• Tensions en Colombie : la police antiémeute use et abuse de la matraque

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    Tensions en Colombie : la police antiémeute use et abuse de la matraque

    Capture d'écran de la vidéo postée par notre Observateur.
     
    Les manifestations de paysans qui font rage en Colombie depuis une dizaine de jours offrent leurs lots d’images choquantes. Une vidéo envoyée par un de nos Observateurs montre des policiers anti-émeute tabasser trois hommes dans une station-service, en marge des défilés de protestation.
     
    La séquence de 3 minutes a été filmée discrètement par notre Observateur avec son téléphone portable. Elle s’ouvre sur l’arrivée d’une horde de policiers dans une station-service à proximité de la bourgade de Guachata, une ville située à une centaine de kilomètres au nord de Bogota, la capitale colombienne. L’ambiance est électrique. Près d’une pompe, on découvre trois hommes, des civils, allongés à plat ventre en train de se faire rouer de coups de pied et de coups de matraque alors qu’ils ne semblent pas opposer de résistance. La scène dure une cinquantaine de secondes, jusqu’à ce que les policiers décident de partir.
     
    VIDEO
     
    Sur la vidéo, les policiers passent à tabac trois hommes dans une station-service, en marge d'un mouvement de contestation dans la petite ville de Guachate (département de Cundinamarca, centre de la Colombie). Vidéo postée sur YouTube par notre Observateur.
     
    Si les circonstances qui ont conduit à cette violence n’ont pas encore été élucidées, la police nationale, contactée par France 24, condamne ce débordement et assure qu’une enquête interne est en cours pour démasquer leurs auteurs.
     
    Une vive tension règne depuis 11 jours en Colombie. Un mouvement de contestation a été lancé par les paysans pour exiger du gouvernement des garanties leur permettant de vivre dignement de la culture de la terre, notamment l'établissement de prix plancher pour certains produits ainsi que la baisse des prix des intrants agricoles (les différents produits apportés aux terres et aux cultures).
     
    Dès le deuxième jour de mobilisation, le mouvement a été rejoint par d’autres corps de métier. Désormais, plusieurs dizaines de milliers de camionneurs militent à leur tour pour une baisse des prix des carburants tandis que des milliers de petits exploitants miniers se sont regroupés en certains points du pays pour exiger la régularisation de leurs activités.
     
    Jeudi, un cortège composés d’ouvriers, d’étudiants, d’enseignants et de professionnels de la santé, ont manifesté à Bogota et Medellin, les deux principales villes du pays, pour soutenir les agriculteurs dans leur combat. Des manifestations qui ont été émaillées de violents heurts entre protestataires et forces de l’ordre.
     
    Face à la grogne qui se fait de plus en plus pressante et ses conséquences directes dans la vie quotidienne - des pénuries de biens agricoles commencent à se faire sentir à Bogota suite au blocage des routes par les paysans -, les autorités colombiennes ont annoncé plusieurs propositions pour sortir d’une crise qui a déjà fait deux morts (un policier et un manifestant) et quelque 350 blessés.
    Contributeurs

    "Les policiers ont agi de sang-froid"

     
    Jhon Cesar, l’auteur de la vidéo, travaille dans une entreprise d’import-export de charbon à Guacheta. Il était sur place pour des raisons professionnelles.
     
    J’ai réalisé cette vidéo le 21 août sur les coups de midi. La scène se déroule dans une station-service située à environ deux kilomètres d’une petite ville qui s’appelle Guacheta, dans le département de Cundinamarca. [Cette région de Bogota est l’une des plus touchées par les mouvements de colère paysans].
     
    Dans la matinée, des affrontements ont eu lieu entre paysans et forces de l’ordre. Des barrages ont été érigés pour bloquer les routes [à 33’’ sur la vidéo, on aperçoit des arbres couchés pour barrer la route]. Au moment où je filme, le calme est revenu. Tout le secteur est quadrillé par les hommes de la ESMAD [Escuadrón Móvil Antidisturbios, l’unité antiémeute de la police].
     
    "Les manifestants sont décrits comme des révolutionnaires enragés"
     
    Pourtant, cela ne les empêche pas de régler leur compte à trois personnes sans défense, des paysans. Pour quelle raison ? Je n’en sais rien. L’agitation était beaucoup plus forte avant que je filme. Au moment où il tabasse les civils, la plupart des manifestants avaient déjà été dispersés par des gaz lacrymogènes [encore audibles dans la vidéo]. Les policiers n’ont pas d’excuse, ils agissent de sang-froid. Ils contrôlent la situation mais se livrent à cette agression purement gratuite. D’après quelques amis agriculteurs, un des hommes passés à tabac a des lésions au niveau d’un œil.
     
    En filmant la scène, j’avais très peur, j’ai essayé d’être le plus discret possible. J’ai sûrement pris des risques mais je voulais que l’on voie la brutalité policière. Certains abusent de leur pouvoir en faisant croire qu’ils ne font que rétablir l’ordre, qu’ils assurent la sécurité de la population… Ils dépeignent les manifestants comme des révolutionnaires enragés, des fauteurs de troubles qui menacent l’équilibre de la société mais regardez dans quel état économique se trouve la Colombie.
     
    En Colombie, la ESMAD a une réputation sulfureuse. De nombreuses vidéos circulent sur les réseaux sociaux pour dénoncer leurs bavures à l’égard de la population. Il y a quelques années, un documentaire a été réalisé pour montrer l’ampleur du phénomène.
     
    Billet rédigé avec la collaboration de Grégoire Remund, journaliste à France 24.

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