• Russie: Poutine de retour au Kremlin

    Russie: Poutine de retour au Kremlin

    Par LEXPRESS.fr, publié le 04/03/2012 à 17:14, mis à jour à 22:07


    Russie: Poutine de retour au Kremlin

    Plus de 110 000 manifestants pro-Poutine se sont rassemblés dimanche soir dans le centre de Moscou, près du Kremlin, pour fêter la victoire de leur candidat à la présidentielle.

    REUTERS/Denis Sinyakov

     

    L'homme fort de la Russie a remporté ce dimanche l'élection présidentielle au premier tour avec plus de 63% des voix. Il peut virtuellement diriger le pays jusqu'en 2024. Le scrutin a été entaché par de nombreuses fraudes. Ce qu'il faut savoir sur ce vote. 

    Vladimir Poutine a remporté l'élection présidentielle russe dès le premier tour, ce dimanche. Il a été élu avec 63,42% des suffrages après dépouillement dans 30% des bureaux de vote, selon les chiffres de la Commission électorale centrale.  

    Président jusqu'en 2024?

    Président de 2000 à 2008 puis Premier ministre depuis cette année-là, il avait quitté le Kremlin faute de pouvoir effectuer plus de deux mandats consécutifs, conformément à la Constitution. Il avait propulsé Dmitri Medvedev à la présidence. Ce dernier s'est effacé en septembre pour laisser son mentor y revenir en 2012. Une réforme constitutionnelle a porté le mandat de quatre à six ans, si bien que Vladimir Poutine aurait le droit de se représenter en 2018. En bref, il pourrait rester aux commandes de la Russie jusqu'en 2024.

    Il devrait continuer de cultiver son image d'homme fort, viril et protecteur de la nation, devant les caméras. Lui qui ne dit rien de sa vie privée, se fait filmer galopant torse nu à cheval dans la steppe, éteignant un incendie aux commandes d'un avion ou dévalant une piste de bobsleigh. Avec une tendance à l'hyper-personnalisation qui rappelle son ami Silvio Berlusconi.

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    Super Poutine à la reconquête du Kremlin

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    AFP PHOTO / DIMA KOROTAYEV

    Poutine: "Nous avons vaincu"

    Plus de 110 000 partisans de Vladimir Poutine se sont rassemblés dimanche soir dans le centre de Moscou, près du Kremlin, selon la police moscovite. Il n'y a cependant pas eu d'explosion de joie lorsque la victoire de leur champion a été annoncée sur les écrans géants. Une scène, des haut-parleurs et plusieurs écrans géants ont été installés dans la journée sur cette place qui jouxte la Place Rouge.  

    Le président sortant et le président élu sont venus saluer la foule. "Nous avons vaincu!", a lancé Dmitri Medvedev. "Nous avons besoin de cette victoire, nous avons besoin de cette victoire pour avoir un pays moderne, fort et indépendant", a-t-il poursuivi. Vladimir Poutine qui avait promis "la victoire au nom de la patrie" lors de son unique meeting électoral n'a pu retenir une larme que les médias favorables au pouvoir ont pu filmer. Prenant le micro à son tour, Vladimir Poutine a estimé que ce scrutin "était un test. Nous avons vaincu et nous avons démontré que rien ni personne ne pouvait nous désunir". Une allusion au mouvement de contestation persistant. 

     

    Ceux qui ont perdu

    Le communiste Guennadi Ziouganov, "éternel second" des scrutins présidentiels, arrive sans surprise en deuxième position avec 17,25% des voix. Le centriste proche du Kremlin Sergueï Mironov n'obtient que 3,67%. L'ultra-nationaliste Vladimir Jirinovski le devance avec environ 8% des suffrages.  

    Un score un peu inférieur à celui du milliardaire Mikhaïl Prokhorov qui a créé la surprise en arrivant troisième. Il s'impose comme une nouvelle force politique, avec son parti Russie juste. Soupçonné par une partie de l'opposition d'être manipulé par le Kremlin, il n'a cependant pas su rassembler le vote contestataire.  

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    Ils ont perdu face à Poutine, comme prévu

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    REUTERS/Grigory Dukor

    Un vent de révolte inédit

    Quelque 109 millions de Russes étaient appelés à élire leur nouveau président. Le Premier ministre Vladimir Poutine était parti archi-favori: les sondages le créditaient de 60% des suffrages avant le scrutin. Mais si son issue ne faisait guère de doute, cette consultation s'est déroulée dans un climat de contestation inédite.  

    L'arrangement entre Dmitri Medvedev et Vladimir Poutine en septembre, puis les fraudes qui ont notoirement entaché les législatives de décembre ont écoeuré les électeurs russes. Déjà mobilisés sur Internet, ils sont descendus en masse dans les rues pour dénoncer "les escrocs et les voleurs", soit le parti dominant Russie unie, selon l'expression trouvée par le blogueur Alexeï Navalny, l'une des nombreuses figures du mouvement. Pour l'écrivain Boris Akounine, "un processus de transformation sociale invisible est parvenu à maturité". Lire aussi le récit de l'un de ces activistes sur le Web.

    De nombreux autres représentants de l'opposition n'avaient pas reçu l'autorisation de se présenter face à Vladimir Poutine, notamment Boris Nemtsov, Grigori Yavlinski ou Edward Limonov. Le pouvoir n'avait pas ménagé ses efforts pour en compromettre certains pendant la campagne. Lire le reportage de notre envoyé spécial.

    Un scrutin entaché de fraude

    Les observateurs électoraux russes ont en effet relevé quantité de fraudes à la présidentielle de dimanche, notamment des bourrage d'urnes, des "transports massifs d'électeurs" et des manipulation lors du dépouillement des urnes. Le candidat communiste à la présidentielle russe, Guennadi Ziouganov, a dénoncé dimanche un scrutin "de voleurs, absolument malhonnête", tandis que l'opposant libéral Vladimir Rijkov a jugé que "pas un paramètre ne permet de considérer cette élection comme légitime".  

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    Une campagne électorale en images

    Pro et anti-Poutine se sont livrés une guerre de communication pendant des semaines. Cliquez sur la photo pour la retrouver en images.

    REUTERS/Denis Sinyakov

    Le parcours de Poutine

    Vladimir Poutine, ex-agent du FSB sans renom, devenu haut fonctionnaire diligent à Saint-Pétersbourg puis à Moscou, s'est imposé, après une ascension éclair, comme un dirigeant autoritaire qui, pour le meilleur ou pour le pire, a transformé la Russie depuis douze ans. Lire son portrait en cinq épisodes: Le roman noir de Poutine, par Vladimir Federovsky

    Pour ses partisans, la "verticale du pouvoir" au service du "leader national" est la garantie d'un avenir radieux. Ils se félicitent de l'intransigeance dont fait preuve Vladimir Poutine, même lorsque cela implique la mort de dizaines d'innocents, comme durant la prise d'otages du théâtre de la Doubrovka à Moscou (2002).  

    Pour ses détracteurs, les années Poutine sont celles du mépris pour la démocratie, comme en témoigne la manière dont il revient au Kremlin. "Il a fait de la Russie une république bananière", estime ainsi Boris Nemtsov. 

    Ce qui l'attend

    Vladimir Poutine va devoir gérer une contestation politique sans précédent et un pays menacé de stagnation, selon des experts. Selon des analystes, le maintien au pouvoir de l'équipe Poutine menace le pays d'une stagnation du même genre que celle qu'avait connue l'URSS à l'époque de Léonid Brejnev. C'est d'ailleurs sous ses traits que les anti-Poutine le représentent parfois. 

    Poutine ne peut pas lutter contre la corruption. Il ne peut pas faire la guerre à son propre camp 

    "Ce n'est pas vers la stabilité que nous nous dirigeons mais vers la stagnation: l'économie ne se développe pas et le système n'est pas efficace", estime le politologue Alexandre Konovalov, de l'Institut des expertises stratégiques à Moscou. Un sentiment partagé par Mark Ournov, de l'Ecole Supérieure d'Economie: "Le système a besoin de réformes en profondeur, politiques et économiques, mais il n'y a ni ressources financières ni ressources politiques pour ce faire".  

    Mark Ournov donne en exemple la lutte contre la corruption, un fléau dénoncé aussi bien par Vladimir Poutine que par l'opposition: "Poutine ne peut pas lutter contre la corruption. Cela l'obligerait à porter des coups dans son entourage. Alors que sa popularité est en baisse, il ne va pas faire la guerre à son propre camp". Un camp largement dominé par des anciens du FSB liés de près ou de loin au crime organisé, d'après le portrait glaçant d'un "Etat mafieux" dressé par Hélène Blanc dans son récent ouvrage Russia Blues.

    L'avenir de l'opposition

    L'hétéroclite coalition d'opposition russe est désormais face au défi d'inscrire ce mouvement dans la durée. Faute de scrutins nationaux avant les législatives de 2016 et la présidentielle de 2018 pouvant servir de catalyseur, l'alliance doit réfléchir à la forme que prendra sa lutte, alors qu'elle est exclue du parlement, n'a pas de leader reconnu et pas de réel programme. "L'avenir dépendra de notre rapidité d'organisation et de la vitesse de dégradation du pouvoir", analyse Boris Akounine.  

    Dans l'immédiat, les divers dirigeants de cette alliance qui regroupe libéraux, intellectuels et militants pour les droits de l'homme mais aussi anarchistes et nationalistes, affichent un seul objectif: rassembler un maximum de manifestants ce lundi 5 mars. Comme lors des précédents rassemblements de dizaines de milliers de personnes depuis décembre à Moscou, le mot d'ordre sera "Pour des élections justes" et "La Russie sans Poutine". Mais les anti-Poutine redoutent un retour à une répression dure des manifestations, après quelques mois de relatif répit. 

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