la Tunisie".
Quelque 600.000 Tunisiens sont invités à choisir à partir de ce jeudi et jusqu'à samedi parmi 48 listes en France. Dix députés représentants les Tunisiens de France siégeront aux côtés des 217 autres membres de l'Assemblée constituante.
"C'est la première fois que je vote pour mon pays", souligne Najet Mizouni. "Des millions de Tunisiens sont dans le même cas que moi et malheureusement, je crois qu'on ne mesure pas l'importance de cette échéance", déplore la candidate.
"Une constitution, ce n'est pas rien"
"Depuis février, les gens sont perdus. Ils voulaient qu'on les écoute, l'échéance politique n'était pas prioritaire. Aujourd'hui, ils ne savent pas pourquoi ils votent. Il n'y a pas eu de travail pédagogique pour expliquer l'importance de cette assemblée constituante. Une constitution, ce n'est pas rien", rappelle Najet Mazouni.
Secrétaire générale adjointe de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) en 1975, fondatrice de la commission de la femme ouvrière au sein de sa centrale syndicale, elle a subi la répression après la grève générale du 26 janvier 1978.
Pendant ces années noires, les dirigeants syndicalistes sont arrêtés, traqués par le pouvoir d'Habib Bourguiba qui tente alors de reprendre les rênes du syndicat en plaçant "une direction fantoche". Épuisée moralement et physiquement, après des années de féroce résistance, Najet Mizouni décide de quitter provisoirement la Tunisie en 1987.
Elle s'installe alors à Paris et reprend sa licence de droit qu'elle avait du interrompre dans son pays. "Je ne pensais pas rester ici mais la vie en a décidé autrement", confit-elle en évoquant son mariage.
Mais aujourd'hui, la militante est toujours là. Elle entend se battre "pour que la Tunisie devienne un état de droit" et que "les Tunisiens de France soient considérés comme des citoyens à part entière".
Le rendez-vous manqué avec le peuple
Car depuis la chute du président Ben Ali, les attentes sont fortes de part et d'autre de la Méditerranée. Face à cette "révolution spontanée et démocratique", les partis politiques se sont montrés "en dessous de tout", "à côté de la plaque", souligne l'ancienne syndicaliste.
"Au lieu de se retourner vers le peuple, les partis politiques se sont rués sur l'élection présidentielle, sur les postes. Ils ont complètement oublié les trois raisons pour lesquelles Ben Ali a été renversé : la dignité, la liberté et le travail", précise la candidate à la Constituante.
Se présenter face aux électeurs n'a pourtant pas été une évidence. Loin de là.
"On m'a poussée à me présenter", avoue Najet Mizouni tout en faisant valoir sa différence. "Je ne m'inscris pas dans une stratégie de conquête du pouvoir. Je veux contribuer au débat qui permettra l'élaboration d'une constitution qui sera au sommet au dessus de la loi et pas l'inverse", souligne la professeure de droit.
Priorité à l'égalité et à l'État de droit
Le maître-mot de la candidate de "Tous ensemble pour la Tunisie" ? Egalité "sur tous les plans". Najet Mizouni souhaite que la constitution, fruit du travail de la future assemblée, prône la parité mais aussi l'égalité des citoyens dans le travail, devant la justice mais aussi à l'école. "Nous voulons un état de droit avec la séparation des pouvoirs", insiste la tête de liste.
Pour cette éternelle militante, la bataille s'annonce ardue face aux islamistes d'Ennahda, donnés favoris du scrutin. Après trois semaines de campagne dans une désorganisation quasi totale, un manque de moyens flagrants, la tête de liste craint que les électeurs n'aillent par défaut vers le parti de Rached Ghannouchi.
"Ce parti existe depuis trente ans. Ils ont basé leur campagne sur leur statut de martyr après les années de répression de Ben Ali. Or, leur discours a continué à prospérer dans les mosquées", précise Najet Mizouni en insistant sur leur double discours.
"Ils n'ont pas de programme politique clair ou ne veulent pas le montrer", ajoute-t-elle avant d'insister sur la capacité de résistance des femmes. "Elles ne se laisseront pas faire. Je suis confiante".
Tags : Tunisie, femmes, élections, vigilance, droits
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