A l'inverse de ce qui va se passer à droite les 20 et 27 novembre 2016, il n'y aura pas de primaire à gauche pour désigner celui qui, en 2017, défendra les couleurs du camp progressiste. Certes, quelques socialistes – qui ne portent pas François Hollande dans leur cœur - ont essayé ces derniers mois de crédibiliser cette hypothèse singulière : on n'a jamais vu sous la Ve République un président sortant et désireux de se représenter contesté par son propre camp et invité à se soumettre au vote des militants. Tout indique donc qu'en 2017 le candidat du PS - même si la courbe du chômage ne s'inversait toujours pas d'ici là – s'appellera François Hollande.
Il n'empêche : la gauche est plus que jamais plurielle. Le sondage qu'a réalisé l'Ifop pour le JDD le confirme spectaculairement. Effectuée du 13 au 16 avril 2015 auprès d'un échantillon national de 2.005 personnes, cette enquête a permis d'isoler un échantillon de 819 sympathisants de gauche, représentatif de l'ensemble des sensibilités. C'est une différence avec le sondage sur la primaire de la droite et du centre : les sympathisants du Front national n'avaient pas été pris en compte, par pure logique politique, dans un échantillon allant du MoDem aux amis de Nicolas Dupont-Aignan en passant par l'UDI et l'UMP.
Ségolène Royal pas très loin
Outre celui de François Hollande, six noms ont été soumis cette fois, à titre de test, aux sympathisants de gauche. Les résultats sont souvent surprenants, toujours instructifs. Globalement, quand on demande aux sympathisants de gauche (chacun ne pouvant citer qu'un nom) leur préférence, François Hollande, choisi par 18 % des sondés, arrive en troisième position seulement : il est devancé de 11 points par Manuel Valls et même d'un point par Martine Aubry. On retiendra aussi que, revenue de l'enfer quand on se souvient du début de quinquennat, Ségolène Royal (13%) n'est pas très loin, dans cette enquête, du chef de l'État.
Proportionnellement, Manuel Valls (29% en moyenne) obtient ses trois meilleurs scores chez les hommes (32%), les employés (32%) et les 50-64 ans (31%). François Hollande (18% en moyenne) obtient, lui, ses meilleurs résultats chez les ouvriers (26%), les hommes (23%) et les 50-64 ans (21%).
Hollande en délicatesse avec le peuple de gauche
Le plus spectaculaire, c'est tout de même l'impact du Premier ministre dans l'électorat spécifiquement socialiste, où les procès en droitisation instruits contre lui ne "mordent" pas, semble-t-il : 37% des sympathisants du PS préféreraient en effet Valls en 2017, 27% restant fidèles à Hollande. Non moins étonnant : Valls est préféré à Hollande par les sympathisants du Front de gauche (15% contre 7%) et, plus encore, par les sympathisants d'Europe Écologie-Les Verts (18% contre… 1%!).
Mais pas de malentendu : dans la séquence actuelle, au Front de gauche (le PC et ses alliés) comme chez les Verts, on ne veut a priori ni de Hollande ni de Valls. Les sympathisants du Front de gauche plébiscitent deux socialistes : Arnaud Montebourg, l'homme à la marinière (24%), juste devant Martine Aubry (23%). À Europe Écologie-Les Verts, trois femmes sont distinguées : la maire de Lille l'emporte haut la main (29%) devant Ségolène Royal (20%) et… l'ex-ministre du Logement Cécile Duflot (19%).
Trois observations peuvent être ajoutées :
1/ La gauche, clairement, se cherche. Aucun des frondeurs dûment répertoriés (Montebourg, Duflot, Hamon) ne réussit à s'imposer.
2/ Manuel Valls – qui mettra, a-t-il dit, toutes ses forces dans la bataille en 2017 pour que François Hollande soit réélu – confirme qu'il jouit d'un statut à part, prometteur pour l'avenir.
3/ Quant à François Hollande, il n'est pas aujourd'hui, note Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop, "le candidat naturel" de la gauche même s'il a "toutes les cartes en main" pour s'imposer à elle demain.
En l'état, comme en témoigne l'enquête de l'Ifop, les rapports du président et du peuple de gauche sont pour le moins délicats. Et même difficiles.