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    Espagne : le conducteur "parlait au téléphone" au moment de l'accident

    Le Monde.fr avec AFP | <time datetime="2013-07-30T18:15:50+02:00" itemprop="datePublished">30.07.2013 à 18h15</time> • Mis à jour le <time datetime="2013-07-30T18:35:13+02:00" itemprop="dateModified">30.07.2013 à 18h35</time>

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    Un train a déraillé le mercredi 24 juillet, à Saint-Jacques-de-Compostelle, dans le nord-ouest de l'Espagne. L'un des conducteurs a été placé en garde à vue et le dernier bilan fait état de 80 morts après l'accident, dont un Français, identifié vendredi 26 juillet.

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    Les conditions du déraillement du train près de Saint-Jacques de Compostelle le 24 juillet commencent à s'éclaircir. Après analyse des premières informations fournies par les boîtes noires du train accidenté, le tribunal supérieur de justice de Galice a annoncé mardi 30 juillet qu'il roulait à 153 kilomètres/heure au moment où il a déraillé, faisant 79 morts.

    "Dans les kilomètres ayant précédé le lieu de l'accident, le train roulait à 192 kilomètres/heure", a ajouté le tribunal dans un communiqué, indiquant "qu'un frein avait été activé quelques secondes avant l'accident".

    Alors que le train a déraillé à 4 kilomètres environ de l'arrivée en gare de Saint-Jacques, le gestionnaire public du réseau, ADIF, a rappelé mardi que la ligne, à grande vitesse jusque-là, redevenait une voie conventionnelle à l'approche de la ville.  "Comme les vitesses sont tellement élevées sur la ligne TGV, pour pouvoir freiner facilement et correctement, dans des conditions de sécurité, il faut commencer à freiner plusieurs kilomètres avant d'arriver à la gare", a précisé ADIF, et "le train doit réduire progressivement sa vitesse".

    Lire : En Galice, "il y avait des gens mutilés, c'était l'horreur"

    "IL SEMBLAIT CONSULTER UN PLAN"

    D'autre part, le tribunal a révélé que, selon l'enregistrement audio des boîtes noires, "le conducteur, au moment de l'accident, parlait au téléphone avec un membre du personnel de la Renfe, semblant être un contrôleur", qui lui donnait des indications et "il semble qu'il consultait un plan ou un document similaire en papier".

    Lire (édition abonnés) : En Espagne, le conducteur du train accidenté reconnaît sa "distraction"

    La responsabilité du conducteur avait été mise en cause dès le lendemain de l'accident. Ce dernier aurait également reconnu circuler à 190 kilomètres par heure sur ce tronçon limité à 80. Francisco José Garzon Amo, 52 ans, a été mis en examen dimanche, inculpé pour "79 faits d'homicide par imprudence". Il a cependant été laissé en liberté, les magistrats ayant estimé qu'il n'existait pas "de risque de fuite ni de destruction de preuves".

    Placé sous contrôle judiciaire, il devra se présenter toutes les semaines au tribunal, ne pourra pas quitter le territoire espagnol pendant six mois sans autorisation judiciaire et sa licence de conducteur de train lui a été retirée pour la même durée, a précisé le tribunal.

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  • L’ADDITION – Combien coûterait un Big Mac si McDo doublait ses salaires ?

    (AP Photo/McDonald's Corp.)

    Qu'adviendrait-il au géant du fast-food McDonald's s'il décidait subitement de doubler le salaire de ses employés ? Pas grand-chose, à en croire une étude d'un chercheur de l'université du Kansas, citée par le Huffington Post américain.

    Selon cette étude, un doublement des revenus des employés de l'enseigne – du salarié de base gagnant le salaire minimum (7,25 dollars de l'heure, ou 5,40 euros) au PDG Donald Thompson (8,75 millions de dollars en 2012) – aurait pour conséquence une augmentation du prix du Big Mac de seulement 68 cents (0,50 euro). Le Big Mac passerait ainsi de 3,99 à 4,67 dollars (3,50 euros), affirme l'auteur de l'étude, Arnobio Morelix.

    Cette étude sort au moment où des employés de McDo mènent des grèves à travers les Etats-Unis pour réclamer un salaire minimum de 15 dollars de l'heure (11,30 euros). Son auteur a simplement consulté le rapport annuel 2012 de l'enseigne et constaté que seuls 17,1 % des revenus du géant partaient dans les salaires et les avantages sociaux de ses quelque 500 000 employés américains.

    Selon le New York Times, qui revient dans un article intitulé "Fast Food, Low Pay" sur la grève dans 200 fast-foods new-yorkais en novembre dernier, les salariés qui y gagnent le salaire minimum (7,25 dollars de l'heure) ont un pouvoir d'achat inférieur à celui de leurs collègues des années 50.


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  • Enquête 27/07/2013 à 12h23

    Le fret ferroviaire mal en point :

    le rêve d’une France propre abandonné

    Elsa Fayner | Journaliste Rue89

    L’un des objectifs du Grenelle de l’environnement, favoriser le transport de marchandises par train plutôt que par camion, est abandonné en catimini. Enquête.

    En mai dernier, la SNCF annonçait avoir retrouvé 63 des 150 wagons qu’elle avait égarés un peu partout en France. Il s’agissait de wagons vides de transport de marchandise – de fret –, qui rouillaient aux bords des voies, parfois à la sortie d’une usine, tandis que les rails qui menaient là avaient été retirés.

    Sous l’article, un riverain avait laissé un commentaire qui a attiré mon attention :

    « En mars 2006, sur un salon où j’exposais, j’ai été contacté par deux stagiaires du service fret de la SNCF, qui m’ont fait remplir un questionnaire sur mes besoins de transport. Ayant régulièrement de la marchandise à transporter de l’Isère au Nord, je me suis montré intéressé. »

    En septembre 2009 deux commerciaux sont venus lui rendre visite, poursuit l’internaute :

    « [Ils m’ont expliqué] que le fret SNCF ne fonctionnait qu’avec des trains complets : il n’était pas possible de ne faire voyager qu’un wagon. Ils étaient désolés, mais c’était comme ça. Ils m’ont conseillé de passer par la route plutôt que par le train pour aussi peu de marchandises (une semi-remorque quand même à chaque fois). »

    Sachant que la SNCF possède à la fois, via sa branche SNCF Geodis, des trains et des camions pour transporter les marchandises, il y a de quoi s’étonner. L’entreprise privilégierait-elle l’asphalte ? Tiendrait-elle un double discours : vert d’un côté, gris de l’autre ? Le transport ferroviaire étant « le mode de transport le plus adapté à toute politique de développement durable », rappelle [PDF] la SNCF elle-même.

    « Le plus de marchandise possible par le rail »

    En 2009, environ 14% du fret empruntait le rail. Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre engendrées par la route, le Grenelle de l’environnement fixait, en 2007, un objectif de 25% en 2022 [PDF]. L’Etat déboursait 7 milliards d’euros. La SNCF mettait en place « un nouveau transport écologique de marchandises ».

    Le vieux rêve d’une France propre sillonnée par des trains à grande vitesse d’usines high-tech en plateformes multimodales allait enfin se réaliser. Pub à l’appui :

    « Une solution s’impose : transporter le plus de marchandise possible par le rail. Le rail, une nouvelle route pour la France. »

     

    Et pourtant. Si on s’en tient à Fret SNCF, la filiale historique de transport ferroviaire de SNCF Geodis est passé de 55 milliards de tonnes kilomètre transportées en 2000 à 21,1 milliards en 2012. Il faut dire que la crise a sévi, notamment dans les industries, grosses clientes.

    Toutefois, pendant ce temps, l’activité routière de la SNCF se développait : le chiffre d’affaires de Geodis BM est passé de 600 millions d’euros [PDF] en 2007 à 827,6 millions d’euros en 2012.


    Transport intérieur de marchandise, tableaux de l’économie française 2013, Insee (Capture d’écran)

    Les petites entreprises isolées, terminé

    Près de Pau (Pyrénées-Atlantiques), l’entreprise Lapassade achète du chêne et du hêtre dans les Vosges, au nord de Paris, et dans la région d’Alençon (Orne), pour en faire des fûts destiné au vin, et des planches. Jusqu’à récemment, elle faisait venir ces bois bruts par le train. Ils étaient chargés et déchargés dans des petites gares de proximité, déclarées « gares bois ».

    Lapassade pouvait remplir un, deux, trois wagons. D’autres entreprises remplissaient d’autres wagons. Et, au fur et à mesure, un train était constitué. On parlait de « wagons isolés ». Puis « il a fallu faire des trains complets », se souvient le dirigeant. Un train entier pour l’entreprise. Ça fait cher.

    Les wagons isolés se sont en effet vus chargés de tous les maux par la SNCF quand le fret a commencé à mal aller. Les rapports se sont multipliés, celui de 2009 s’est montré particulièrement clair : le service de wagon isolé ne serait pas économiquement pertinent face à la route « sur une large majorité de trafics » :

    « L’effondrement des trafics de 40% depuis début 2009 a fait augmenter le coût moyen par wagon de 70%. Pour que cette activité soit rentable pour la SNCF, il faudrait que ses volumes augmentent de 65%. »

    « La situation des wagons isolés était devenu intenable », confirme Ghislain De Rugy, contacté par téléphone. L’homme dirige chez SNCF Geodis le service multi-lots multi-clients. C’est ainsi qu’a été renommée l’offre wagon isolé en 2011. Alors qu’elle déclinait bel et bien :

    • en 2008, 500 000 wagons isolés circulaient ;
    • contre 200 000 aujourd’hui.

    Les petites gares de fret ont fermé

    La gare la plus proche de l’entreprise Lapassade a cessé l’activité de fret vers 2002, celle qui se trouvait à 20 km deux ans après, et celle qui se situait à 40 km quelques années plus tard. A l’autre bout de la chaîne, dans les Vosges, les « gares bois » ont disparu elles aussi une à une.

    Les hêtres et les chênes ont dû prendre la route. « Pour nous, ça n’est pas une économie, c’est une nécessité », déplore le dirigeant. Par le train, le mètre cube coûtait entre 80 et 85 euros – sans compter le chargement et le chargement –, quand les bois sont vendus entre 300 et 350 euros le mètre cube. Les prix sont comparables par la route pour l’entreprise, qui fait appel à un transporteur spécialisé.

    Alors, pour « éviter des coûts de transports devenus prohibitifs », Lapassade a décidé d’ouvrir une usine de présciage dans les Vosges, pour transporter des bois déjà transformés. La PME n’est pas la seule à avoir dû s’adapter : en 2007, la fermeture de 262 gares de fret était annoncée.

    « Sur les petites distances, dur de lutter »

    L’entrepreneur béarnais n’est pas le seul à s’en plaindre. La Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME), et la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) se sont énervées dans une tribune commune, publiée en avril 2013 :

    « Le fret ferroviaire va mal en France, au point de devenir un handicap logistique pour nos entreprises et nos activités. En dix ans, l’activité ferroviaire de SNCF Geodis, en fort déficit, a chuté de moitié. La percée des opérateurs privés ne compense pas ce recul.

    Malgré la crise, la demande de rail est forte et ne demande qu’à croître. C’est l’offre qui manque, au point que des chargeurs qui ont investi dans le rail sont contraints d’y renoncer. Des installations territoriales sont détruites, et avec elles, autant d’accès à l’Europe ferroviaire susceptibles d’attirer des activités. »

    Les pouvoirs publics et la SNCF se voient reprocher de ne pas avoir engagé les réformes nécessaires pour pouvoir s’organiser et affronter la concurrence, suite à la libéralisation du secteur. Résultat, si le fret ferroviaire repart à la hausse depuis 2009, cette croissance provient des nouveaux entrants – Euro Cargo Rail (filiale de la Deutsche Bahn), Europorte, Colas Rail –, qui occupent désormais 21,4% du marché en France, comme le rapportent Les Echos.

    Mais c’est aussi face aux camions que les rails ont du mal à concourir. Ghislain De Rugy confirme :

    « Sur les petites distances, il est dur de lutter contre la route. »

    « Beaucoup de retard » sur les infrastructures

    Pourtant, explique le directeur « Multi-Lots Multi-Clients », la SNCF a « fait des efforts » pour améliorer « la fiabilité, les délais, le suivi ». Des retards et une trop grande rigidité lui étaient reprochés. Aujourd’hui :

    • des pénalités ont été prévues pour les retards ;
    • la SNCF avait demandé à ses clients de prendre des engagements annuels de trafics, confirmés par des « pré commandes » passées de trois à quatre mois à l’avance, elle a abaissé ce délais à un mois.

    Ghislain De Rugy veut y croire :

    « Les contraintes du ferroviaire sont toujours là et nos clients les ont intégrées. Dès que nous nous engageons sur le délais, le confort, la garantie, les clients sont intéressés, même si le service est plus cher. Certains ont besoin par exemple d’une extrême fiabilité. »

    En revanche, le directeur reconnaît « beaucoup de retard » sur les infrastructures. Le cabinet d’experts Transversales parlait [PDF], pour la Haute-Normandie, d’infrastructure « vieillissantes », par exemple. Alors, aujourd’hui, la SNCF multiplie les travaux sur les voies.

    Pas facile, dans ces conditions, d’être ponctuel, réactif et flexible. D’autant moins qu’en face les prix des transports routiers sont tirés vers le bas par des transporteurs qui sous-traitent au moins offrant et multiplient les pratiques abusives.

    Bref, pour Jean-Marc Veaux de la CFDT, secrétaire du comité d’entreprise européen de Geodis, les clients vont spontanément vers la route aujourd’hui :

    « Le développement du fret par la route se fait parce que Fret SNCF n’est pas du tout équipé pour transporter les marchandises dans les délais que les clients demandent. C’est un problème d’organisation, et d’infrastructures. »

    Le double discours de l’Etat

    Le gouvernement a dévoilé fin mai 2013 son projet de réforme du système ferroviaire. Celle-ci doit entrer en en application au 1er janvier 2015. Mais, pour l’instant, le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier assure qu’il ne se « lancera pas dans un grand plan de fret. Les précédents se sont traduits par des résultats épouvantables », rapporte L’Usine nouvelle.

    Que compte faire l’Etat pour un fret ferroviaire mal en point ? Pour le moment, il encourage surtout la route :

    • il a autorisé la circulation depuis le 1er janvier 2013 de l’énorme 44 tonnes (une étude établit que, si le 44 tonnes est autorisé dans la zone euro, 35% du fret qui circule actuellement sur les rails retrouverait la route) ;
    • le ministre des Transports Frédéric Cuvillier a annoncé jeudi 28 février 2013 le report au 1er octobre de l’entrée en vigueur de l’écotaxe poids-lourds, initialement prévue pour le 20 juillet (et il question d’un nouveau retard) ;
    • il n’y a toujours pas d’harmonisation européenne sur la taxe carbone.
    Voir le document

    (Fichier PDF)

    Le comité central d’entreprise de la SNCF a fait part de ses préoccupations quant à la pérennité des activités de Fret SNCF et commandé un rapport à un cabinet d’experts, Sécafi. Le rapport a été remis en mai 2013 (lire la synthèse ci-contre).

    Jeudi 27 juin, les élus du comité central d’entreprise ont prévu de présenter les recommandations aux dirigeants et aux membres du gouvernement présents au conseil d’administration de la SNCF.


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  • 119 euros 24/07/2013 à 17h49

    Qui est Rachid Nekkaz, celui qui paie

    les amendes des femmes voilées ?

    Tiphaine Le Liboux | Journaliste

    Promoteur immobilier controversé aux airs de BHL, ex-candidat aux législatives, Rachid Nekkaz se dit contre le niqab, mais pour la liberté de circuler avec.

    Rachid Nekkaz à Paris le 3 janvier 2012 (Francois Mori/AP/SIPA)

    661 amendes ont été dressées depuis la loi de 2011 interdisant le port du voile intégral dans l’espace public. Rachid Nekkaz dit en avoir payé 653. La dernière, c’était celle de Liala, mardi 23 juillet. Il s’est déplacé en personne, pour aller déposer un chèque de 119 € à la trésorerie d’Evry. « Chez Manuel Valls », nous dit-il au téléphone, d’une voix souriante.

    Trois jours après les émeutes de Trappes, « l’homme qui paie les amendes des femmes en niqab » n’est pas mécontent de son nouveau pied de nez. Liala a contacté Rachid Nekkaz, directement, « en passant par le site de mon association Touche pas à ma constitution », assure-t-il.

    Pour qu’il sorte le carnet de chèques, la jeune femme a dû lui envoyer « un petit courrier, s’engageant à ne pas faire preuve de violence envers des policiers ».

    Une majorité de converties

    Rachid Nekkaz, qui paie aussi pour les femmes belges – seul pays avec la France et la Turquie à interdire le port du niqab –, a dit non une seule fois. A une convertie de Bruxelles, verbalisée quatre fois d’affilée, et affiliée au groupe extrémiste Sharia for Belgium. Un cas loin d’être représentatif selon lui :

    « Les femmes qui portent le niqab sont des femmes normales, aux parcours de vie très différents. »

    Un tiers de celles qu’il a rencontrées sont des célibataires et la majorité est convertie « Il y a même une Linda Le Pen qui a fait appel à moi », rigole t-il.

    « Je m’oppose au niqab »

    Sa femme à lui est une américaine, et catholique. Il le répète partout, histoire de bien mettre les choses au clair :

    « Je suis un musulman laïc, opposé au niqab. Ce que je défends, c’est la liberté pour les femmes de le porter ou non. »

    Pour lui, il s’agit de défendre une liberté fondamentale : pouvoir se déplacer dans la rue. C’est sur ce principe qu’il s’est appuyé pour déposer un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, afin de faire invalider la loi de 2011.

    Pour ce militant PS, qui assure être membre de la fédération du XVIe arrondissement (le PS, interrogé par Rue89 dit que non), ce serait plus simple si le gouvernement avait le « courage » d’amender la loi :

    « Il faut annuler l’interdiction de porter le niqab dans les espaces publics ouverts. Sinon, dans les mois à venir on va être confrontés aux mêmes débordements qu’à Trappes. »

    En attendant, il est persuadé qu’en payant les amendes, il « neutralise sur le terrain » la loi de 2011.

    De gros airs de BHL

    Ça lui a coûté 119 000 euros, frais d’avocat compris. Mais Rachid Nekkaz ne serait pas à ça près. On le dit millionnaire. Il esquive :

    « J’ai suffisamment de biens immobiliers pour pouvoir payer des amendes pendant des années. »

    A la sortie des trésories publiques, il pose souvent avec une jeune femme en niqab, le récépissé de la contravention en main. Sourire assuré, crinière grise, costume noir et chemise blanche ouverte, on croit voir le sosie de BHL.

    Comme lui, Rachid Nekkaz, est prêt à s’engager pour toutes « les atteintes faites à la liberté et aux droits de l’homme ». En Chine par exemple, où il est allé rendre visite à des prisonniers politiques ouïghours, la minorité musulmane persécutée.

    Rachid Nekkaz partage aussi ce souci de s’engager pour les causes qui sont au centre des débats médiatiques. En 2010, alors que Brice Hortefeux expulse massivement de leur campements les Roms, Rachid Nekkaz déclare vouloir acheter en Auvergne, sur les terres de l’ex-ministre de l’Identité nationale, un terrain de seize hectares.

    Il avait prévu de louer cette « République des Roms » un euro symbolique. Mais « ça n’a rien donné concrètement », explique Saimir Mile, le président de l’association « La voix des Roms » :

    « Je ne sais pas s’il était vraiment prêt à signer le chèque, mais quand nous nous sommes rencontrés, je lui ai expliqué que cette proposition était irréalisable.

    Les Roms sont en France pour gagner leur vie, pas pour prendre des vacances. Personne n’avait envie d’aller s’installer loin de tout, au fin fond des montagnes d’Auvergne. »

    « Il aurait pu avoir une carrière à la Tapie »

    Depuis, Saimir Mile n’a plus revu Rachid Nekkaz. Pour lui, c’est un « homme moderne, qui a très bien compris l’importance des coups médiatiques ».

    « Son fonds de commerce, c’est l’image et la communication », confirme son ami Moussa Khedimellah, sociologue de l’islam et des quartiers populaires :

    « Nekkaz est un lanceur d’alerte. Il aurait pu avoir une carrière politique à la Tapie, mais il a préféré utiliser son argent pour éveiller les consciences. »

    Il ajoute :

    « C’est un amoureux de la France, engagé depuis plus de vingt ans du côté des pauvres. Sa démarche est à la croisée de celles de Coluche et de Stéphane Hessel. »

    Marchand de sommeil ou bienfaiteur ?

    Rachid Nekkaz est né en 1972 à Choisy-Le-Roi. Neuf frères et soeurs, des parents immigrés algériens et analphabètes. Leur fils fait de la philo à la Sorbonne, avant de s’engouffrer dans la bulle Internet, en créant une start-up à la fin des années 90.

    Il la revend « bien » en 2000, et investit sa fortune dans l’immobilier. Depuis, le riche propriétaire est soupçonné d’être un marchand de sommeil.

    Rachid Nekkaz porte plainte pour diffamation, expliquant loger ceux qui n’ont pas accès aux logements sociaux :

    « Vous croyez qu’ayant vécu 25 ans dans une cité de transit totalement délabrée, je vais profiter de la misère des gens ? J’essaie d’aider ceux qui en ont besoin.

    Mais de toutes façons en France, dès que vous faites quelque chose de bien on essaie de vous bloquer. Surtout, si vous avez de l’argent et que vous vous appelez Rachid ou Mamadou, vous êtes tout de suite suspect. »

    C’est aussi comme ça qu’il interprète ses échecs politiques. Les 500 parrainages pour être candidat à la présidentielle de 2007 jamais obtenus par exemple. Une histoire « bizarre », qui n’a jamais été éclaircie, raconte Moussa Khedimellah :

    « A quelques mois du dépôt des signatures, sa maison a été cambriolée et son ordinateur – où toutes les promesses de parrainages étaient enregistrées – a disparu. »

    « Nous n’avons pas de lien avec ce monsieur »

    Rachid Nekkaz essaie ensuite, sans succès, de se présenter aux primaires PS de 2011. Candidat à l’élection législative partielle de Villeneuve-sur-Lot, chez Cahuzac, en juin 2013, il finit dernier avec 0% des voix.

    Même dans les quartiers, les scores de celui qui s’était auto-proclamé « candidat des banlieues » sont catastrophiques. Candidat dans la septième circonscription de Seine-Saint-Denis aux législatives de 2007, il obtient 156 voix (0,56% des voix exprimées).

    Les collectifs qui contestent la loi de 2011 sur le niqab ne veulent pas non plus entendre parler de lui. A l’évocation de son nom, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) coupe court :

    « Nous n’avons pas de lien avec ce monsieur. »

    Abdelaziz Chaambi, le président de la Coordination contre l’islamophobie (CRI) préférerait qu’il rejoigne les initiatives existantes :

    « Son combat serait plus crédible et plus efficace. C’est bien de jeter l’argent par les fenêtres, ça permet de se faire sa pub, mais ça n’est pas suffisant. »

    Le 14 juillet, il demande à ne plus être français

    Mohamed Mechmache, le président de l’Association collectif liberté égalité fraternité ensemble unis (ACLEFEU), est du même avis :

    « On ne peut pas arriver sur des terrains où des gens luttent depuis 20 ou 30 ans juste parce qu’on a de l’argent. Nous, on se bat contre les amalgames et les exclusions avec les outils de la citoyenneté, on a pas les moyens de payer des amendes. »

    Moussa Khedimellah propose une autre interprétation :

    « Rachid a toujours voulu faire différemment, mais quand on est iconoclaste, on en paie le prix. »

    Il en fait un symbole de cette génération « extra-européenne qui a du potentiel mais à qui la France n’a pas fait de place ». L’intéressé est en tout cas bien décidé à la quitter.

    Le 14 juillet il a demandé la déchéance de sa nationalité. Cela devrait aussi lui permettre de mener à bien son prochain combat : il est candidat à l’élection présidentielle algérienne de 2014. Sa première promesse de campagne : réserver le poste de vice-président à une femme.


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  • Enquête 29/07/2013 à 18h29

    Derrière l’échec de l’Europride de Marseille,

    un parfum de favoritisme

    Mourad Guichard | Journaliste

    Vue des participants de l’Europride 2013 à Marseille, le 20 juillet 2013 (Claude Paris/AP/SIPA)

    L’Europride 2013 de Marseille, dont tous les observateurs déplorent le bilan calamiteux (voir Télérama, France Info ou encore La Provence), a-t-elle servi de potentielle tirelire à un proche de Jean-Claude Gaudin, le maire UMP de la ville ?

    C’est ce que dénonce un ancien cadre de la Lesbian and Gay Parade Marseille, l’association organisatrice de l’événement :

    « Le message était on ne peut plus clair. Si nous souhaitions une subvention, elle passait par un contrat avec le prestataire de leur choix, dans ce cas précis SC Conseils, la boîte de com’ de Sébastien Chenu. »

    « Dans l’intérêt des organisateurs »


    Sébastien Chenu (@sebchenu sur Twitter)

    Dans une série d’e-mails échangés fin 2012 entre les organisateurs de l’Europride, le cabinet de Jean-Claude Gaudin et Sébastien Chenu, il apparaît effectivement qu’une mise en relation a bien été effectuée. Mais l’intéressé dément tout favoritisme.

    « C’est complètement farfelu et tiré par les cheveux. C’est moi qui ai demandé à mettre mon expérience à leur service, et oui, la mairie m’a transmis les coordonnées des organisateurs. »

    A la mairie de Marseille, un cadre « événementiel » reconnaît cette « mise en relation », mais assure que « c’est dans l’intérêt des organisateurs ».

    Coïncidence troublante : la création de l’agence SC Conseils a opportunément eu lieu le 5 octobre 2012 avec un capital de 200 euros, comme l’indique le site Societe.com. Soit pile au moment où ont commencé les discussions autour de ce contrat.


    Capture d’écran de la fiche de SC Conseils sur Societe.com (Societe.com)

    Dans une première « proposition d’accompagnement et d’assistance » datée du 31 octobre 2012, Sébastien Chenu place la barre très haut. Il réclame « 60 000 euros HT (hors transports, hébergements) » pour un service minimum n’incluant pas la communication.

    « Cette prestation n’a pas vocation à se substituer à une agence événementielle ou de communication et exclut de fait l’organisation technique et pratique des événements, la démarche partenariats commerciaux, la gestion budgétaire, le Web et les relations internationales. »

    Un parrain acteur de « Plus belle la vie »

    Par e-mail, un « general manager » de la ville insiste de nouveau sur cette nécessité d’obtenir « l’aide d’un professionnel de la communication ».

    « Toutefois, l’aide fournie par la Ville de Marseille va nécessiter d’étayer le dossier [...] afin de présenter l’Europride au prochain conseil municipal. L’aide d’un professionnel de la communication me semble à ce stade nécessaire. »

    La subvention, d’un montant de 100 000 euros, étant tout entière absorbée par le devis de SC Conseils (en comptant les taxes, les transports et hébergements), une négociation s’engage alors entre les différents partenaires. Et Sébastien Chenu consent une diminution de son traitement.

    « L’organisation n’est pas fortunée, nous sommes tombés d’accord pour des factures de 3 500 euros hors taxes et sans les frais, sur cinq mois. »

    Quelques jours après la fin de l’événement, Sébastien Chenu assure n’avoir perçu que deux versements de 3 500 euros.

    « Sincèrement, je pourrais me tourner contre l’organisation, mais c’est une cause qui me tient à cœur. J’ai rempli mon contrat, et même au-delà. »

    Concrètement, le cofondateur de GayLib, mouvement lesbien, gay, bi et trans (LGBT) associé à l’UMP et qui en a claqué la porte en janvier 2013, dit avoir « apporté des témoignages sur le site internet de l’Europride » et obtenu « le parrainage de Laurent Kerusoré, acteur de “Plus belle la vie ” » incarnant un jeune barman gay.

    « C’est une figure emblématique et il habite Marseille. A chacune de ses interviews, il en a parlé pour donner de la visibilité à l’événement. »

    Une explication politique

    Derrière le fiasco de l’Europride 2013, il y a sans doute une guerre interne que se livrent, depuis plusieurs mois, les associations LGBT. Sébastien Chenu s’y dit étranger :

    « Ils ont des histoires internes auxquelles je n’ai rien compris, c’est un panier de crabes impossible. »

    Un autre cadre associatif croit détenir une explication plus politique :

    « Chenu est un proche de Copé et Gaudin, deux opposants au “mariage pour tous”. Alors que d’autres ont claqué la porte, lui reste dans l’espoir d’obtenir une investiture. Ce petit arrangement marseillais aurait pu passer inaperçu s’il n’y avait pas cet aspect du dossier. »

    Actuellement élu à Beauvais, cet ancien collaborateur de Christine Lagarde s’est rapproché de NKM et organise, dans la perspective des municipales 2014, son implantation dans le IIe arrondissement de Paris.


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