La publication officielle de l’encyclique du pape François sur le climat, Laudato si’(« Loué sois-tu »), jeudi 18 juin, a engagé l’Eglise catholique dans une controverse morale, économique mais aussi politique, sur un terrain dont elle n’est pas familière. L’affluence des journalistes à la conférence de presse organisée par le Vatican, à la mi-journée, était à la mesure des attentes suscitées par ce texte annoncé depuis plus d’un an.
La lecture de ses quelque deux cents pages ne décevra pas ceux qui, chez les partisans d’engagements internationaux contraignants pour les Etats, en attendaient un coup de main avant la conférence sur le climat qui aura lieu à Paris, en décembre.
A sa manière directe et parfois tranchante, le pape Bergoglio prend acte de ce que l’homme est le « principal responsable » du changement climatique. Il exhorte les gouvernements à agir vite pour échapper à la « catastrophe » et aux pays riches de cesser de faire porter aux plus pauvres les conséquences de leur mode de vie « consumériste » et de leur « gaspillage ».
Il prône « une certaine décroissance dans quelques parties du monde » pour permettre « une saine croissance en d’autres parties » et critique vivement le pouvoir de la finance. « La soumission de la politique à la technologie et aux finances se révèle dans l’échec des sommets mondiaux sur l’environnement », accuse-t-il.
« Toute l’Eglise universelle est unie au pape » à l’occasion de la parution de ce texte écrit par lui « personnellement », bien que pas par lui seul, a pris soin de dire le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi, jeudi.
Hollande et Fabius saluent le geste papal
Avant même sa parution, il a été critiqué par certains conservateurs américains catholiques et climatosceptiques. Rick Santorum, candidat à la primaire républicaine, a même conseillé à François de « laisser la science aux scientifiques ». Lors de la conférence de presse, le cardinal Peter Turkson, président du conseil pontifical justice et paix, qui a beaucoup contribué au texte, a renvoyé les politiques… à leur insuffisance scientifique.
Les hôtes du prochain sommet climatique n’ont pas tardé à manifester leur satisfaction. Dans un message, le président François Hollande a « formé le vœu » que la « voix particulière » du pape François soit « entendue sur tous les continents, au-delà des seuls croyants » et il a « salué cet appel à l’opinion publique mondiale comme à ses gouvernants ».
Un tweet de Laurent Fabius, le ministre français des affaires étrangères, a salué dans l’encyclique « un geste sans précédent » et « une contribution importante pour le succès de la COP21 », le sommet de décembre.
« Le changement climatique n’est plus seulement une question scientifique mais morale et éthique », s’est d’autre part réjoui Yolanda Kakabadse, la présidente du Fonds mondial pour la nature (WWF). L’encyclique est « un rappel austère » du lien entre le changement climatique et la pauvreté, a jugé le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim. C’est « un coup de clairon » qui devrait conduire les dirigeants à un accord climatique « fort et durable », a souhaité Christiana Figueres, chargée du climat pour les Nations unies.