Le chef du Parti social-démocrate tchèque (CSSD), Bohuslav Sobotka, 41 ans, espérait obtenir un tiers des voix de ses concitoyens, qui élisaient, vendredi 25 et samedi 26 octobre, leur Parlement afin de former un gouvernement stable. Il n'a finalement obtenu que 20,5 % des suffrages des 59 % de Tchèques qui se sont rendus aux urnes.
Il devance d'à peine deux points l'ANO (Alliance des citoyens mécontents, mais aussi "oui" en tchèque), la formation populiste du milliardaire tchèque d'origine slovaque Andrej Babis, qui a réussi, avec 18,7 % des voix, son pari de devenir la deuxième force politique du pays. Le Parti communiste (KSCM), traditionnel réceptacle du vote protestataire, a recueilli 14,9 % des suffrages.
PAS D'UNION DE LA GAUCHE
L'ambition de M. Sobotka de constituer un gouvernement d'union de la gauche, avec ou sans participation de ministres communistes, sera irréalisable, faute d'une majorité suffisante de sièges au Parlement. M. Babis (59 ans), principale fortune tchèque, s'en est d'ailleurs réjoui en commentant les résultats provisoires. "C'est une excellente chose que nous ayons empêché ainsi la possibilité d'un retour de la gauche au pouvoir", a-t-il déclaré samedi après-midi, en ajoutant qu'il "ne soutiendrait en aucun cas un gouvernement auquel participerait des communistes".
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PARTIS DE DROITE LAMINÉS
M. Babis a aussi écarté toute collaboration avec les deux partis "synonymes de corruption et de gabegie" de l'ex-gouvernement de droite, dont la chute en juin pour des affaires de malversations et d'espionnage ont provoqué les élections anticipées. L'ODS (Parti démocratique civique) de l'ex-premier ministre Petr Necas et TOP 09 du ministre des finances honni, Miroslav Kalousek, ont été laminés lors du scrutin en n'obtenant respectivement que 7,7 % et 11,9 % des voix.
Une autre formation populiste, Usvit (Aube de la démocratie directe), de l'entrepreneur tchéco-japonais Tomio Okamura, fait aussi son entrée au Parlement avec une quinzaine d'élus (6,9 % des suffrages). Déjà élu sénateur l'an dernier, M. Okamura (41 ans), très populaire, défend l'introduction du référendum populaire à la Suisse dans le droit tchèque et la possibilité de révoquer les élus.
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COALITION INCERTAINE
Le septième parti à entrer au Parlement qui, depuis le retour de la démocratie en novembre 1989, n'a jamais été aussi fragmenté, est l'Union chrétienne-démocrate (KDU-CSL), qui a obtenu 6,8 % des voix et pourrait, comme dans le passé, jouer un rôle-clé dans la constitution d'un gouvernement de coalition. Plus vieux parti du pays – il a été fondé en 1919 et a même existé sous le communisme –, il n'avait pas franchi, lors des élections précédentes en 2010, le seuil des 5 % nécessaires pour avoir des élus, affaibli par la scission qui avait donné naissance à TOP 09.
Si, comme prévu par les sondages, les "Pirates" (2,6 %) et les Verts (3,2 %) resteront aux portes de la Chambre des députés, le cuisant échec du Parti des droits des citoyens – les Zemaniens (SPOZ), la formation du chef de l'Etat, Milos Zeman –, sonne comme un avertissement. Malgré le soutien ouvert de M. Zeman pendant la campagne et la présence de plusieurs ministres de l'actuel "gouvernement d'experts" provisoire sur ses listes, le SPOZ n'a totalisé que 1,5 % des voix.
Les négociations pour la formation d'une coalition gouvernementale s'annoncent difficiles et ne commenceront pas avant quelques jours, voire semaines, selon le président Zeman, qui compte jouer un rôle actif dans sa constitution.