• Punir ceux qui consultent un site web terroriste, c'est possible?

    Punir ceux qui consultent un site web terroriste, c'est possible?

     Par Raphaële Karayan - publié le 22/03/2012 à 16:34

    Nicolas Sarkozy a déclaré qu'il voulait que soient punis pénalement les internautes qui se rendent sur les sites faisant l'apologie du terrorisme. Le cadre juridique actuel rend possible une loi en la matière.

    L'allocution de Nicolas Sarkozy après l'opération du RAID, qui s'est terminée par la mort de Mohamed Merah.

    L'allocution de Nicolas Sarkozy après l'opération du RAID, qui s'est terminée par la mort de Mohamed Merah.
    REUTERS/France Television

    Lors de son allocution consécutive à la mort de Mohamed Merah, le responsable des tueries de Toulouse et Montauban, Nicolas Sarkozy a annoncé plusieurs mesures pour renforcer la lutte contre le terrorisme. Parmi elles, des sanctions pénales à l'encontre de "toute personne qui consultera de manière habituelle les sites internet qui font l'apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine et à la violence".

    L'apologie du terrorisme est punie par la loi

    Selon l'avocat spécialisé dans le droit de l'internet Arnaud Dimeglio, il est possible de mettre en place de telles sanctions à partir du moment où la loi de 1881 sur la liberté de la presse réprime l'apologie des actes de terrorisme (de cinq ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende). Les sites dont parle le président de la République.

    En revanche, il serait nécessaire de faire évoluer le Code Pénal, car rien ne prévoit aujourd'hui une telle sanction pour celui qui ne fait que consulter les sites qui font l'apologie du terrorisme. Pour cela, le législateur pourrait s'inspirer de ce qui a été fait dans le domaine de la lutte contre la pédopornographie. Le même problème s'est posé pour qualifier l'infraction consistant à consulter des contenus pédopornographiques sur internet.

    L'infraction (pénale) de recel, qui consiste à bénéficier d'un crime ou d'un délit, a été un temps utilisée. Mais a l'origine, elle a été conçue pour des produits, pas pour de l'information ou des contenus immatériels. C'est la même chose pour le streaming illégal, autour duquel il y a tout un débat juridique pour savoir si les internautes qui regardent un contenu en streaming se rendent coupables de recel.

    L'infraction de "consultation habituelle" de contenus illégaux existe déjà

    Comme l'infraction de recel n'était pas adaptée à la consultation de contenus pédopornographiques, le législateur a donc modifié la loi : "Le fait de consulter habituellement un service de communication au public en ligne mettant à disposition une telle image ou représentation ou de détenir une telle image ou représentation par quelque moyen que ce soit est puni de deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende".

    On retrouve dans cet article du Code Pénal la notion de "consultation habituelle", qui correspond aux termes employés par Nicolas Sarkozy. Reste au juge à définir ce qu'est une consultation "habituelle".

    Identifier les visiteurs d'un site est techniquement possible

    Enfin, pas de contre-indication non plus pour ce qui est d'accéder aux identités des internautes qui consultent ce type de site. Si le contenu du site est illégal et destiné aux Français (ou s'il a un lien indirect avec la France), la loi LCEN permet de demander à un juge l'autorisation de réclamer ces données aux hébergeurs et aux fournisseurs d'accès internet. Le déroulement de l'enquête qui a permis de remonter jusqu'à Mohamed Merah a d'ailleurs montré que les policiers avaient identifié l'adresse IP utilisée par le tueur pour le localiser.

    Cependant, les choses se corsent quand le site est basé à l'étranger.

    Outre cette mesure concernant les sites internet, le président a également déclaré vouloir punir pénalement les "personnes qui se rendent à l'étranger pour y suivre des travaux d'endoctrinement à des idéologies conduisant au terrorisme", et réaliser une étude sur la propagation de ces idées dans le milieu carcéral en France. François Fillon a embrayé en ajoutant que le gouvernement allait s'attacher "sans délai à la mise en oeuvre des orientations fixées" par le président.


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :