• Polémique à la 55e Biennale de Venise

    <figure class="fig-photo"> Stefano Rabolli Pansera, conservateur du pavillon de l'Angola, l'artiste Edson Chagas, Paula Nascimento, conservateur,la ministre de la Culture angolaise Rosa Cruz e Silva et Massimo Bray, ministre italien de la Culture.<figcaption class="fig-media-legende" itemprop="description">

    Stefano Rabolli Pansera, conservateur du pavillon de l'Angola, l'artiste Edson Chagas, Paula Nascimento, conservateur,la ministre de la Culture angolaise Rosa Cruz e Silva et Massimo Bray, ministre italien de la Culture. Crédits photo : Luigi Costantini/AP

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    Le lion d'or au pavillon de l'Angola a stupéfié les festivaliers les plus aguerris.

     
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    Où est l'Angola? La question a fusé, samedi midi, immédiatement après l'annonce du palmarès de cette 55e Biennale de Venise. Elle concernait deux champs géographiques. Où se situait ce pays de l'Afrique de l'Ouest, entre Namibie, Zambie et République Démocratique du Congo? Et surtout, où, dans cette 55e Biennale hyperdense, pouvait bien se nicher le pavillon de l'Angola, lauréat imprévisible du lion d'or pour la meilleure participation nationale.

    «Grosse fatigue», dirait Camille Henrot, 34 ans, la Française qui a décroché le lion d'argent du jeune artiste prometteur pour sa vidéo formidable qui raconte l'histoire de l'univers en treize minutes et en un dédale de pop-up colorés. Moment de déroute palpable dans l'assemblée plongée dans un océan de perplexité. Cette annonce à forte teneur politiquement correcte disqualifiait ipso facto Anri Sala, le favori du buzz pour son splendide film Ravel/Unravel qui a fait courir tout Venise dans les Giardini jusqu'au pavillon français.

    Rattrapage

    Une heure après ce coup de théâtre, un gros bouchon de festivaliers nerveux signalait dans la ville l'emplacement de ce pavillon manquant que bien peu avaient même remarqué. Dans cette session de rattrapage in extremis, des pros irréprochables comme Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton, le galeriste Daniel Templon, Sam Bardaouil et Till Fellrath les commissaires du pavillon libanais et ardents porte-parole de l'artiste Akram Zaatari.

    Rendez-vous donc au Palazzo Cini, Dorsoduro 864, à mi-chemin entre la Pointe de la Douane de François Pinault et la Collection Peggy Guggenheim. Le palazzo merveilleux, tout de mosaïque d'or sur le Grand Canal, est étroit comme un profil. Ses planchers historiques ne peuvent supporter que 30 personnes à la fois. Il a donc fallu attendre longtemps pour pénétrer dans LA révélation de la 55e Biennale de Venise.

    Après pareil pèlerinage, les espérances étaient grandes. Aux murs, des merveilles, le Portrait de deux amis de Pontormo (1522), une Vierge à l'Enfant de Piero della Francesca, une étude du Printemps par Botticelli et son atelier. Au sol, les photos «Luanda Encyclopedic City» d'Edson Chagas, disposées en piles prêtes à l'emploi pour faire son port­folio personnel. Un lion d'or? Arte très povera, plutôt.


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  • International

    Merkel ne souhaite pas transférer davantage

    de pouvoir à Bruxelles

    Par Les Echos | 02/06 | 14:58 | mis à jour à 15:19

    Dans un entretien au « Spiegel » à paraître lundi, la chancelière allemande Angela Merkel se dit opposée à une Commission européenne aux compétences élargies, elle réclame au contraire une meilleure coordination entre Etats-membres.

    Pour la gouvernance de l’Europe, Angela Merkel milite pour une meilleure coordination entre les Vingt-sept - AFP
    Pour la gouvernance de l’Europe, Angela Merkel milite pour une meilleure coordination entre les Vingt-sept - AFP

    En matière de gouvernance de l’Europe, Berlin ne veut pas d’un super gouvernement européen, et encore moins d’un président de l’Europe élu au suffrage universel. C’est ce que confie Angela Merkel à l’hebdomadaire « Der Spiegel » à paraître lundi . Dans cet entretien, elle se dit opposée à une Commission européenne aux compétences élargies et réclame au contraire une meilleure coordination entre Etats-membres.

     

    La chancelière allemande ne voit pas « la nécessité de transférer dans les années à venir encore plus de prérogatives vers la Commission à Bruxelles ». Elle affirme au contraire dans cet entretien qu’elle défend, avec le président français François Hollande, l’idée d’une meilleure coordination entre Etats-membres, notamment dans le domaine économique, indique le « Spiegel » qui rapporte des extraits à la troisième personne.

    Angela Merkel et François Hollande se sont rencontrés jeudi à Paris où ils ont affiché leur volonté commune de renforcer la compétitivité et la croissance en Europe. A un mois du prochain conseil européen ils se sont prononcés pour un renforcement de l’Eurogroupe , avec notamment une présidence à temps plein que refuse son actuel président, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, et des mesures pour l’emploi.

    Contre un président de l’Europe élu

    La chancelière estime que la coordination économique entre Etats actuellement « beaucoup trop faible  » et souhaite qu’elle soit renforcée, un moyen, selon elle, d’améliorer la compétitivité. Toutefois, un tel objectif ne signifie pas qu’il faille transférer « plus de compétences à Bruxelles ». Elle se dit même « réservée » sur l’éventualité d’une élection du président de la Commission européenne au suffrage universel direct. «Un président de Commission, qui serait élu directement par le peuple devrait se voir conférer des pouvoirs bien différents de ce qui est le cas actuellement », souligne la chancelière.


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  • 02 juin 2013      
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    Compromis franco-allemand sur l’achèvement

    de l’union bancaire

    RTX1063QAngela Merkel et François Hollande se sont mis d’accord, jeudi, sur le second étage de l’Union bancaire : une autorité européenne de résolution des crises bancaires chargée de restructurer ou de liquider les banques en difficulté verra bien le jour. Celle-ci s’appuiera sur un « fonds de résolution » alimenté par les contributions des organismes financiers et sur le Mécanisme européen de stabilité (MES). La percée est extrêmement importante, l’Allemagne se faisant tirer l’oreille depuis cinq mois pour franchir ce pas, pourtant essentiel pour parvenir à une véritable union bancaire. La fédéralisation du contrôle bancaire, le plus grand transfert de souveraineté depuis la création de l’euro, devrait donc être achevé d’ici mai 2014, soit en un temps record : le chantier n’a, en effet, été lancé qu’en juin 2012.

     


    En décembre dernier, un compromis a été déjà été trouvé pour confier à la Banque centrale européenne (BCE) la supervision des principales banques européennes à partir du 1er mars 2014. Un pas nécessaire, mais insuffisant : si elle détecte une situation anormale, la BCE ne peut en aucun cas être chargée de restructurer (fermeture d’agences, licenciement, etc.) ou liquider une banque : en effet, il s’agit là d’une responsabilité politique qui engage les finances des États. D’où la nécessité de créer un mécanisme de résolution.

    Mais voilà, Wolfgang Schäuble, le ministre des finances allemand, qui a toujours été réticent à ce nouveau partage de souveraineté, l’imbrication entre intérêts politiques et financiers étant particulièrement forte outre-Rhin, estimait qu’il fallait préalablement modifier les traités pour transférer au niveau européen une compétence jusque-là exclusivement nationale. Angela Merkel était au départ sur cette longueur d’onde afin d’éviter une toujours possible censure du Tribunal constitutionnel de Karlsruhe. Mais, elle a préféré y renoncer face à l’incertitude persistante sur l’état de santé réel des banques de la zone euro. « Il faut de la transparence pour rétablir la crédibilité des banques », dit-on à Berlin : « la situation est catastrophique, plus personne ne croit aux stress test et on ne sait toujours pas quelle est leur état réel : la confiance est donc rompue. C’est cela le problème central de la zone euro ». Désormais, plus personne ne conteste que la crise de la zone euro est d’abord et avant tout une crise bancaire non résolue. Ce qui se répercute sur l’économie réelle : ne sachant pas qu’elle est la situation réelle de leurs homologues, les banques hésitent à se prêter entre elles et préfèrent reconstituer leurs fonds propres et leurs marges. Résultat : en dépit des taux bas (0,50 % à trois mois) pratiqués par la Banque centrale européenne (BCE), les crédits aux entreprises se raréfient ou coûtent de plus en plus cher, notamment dans les pays sous assistance financière ou dont la situation économique est jugée fragiles, ce qui déprime davantage l’activité…

    RTXZYWKManifestement, Paris a su trouver les arguments pour convaincre Berlin qu’on pouvait continuer à avancer sans se lancer dans une réforme des traités, une procédure lourde et périlleuse (il faut se mettre d’accord à Vingt-sept, bientôt Vingt-huit). À l’Élysée, on estime, en effet, que l’union bancaire est une possibilité explicitement ouverte par le traité de Maastricht. Exit, donc, la simple mise en réseau des autorités nationales de résolution que recommandait Schäuble comme première étape. Le couple franco-allemand recommande, dans sa contribution adoptée jeudi, la « mise en place d’un mécanisme de résolution unique » d’ici mai 2014 qui « associera » les « autorités de résolution nationales » (l’harmonisation des dispositifs nationaux fait l’objet d’une proposition de directive de la Commission en cours d’adoption). Ce « mécanisme » décidera à la majorité (« prise de décisions rapide, efficace et cohérente », dit la contribution franco-allemande).

    Un « fonds de résolution » européen — s’appuyant sur les dispositifs nationaux et alimenté par les contributions des banques — verra le jour, ce qui permettra de restructurer les établissements en difficulté sans faire appel à l’argent public. Mais sa montée en puissance sera lente. En attendant, c’est le MES qui sera mis à contribution : celui-ci pourra prêter de l’argent aux États membres ou recapitaliser directement les banques en difficultés, une possibilité qui permettra de rompre le cercle vicieux entre dette publique et dette bancaire (prêter directement aux banques n’accroit pas la dette des États). En juin, les critères permettant une telle recapitalisation devront avoir été défini et pour être adoptés en même temps que les directives sur le redressement des banques et la résolution de leurs défaillances. Mieux, Berlin n’exclue plus de communautariser le MES, un organisme totalement intergouvernemental décidant à l'unanimité, ce qui permettra au « mécanisme de résolution unique » de disposer de fonds suffisants (avec un MES décidant à la majorité) pour éviter une crise systémique. Ainsi, la crainte d’une contagion sera écartée, exactement comme c’est le cas aux États-Unis où, en dernier ressort, le budget fédéral peut être mis à contribution pour sauver le système bancaire, ce qui évite que les marchés paniquent.

    Le dernier étage de la fusée devrait logiquement être la mise en place d’une garantie européenne des dépôts bancaires de moins de 100.000 euros, pour l’instant uniquement nationale. Mais on estime, à Paris, qu’il n’y a pas urgence : la crise chypriote a montré qu’il n’y avait pas de risque de « bank run » européen (un retrait massif de capitaux), les épargnants se contentant, pour l’instant, de ces garanties nationales.

    La contribuation franco-allemande est ici.

     Photos: Reuters


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  • <article class="article article_normal" itemscope="" itemtype="http://schema.org/NewsArticle">

    Football : le RC Strasbourg remonte en National

    Le Monde.fr avec AFP | <time datetime="2013-06-02T19:08:56+02:00" itemprop="datePublished">02.06.2013 à 19h08</time> • Mis à jour le <time datetime="2013-06-02T19:09:45+02:00" itemprop="dateModified">02.06.2013 à 19h09</time>
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    Le Racing club de Strasbourg, ancien grand du football français qui a failli disparaître en 2011 en raison de problèmes financiers, a validé son retour en National (3e division), en battant Raon-L'Etape (3-2), dimanche à Epinal lors de la dernière journée de la poule B de CFA.

    Champion de France en 1979, le Racing, qui disputait encore la Coupe d'Europe en 2006, avait été relégué en National en 2010, avant d'être placé en liquidation judiciaire l'année suivante. Racheté par Frédéric Sitterlé, un jeune investisseur alsacien, le club était reparti en CFA2 (5e échelon) au début de la saison 2011/2012. Il a depuis été repris par son ancien attaquant international Marc Keller, qui a pris la tête d'un groupe d'investisseurs.

    Pour monter en National, les Strasbourgeois devaient impérativement s'imposer dimanche alors que Raon-L'Etape, leader au début de la rencontre, pouvait se contenter d'un match nul. Mais les Alsaciens ont été plus réalistes, s'imposant grâce à Yann Bénédick (41e), Brian Amofa (68e) et David Ledy (88e) pour l'emporter 3-2. Raon n'a sauvé l'honneur que dans les deux dernières minutes avec un but de Samir Ketlas (89e) puis un autre sur penalty par Mounir Hamzaoui (90e).

    Reportée d'une semaine et déplacée à Epinal pour des raisons de sécurité, cette rencontre s'est déroulée devant 5.600 spectateurs dont plus de 3.000 supporters alsaciens.

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  • Monde

    Istanbul: «Ce sont les arbres qui cachaient

    la forêt du ras-le-bol»

    <time datetime="2013-06-02T19:04:17.227937+02:00" itemprop="datePublished">2 juin 2013 à 19:04  </time>lien

    Des manifestants place Taksim, à Istanbul, dimanche.

    Des manifestants place Taksim, à Istanbul, dimanche. (Photo Bulent Kilic. AFP)

    Témoignages Comment la défense d'un parc a-t-elle débouché sur un vaste mouvement contre le gouvernement ? Rencontre avec des manifestants, place Taksim.

    Après-midi joyeuse sur la place Taksim à Istanbul, toujours occupée par des milliers de manifestants. Au départ combat pour sauver le petit parc Gezi de la destruction, menacé par le projet de reconstruction d’une ancienne caserne ottomane abritant un centre commercial géant, le mouvement s’est transformé en vaste protestation contre le Premier ministre Erdogan après des violences policières.

     

    Profitant du retrait de la police, dans la nuit de samedi à dimanche les manifestants ont réinvesti la place Taksim et le parc juste à côté, chantant, buvant, dansant, et construisant des barricades au pied des grands hôtels de ce quartier plutôt chic de la rive européenne. Au même moment, des affrontements ont eu lieu à nouveau du côté de BeÅŸiktaÅŸ et l’odeur âcre des gaz lacrymogènes remontaient les rues jusqu’à Taksim. Mais la police n’avait, à 17 heures, pas encore tenté de récupérer cette place symbolique, où se déroulent habituellement les manifestations de la gauche et des syndicats.

    En attendant peut-être de nouveaux affrontements, les protestataires, le plus souvent des jeunes, hommes et femmes (presque toutes dévoilées), nettoient les lieux, plantent des arbres ou appellent Erdogan à la démission. Dans la foule, des supporters, des badauds, des membres de partis kémalistes, mais, surtout des citoyens non-engagés auparavant qui viennent exprimer leur colère. Témoignages.

    «On a parfois l’impression que la police veut tuer»

    Begüm, 24 ans, ingénieure, et YaÄŸmur, 18 ans, étudiante en biologie.

    «Nous sommes venues cette après-midi pour aider les gens qui dorment ici depuis quatre jours. Nous rangeons, nettoyons, apportons à manger. Nous habitons tout près, mais on ne va pas manifester le soir, parce que c’est trop dangereux, on a eu des amis blessés. On a parfois l’impression que la police veut tuer. Alors, avec les casseroles, aux fenêtres, on soutient les protestataires.

    «Le mouvement est en train de grandir, au début c’était dans ce petit parc, puis à BeÅŸiktaÅŸ, maintenant dans d’autres villes. Mais non, on n'est pas ici contre le gouvernement en général, on veut juste sauver cet endroit, si on commence à en faire une revendication pus générale, on va perdre, parce qu’en face, ils sont plus nombreux. C’est impossible, la majorité des gens soutiennent toujours Erdogan.»

    «Depuis vendredi, j’ai dû dormir quatre heures»

    Mehmet, 25 ans, sans emploi car rentré depuis une semaine de son service militaire.

    «Je suis venu ici à cause des violences de la police contre les manifestants, même si je n’en veux pas aux policiers, je sais qu’ils ne font pas ce qu’ils veulent, qu’ils agissent sur les ordres du gouvernement. Depuis vendredi, j’ai dû dormir quatre heures, je rentre juste chez moi pour prendre une douche et changer de vêtements.

    «Je ne sais pas combien de temps ça va durer, je ne suis même pas très optimiste, mais il faut absolument continuer. Il faut montrer à Erdogan qu’il ne peut pas faire tout ce qu’il veut. Depuis qu’il est au pouvoir, il censure la presse, il réduit les libertés des gens. Même si on vote, je n’ai pas le sentiment que l’on vit dans une réelle démocratie.»

    «Erdogan veut un pays où les gens ne pensent pas»

    Atakan, 26 ans, graphiste.

    «Tout a commencé avec une histoire autour de quelques arbres et maintenant cela devient beaucoup plus important. Je suis vraiment impressionné par le nombre de personnes présentes, par la solidarité. Cette nuit, je manifestais, cet après-midi, je range et je ne sais pas de quoi demain sera fait. Peut-être que les gens vont continuer, peut-être qu’ils vont arrêter, parce qu’ils devront retourner travailler.

    «Je ne sais pas si on va changer les choses. Je pense qu’Erdogan va encore gagner les prochaines élections, parce que les pauvres gens voteront pour lui. Ils regardent la télé et à la télé on ne parle pas de ce qui se passe ici, on ne parle que des succès du gouvernement. Erdogan veut un pays où les gens ne pensent pas et on se bat contre ça.»

    «Le gouvernement remet en cause notre manière de vivre»

    Erman, 28 ans, informaticien.

    «C’est la deuxième fois que je viens manifester, toute ma famille est là aussi, mes parents, ma soeur, mes cousins. Moi je suis né à Istanbul, et le gouvernement remet en cause notre manière de vivre. Aujourd’hui, c’est le peuple qui manifeste, ce n’est pas un mouvement partisan.

    «Je sais bien qu’il y a des élections et j’accepte les victoires de Erdogan, mais il ne doit pas oublier que tout le monde ne pense pas comme lui. Il veut qu’on vive dans un pays islamiste, avec ses lois contre l’alcool, contre le droit des femmes.»

    «Une vraie démocratie, c'est quand on peut dire ce qu'on pense»

    Ece, 20 ans, étudiante en sciences politiques

    «Dans la journée, je manifeste, mais pas le soir, mes parents ne veulent pas, ils sont trop inquiets. On a commencé pour sauver le parc, on a déjà des centres commerciaux partout, on n'en veut pas plus mais le gouvernement n’en a rien à faire. Il détruit les espaces verts, les monuments, les lieux importants qui ont une histoire. Mais maintenant le mouvement proteste aussi contre la gestion dictatoriale du pays, ça fait longtemps que les gens en ont marre.

    «Erdogan pense que la démocratie, c’est juste le fait d’aller voter et réprime le droit de s’exprimer en-dehors. Une vraie démocratie c’est quand on peut dire ce qu’on pense, et en Turquie aujourd’hui les gens vont en prison pour ça. Erdogan se présente comme s’il était notre père à tous, qu’il pensait pour nous, à notre place, mais il oublie qu’une moitié du pays ne le soutient pas.

    «Je pense que le mouvement va continuer. Beaucoup de personnes qui ne s’intéressaient pas à la politique sont aujourd’hui dans la rue, mais j’espère en même temps qu’on ne sera pas récupérés par des partis politiques, notamment les kémalistes, parce qu’ils ont tout de même des manières de penser et des références un peu dépassées.»

    «Ce sont les arbres qui cachaient la forêt du ras-le-bol»

    Sinan Logie, professeur d’architecture, 40 ans, belgo-turc.

    «J’habite à Istanbul depuis deux ans, c’est à peu près le moment où le projet de ce centre commercial a été lancé. Cela fait longtemps que je m’implique pour sauver ce parc, j’ai signé les pétitions, tous les architectes pensent que c’est une aberration urbaine.

    «Au départ, c’est vrai que la protestation concernait un cercle assez restreint de personnes, mais aujourd’hui je vois tout le monde manifester, des étudiants, beaucoup, mais aussi des mecs de BeÅŸiktaÅŸ au chômage. Même les supporters des trois principales équipes de foot d’Istanbul, Galatasaray, Fenerbahçe, BeÅŸiktaÅŸ s’y sont mis et ont défilé côte à côte, et ça c’est très rare parce que normalement ils s’affrontent.

    «Le combat pour ce parc est symbolique. Ce sont les arbres qui cachaient la forêt du ras-le-bol. L’AKP revient sur l’avortement, la consommation d’alcool, nous sommes l’un des pays au monde où il y a le plus de journalistes en prison. On pensait que les jeunes ici étaient à la masse, ne pensant qu’à leurs Starbucks, aller au mall et poster des photos de ce qu’ils mangent sur Instagram, mais en fait ils sont éduqués, mobilisés. On vit des moments de solidarité incroyable ici et j’espère que le mouvement va continuer.

    «Les gens scandent: "Bu dana baslangic ! Mücadeleye Devam !", "Ceci n’est que le commencement ! On continuera la lutte". C’est vraiment fort.»

    «Nous rendons hommage à Mustafa Kemal»

    Yusemin, 37 ans, professeur d’anglais.

    «Je suis descendue dans la rue hier après-midi avec des amies. Nous sommes restées à Taksim jusqu’à 4-5 heures du matin. On est rentrées dormir quelques heures et nous sommes revenues ce matin. 


    «Il ne s’agit pas seulement des arbres. C’est une manifestation contre le gouvernement et sa politique de restriction des libertés. Aujourd’hui, nous rendons hommage à Mustafa Kemal car c’est à lui que nous devons la liberté, les droits pour les femmes. Il est dans notre cœur. Il y a trois ou quatre ans, Erdogan l’a traité d’alcoolique. La semaine dernière, il a imposé une loi pour restreindre la consommation d’alcool. Nous voulons montrer que nous sommes là et en même temps, nous avons peur. En tant que fonctionnaire, je crains de perdre mon travail.

    «Nous sommes tous musulmans, mais cela n’a rien à faire dans l’espace public. C’est une affaire entre Dieu et nous. Je prie, je fais le ramadan, mais je suis une femme moderne. Je ne veux pas me couvrir la tête, je veux lire ce que je veux, boire ce que je veux… Erdogan veut nous imposer des lois religieuses mais nous n’en voulons pas.»

    «Je suis venue pour faire du bruit avec les autres»

    Consın, étudiante à l’université en informatique, 21 ans

    «Je n’ai pas pu être là hier car j’avais mes examens. Ceux d’aujourd’hui ont été annulés et je suis venue pour faire du bruit avec les autres.

    «Ce n’est pas seulement à propos de ce projet de centre commercial, on est là pour défendre notre liberté que le gouvernement tente de nous ôter. La destruction du jardin, c’était la décision de trop. Ça suffit, il faut que ça change.

    «C’est la première fois que je vois une manifestation de cette ampleur, où, en plus, les partis de l’opposition sont réunis. Mais je ne suis en accord avec aucun d’eux, je suis là pour défendre nos droits, pour dire stop à toutes les décisions injustes, à la violence policière, à la censure des médias, aux arrestations d’étudiants, à la politique vis-à-vis des minorités, aux inégalités du système éducatif… Le gouvernement exploite les croyances religieuses des gens pour mener la politique qui l’arrange. Et il maintient les gens dans la peur.

    «Mais je ne suis pas sûre que ça va durer. Les gens vont oublier… Comme toujours.»


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