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Frigide Barjot, porte-parole de La Manif pour tous, a fait savoir vendredi à 14 heures qu'"en l'état actuel des choses", elle ne pensait pas se rendre à la manifestation contre le mariage homosexuel organisée dimanche, tout en précisant que sa décision n'était pas "définitive". "Aujourd'hui, je n'ai pas de garantie de ne pas être empêchée de parler", explique-t-elle, ajoutant que des "gens violents" lui ont fait parvenir des SMS disant : "Tu ne parleras pas d'union civile". Frigide Barjot estime en effet qu'il faudrait remplacer la loi Taubira par un contrat d'union civile n'ouvrant pas le droit à l'adoption. Une position qui divise le collectif Manif pour tous.
Plus tôt dans la journée, celle qui avait déjà fait part de ses hésitations, avait pourtant déclaré au Monde qu'elle devrait finalement rejoindre l'un des trois cortèges prévus dans les rues de la capitale. "Je ne veux pas laisser des centaines de milliers de personnes dans un sentiment d'abandon", nous avait-elle dit. "Mais, comme nous ne voulons pas être des ferments de violence, si notre présence et notre point de vue suscitent des perturbations, si notre liberté de parole sur le podium n'est pas respectée, nous ne resterons pas", avaitt-elle précisé, inquiète que La Manif pour tous (LMPT) ne se transforme en "manif de la droite dure".
Recevant depuis plusieurs semaines des menaces de la part de groupuscules d'extrême droite, Frigide Barjot, l'une des principales initiatrices du mouvement de contestation lancé il y a neuf mois, avait obtenu jeudi une protection officielle. "Il y a plusieurs personnalités qui reçoivent des menaces. A la fois ceux qui sont favorables au mariage pour tous et, depuis quelques jours, nous constatons qu'un certain nombre de personnes comme Frigide Barjot reçoivent des menaces", a affirmé Manuel Valls, vendredi matin sur France Info. Le ministre de l'intérieur a déclaré envisager une "interdiction" du Printemps français. Cette association en pointe dans la contestation a désigné dans un communiqué des "cibles".
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UNE TONALITÉ DURE
Mais au-delà des questions de sécurité, ce sont aussi des dissensions au sein du collectif Manif pour tous qui ont suscité les tensions de ces dernières semaines. Mises stratégiquement sous le boisseau depuis le début de la mobilisation, les différences de points de vue au sein du collectif ont resurgi après le vote de la loi, le 23 avril. Frigide Barjot a alors remis en avant la nécessité de remplacer la loi Taubira par un contrat d'union civile n'ouvrant pas le droit à l'adoption. "C'est la seule alternative apaisée à la loi", selon elle.
Cette approche est contestée avec force par une partie plus conservatrice du collectif, axée sur le retrait pur et simple de la loi, et qui a adopté ces derniers jours une tonalité dure. L'un des groupes régionaux les plus actifs dans ce sens est celui de Lyon. A tel point que les partisans de Frigide Barjot y sont interdits de réunion. Rien d'étonnant puisqu'il est sous la pression constante du Printemps français local, composé de militants d'extrême droite dure issu des Jeunesses nationalistes, de l'Œuvre française (pétainistes), de Rebeyne (la branche lyonnaise du Bloc identitaire). Les policiers estiment que la mouvance réunit entre 100 et 200 personnes.
"PRÊTE À PASSER SOUS LE CHAR"
L'aile conservatrice de La Manif pour tous a caressé le projet ces derniers temps d'évincer Frigide Barjot pour la remplacer par une personnalité issue de ses rangs. Les durs lyonnais avaient même leur candidat qui a fait long feu.
L'aile conservatrice semble vouloir, au final, porter son choix sur la présidente de La Manif pour tous, Ludovine de La Rochère. Cette ex-directrice de la communication de la Fondation Lejeune s'est ainsi déclarée "prête à passer sous le char de Tiananmen" pour s'opposer à la loi Taubira dans un entretien au site d'extrême droite Nouvelles de France, le 22 mai. Son prédécesseur à la tête de l'organisation, Guillaume de Prémare, insiste : "Depuis le début, le dénominateur commun de La Manif pour tous, c'est le retrait de la loi ; sa vocation est d'être un mouvement d'opposition."
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DE 200 000 À 1 MILLION DE PERSONNES
Les organisateurs annoncent "plus d'1 million de personnes" ; le ministère de l'intérieur table sur un "essoufflement" du mouvement et attend "quelque 200 000 à 300 000 manifestants". Parmi eux, entre 300 et 500 personnes issues des groupuscules d'extrême droite pourraient tenter de perturber le défilé, selon des sources policières, un chiffre suffisant pour faire dégénérer une manifestation. Toute "la petite mosaïque habituelle" sera représentée. Elle s'est déjà fortement mobilisée lors des précédentes actions.
Place Beauvau, on estime que ces mouvements étaient présents sur les trois-quarts de la quarantaine de manifestations qui ont eu lieu depuis janvier. La préfecture de police a prévu un dispositif de policiers en civils plus important au sein du défilé.
Les radicaux, sous la houlette des Lyonnais, projettent de faire des actions "coup-de-poing", dimanche, contre les journalistes, les forces de l'ordre et Frigide Barjot. Selon des sources policières, ils pourraient faire parler d'eux dès samedi.