La Rochelle, envoyés spéciaux. Rien ne vaut l'humour pour détendre l'atmosphère. En privé, Jean-Marc Ayrault aime à citer Andy Warhol à propos de son gouvernement : "chacun aura droit à quinze minutes de célébrité", lâche le premier ministre, sauf que "pour certains, ce n'est pas une fois dans leur vie, c'est le plus souvent possible".
Alors qu'en cette rentrée, le Parti socialiste, réuni à La Rochelle pour son université d'été, est plutôt sage, c'est du gouvernement que sont venues ces derniers jours les expressions intempestives. De Pierre Moscovici qui s'inquiète du "ras-le-bol fiscal" des Français à Manuel Valls et Christiane Taubira qui ont étalé publiquement leurs divergences sur la réforme de la procédure pénale, en passant par Philippe Martin qui a annoncé sans précaution une future taxe carbone, il était temps que cela cesse. "Il y a de la pédagogie à faire, il faut que les Français comprennent ce qu'on fait", dit-on à Matignon. Ce souci d'explication devrait être au coeur du discours de clôture que prononcera dimanche à La Rochelle Jean-Marc Ayrault.
Sans attendre de se faire publiquement tancer, le ministre de l'intérieur et la garde des sceaux ont préféré régler tout seuls leurs différends. Samedi en fin d'après-midi, fortement applaudie par les militants socialistes, Mme Taubira a annoncé la création d'une "peine de probation" hors prison, qui s'appellera "contrainte pénale". Ce faisant, elle a dévoilé une large part du contenu de la future réforme qui officiellement ne sera arbitrée que... le 30 août. Quelques heures plus tôt, M. Valls avait tenu à aplanir les tensions avec la place Vendôme. "La justice et l'intérieur marchent main dans la main", avait-il affirmé, en ajoutant encore : "Christiane Taubira est une amie".
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Pas sûr que Matignon ait goûté la précipitation de la garde des sceaux. Il aurait été plus logique que ce soit le premier ministre qui se réserve les annonces et rassure les Français en jurant qu'"il n'y a pas deux lignes au gouvernement, les angéliques et les laxistes", comme l'expliquent ses services.
"DOSER AU PLUS PRÈS" LES EFFORTS FISCAUX
Du moins le terrain pénal est-il déminé. Reste l'épineuse question des impôts. La rue de Varenne, pas plus que l'Elysée, n'ont apprécié l'expression de "ras-le-bol fiscal" utilisée cette semaine par le ministre de l'économie. Jean-Marc Ayrault devrait rappeler dimanche que les Français ont besoin de "compréhension" et que les ministres ont intérêt à peser leurs expressions. "Ne faisant pas croire que nous sommes arrivés au terme de l'effort de redressement des finances publiques, ce serait malhonnête de dire le contraire", dit-on dans son entourage.
En même temps, le premier ministre, comme le président de la république, sont soucieux de "doser au plus près et le plus finement possible" les efforts fiscaux qui vont être demandés dans les prochaines semaines. Le gouvernement cherche 6 milliards d'euros pour boucler le budget de 2014 en sus de la réforme des retraites qu'il s'apprête à engager.
Sur ce dernier point, il hésite toujours entre une hausse de la CSG ou une augmentation des cotisations sociales pour en financer une partie. S'il est sûr que tous - entreprises, retraités, salariés - seront mis à contribution, le souci est d'éviter un matraquage qui compromettrait le redémarrage timide de la croissance. "Tout ce qui peut encore réduire les dépenses et l'effort fiscal, nous le recherchons", a donné comme consigne le premier ministre à ses équipes. Mais le retour de la confiance dépendra aussi beaucoup de la capacité des ministres à maîtriser leurs "quinze minutes de célébrité".