• 26 février 2013 - 00H00  lien

     

    Les Victoires de la musique classique fêtent leurs 20 ans tambour battant

    Les Victoires de la musique classique ont célébré lundi soir leurs vingt ans avec une brochette de stars, en direct du nouvel auditorium de Bordeaux, lors d'une émission sans temps mort diffusée sur France 3, France Inter et France Musique.

    Les Victoires de la musique classique ont célébré lundi soir leurs vingt ans avec une brochette de stars, en direct du nouvel auditorium de Bordeaux, lors d'une émission sans temps mort diffusée sur France 3, France Inter et France Musique.

    AFP - Les Victoires de la musique classique ont célébré lundi soir leurs vingt ans avec une brochette de stars, en direct du nouvel auditorium de Bordeaux, lors d'une émission sans temps mort diffusée sur France 3, France Inter et France Musique.

    Les "Victoires" représentent avec quelque 1,2 million de téléspectateurs le plus grand concert de l'année en "prime time" à la télévision, même si l'audience a souffert de la multiplication des chaînes thématiques et de la concurrence d'internet ces dernières années.

    Le spectacle orchestré par l'animateur Louis Laforge et le musicien et producteur Frédéric Lodéon ("Carrefour de Lodéon" sur France Inter) a pris pour cadre cette année l'Auditorium de Bordeaux qui a ouvert ses portes le 31 janvier, avec ses 1.440 places.

    Parmi les stars invitées, le violoniste Renaud Capuçon a interprété avec brio et le sourire au lèvres la Danse hongroise N°5 de Brahms. L'orchestre national Bordeaux Aquitaine, sous la baguette de Kwamé Ryan a lancé la soirée avec le fameux Boléro de Ravel.

    La jeune soprano colorature Sabine Devieilhe, en longue robe bleu nuit, a brillamment grimpé les arpèges de l'air de la reine de la nuit dans la "Flûte enchantée", qu'elle interprètera en mars 2014 à l'Opéra de Paris. Elle a décroché le trophée de "Révélation artiste lyrique".

    "La marche triomphale des trompettes" d''Aïda de Verdi jouée par 9 trompettistes, dont une toute jeune fille de 14 ans, a rendu hommage au grand trompettiste Maurice André, décédé l'an dernier. Sa carrière exceptionnelle -il était mineur de fond à 14 ans- est reconnue dans le monde entier.

    Le ténor italien Vittorio Grigolo a chanté "Una furtiva lagrima" (L'Elixir d'Amour) et la contralto et chef d'orchestre Nathalie Stutzmann a interprété le magnifique "Ombra mai fu" de Haendel, avec son propre orchestre, Orfeo 55.

    La blonde diva américaine Joyce DiDonato, robe rouge vermillon et épaules dénudées, a prêté sa fougue au célèbre air du Barbier de Séville "Una voce poco fa".

    Les séquences, une vingtaine en tout, se succédaient tambour battant, donnant surtout à entendre, avec très peu de commentaires.

    A défaut des soeurs Labèque, qui ont décliné l'invitation, faute de pouvoir choisir leur répertoire, les Victoires ont mis en scène lundi une autre famille musicienne, les Nemtanu, père (Vladimir) et filles (Sarah et Deborah), tous violonistes solo. Le trio a reçu une Victoire d'honneur.

    Ludovic Tézier, un des barytons français les plus recherchés, a décroché la Victoire "artiste lyrique". Né en 1968 à Marseille, Ludovic Tézier s'est notamment distingué dans "Werther" de Massenet. Il chantera dans "Lucia di Lammermoor", "La Bohème" et "La Traviata" dans la prochaine saison de l'Opéra de Paris.

    Le pianiste Alexandre Tharaud a offert au public un joli moment d'intimité avec "The man I love", de Gershwin, extrait de son dernier album "Le Boeuf sur le toit", Victoire du meilleur enregistrement.

    L'album ressuscite l'ambiance du cabaret mythique de Paris, où se sont croisés entre 1922 et 1927 les artistes d'avant-garde (Cocteau, Darius Milhaud, Jean Wiener, Mistinguett, Maurice Chevalier ...).

    C'est là qu'est née l'expression "faire un boeuf", a rappelé le pianiste, qui a invité sur cet album déluré ses amis, comme la chanteuse Juliette et la soprano Natalie Dessay, dans le rôle inédit de ... la trompette!.


    votre commentaire
  • Oscar du meilleur film pour «Argo», Ang Lee meilleur réalisateur pour «L'Odyssée de Pi»

    <time datetime="2013-02-25T07:33:41.497597+01:00" itemprop="datePublished">25 février 2013 à 07:33</time>

    Par AFP

    Daniel Day-Lewis et Jennifer Lawrence repartent avec les trophées de meilleur acteur et actrice, tandis qu'«Amour» de Michael Haneke est sacré meilleur film étranger.

    Daniel Day-Lewis, Jennifer Lawrence, Anne Hathaway et Christoph Waltz, meilleurs acteurs et actrices dans un premier et un second rôle. - Photo Mike Blake. Reuters

    Argo a remporté dimanche l’Oscar du meilleur film, décerné par la Première dame Michelle Obama, lors d’une soirée marquée par le troisième sacre du Britannique Daniel Day-Lewis et le couronnement de Amour pour le film étranger.

    Le grand perdant de la soirée est sans conteste Steven Spielberg, snobé dans la catégorie de meilleur réalisateur, tandis que la Française Emmanuelle Riva, qui fêtait ses 86 ans à Hollywood, n’a pas pu s’imposer dans la catégorie de meilleure actrice, remportée par Jennifer Lawrence pour Happiness Therapy. Aucun film ne s’est détaché du lot, même si L’odyssée de Pi peut revendiquer le plus grand nombre de trophées : réalisation pour Ang Lee, photographie, effets spéciaux et musique.

    Grande première, la victoire d'Argo a été annoncée en direct de la Maison Blanche par la Première dame Michelle Obama, qui s’est exclamée, après avoir ouvert l’enveloppe dorée : «bon choix !». Le film n’a remporté que deux autres statuettes, le scénario adapté et le montage. «Ouahou !» a lancé Ben Affleck visiblement choqué, et qui ne concourait - fait rare, là encore - ni pour la réalisation ni pour l’interprétation du film, où il tient le rôle principal.

    Sans suprise, Daniel Day-Lewis a été récompensé pour son incarnation du 16e président des Etats-Unis dans Lincoln - également lauréat des décors -, devenant le premier comédien de l’histoire des Oscars à remporter trois statuettes pour un rôle principal. L’acteur britannique, âgé de 55 ans et réputé austère, s’est fendu d’une petite blague à l'égard de Meryl Streep, qui lui a remis son trophée.

    «Il y trois ans, nous avons décidé d'échanger (les rôles) car je m'étais engagé à jouer Margaret Thatcher» dans La dame de fer, qui a valu un Oscar à Meryl Streep l’an dernier. «Meryl était le premier choix de Steven (Spielberg) pour Lincoln» a-t-il ajouté devant une salle hilare.

    L’Oscar de la meilleure actrice est allé à la jeune Jennifer Lawrence, 22 ans pour son rôle de veuve instable dans Happiness Therapy. Devant une salle debout - comme pour Daniel Day-Lewis - et visiblement suprise, elle a souhaité «bon anniversaire à Emmanuelle» Riva, sa concurrente d’un soir.

    Ang Lee est pour sa part reparti avec le trophée du meilleur réalisateur, le deuxième de sa carrière après Le secret de Brokeback Mountain en 2005.

    «Merci beaucoup pour cet honneur»

    Comme attendu, Amour, le film en français de Michael Haneke, qui concourait pour l’Autriche, a été sacré meilleur film étranger. «Merci beaucoup pour cet honneur», a-t-il dit en anglais, avant de remercier son équipe. «Je remercie aussi mes deux acteurs, car sans eux je ne serais pas ici», a-t-il ajouté à l’adresse de Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva.

    Anne Hathaway a pour sa part remporté la statuette du second rôle féminin pour sa Fantine de la comédie musicale Les Misérables. «C’est devenu réalité», a-t-elle chuchoté en regardant son trophée, très émue. Les Misérables ont également remporté les trophées techniques de meilleur maquillage et son, tandis que le dernier James Bond Skyfall est reparti avec le meilleur son (ex-aequo) et chanson originale pour la britannique Adele.

    Le premier trophée de la soirée, pour le second rôle masculin, avait été remporté par l’Autrichien Christoph Waltz pour son rôle de chasseur de primes dans Django Unchained, qui a adressé sa «gratitude illimitée» au réalisateur Quentin Tarantino, «créateur de ce monde incroyablement inspirant». Le cinéaste a pour sa part gagné l’Oscar du scénario original - le deuxième de sa carrière après Pulp Fiction.

    Quant à l’Oscar du meilleur long métrage d’animation, il est allé à Rebelle des studios Pixar (Disney), dont le réalisateur Mark Andrews est venu recevoir son trophée en kilt, en écho au thème écossais de son film. Enfin, le Français Alexandre Desplat s’est incliné - pour la cinquième fois - pour la musique originale, remportée par Mychael Danna (L’odyssée de Pi).

    Le présentateur de la soirée, l’acteur et réalisateur de Ted Seth MacFarlane, a ouvert la cérémonie avec une séries de blagues, avant d'être interrompu par William Shatner, le commandant du vaisseau spatial dans la série Star Trek, qui lui a donné, depuis le futur, quelques conseils pour ne pas être «le pire présentateur des Oscars».

    Comme promis, la soirée fait une grande place à la musique, avec notamment deux numéros consacrés aux comédies musicales Chicago et Les Misérables, tandis qu’un hommage aux 50 ans de James Bond au cinéma s’est achevé avec Dame Shirley Bassey venue chanter le titre mythique Goldfinger. A 76 ans, la chanteuse a prouvé en direct qu’elle avait encore une voix capable d'électriser le public - qui lui a réservé une ovation debout.

    Seth MacFarlane a continué à saupoudrer la soirée de ses blagues, notamment en conviant l’ours politiquement incorrect Ted, héros de son film, qui a demandé à son compère Mark Wahlberg, «où aurait lieu l’orgie après la soirée». Après quelques réticences, Mark Wahlberg a laché : «chez Jack Nicholson».


    1 commentaire
  • Florilège biblio-culinaire

     

    Les légumes de "Modernist Cuisine", ed. Taschen

    Tandis que le Salon de l'agriculture ouvrait ses portes ce week-end, le Festival du livre culinaire s'est tenu au Carrousel du Louvre, en toute intimité, du coup. Démonstrations, rencontres, conférences, ouvrages de référence et livres de recettes par centaines... Je suis sidérée par la masse toujours croissante de "cookbooks" publiés chaque année. Malgré la crise, le livre de cuisine semble indétrônable. Mais les ouvrages qui se démarquent à mes yeux contiennent de moins en moins de recettes (aisément concurrencées de nos jours par internet) et de plus en plus d'approches innovantes et personnelles.

    Petit florilège (non-exhaustif et très subjectif) de mes coups de cœur:

    Menu Fretin publie des petits livres maniables et malins, bourrés d'idées, de plats alléchants et de points de vue détonants. A gauche, la collection "menu festin", qui rassemble les menus en 5 plats de grands chefs contemporains, expliqués pas à pas en images et en mots. A droite, la toute nouvelle collection "kawa, petite tasse de café littéraire", qui redonne vie à des textes (courts) sur la gastronomie. 

     

     

    La maison d'édition intello-gourmande Agnès Viénot lance une collection de petits livres intitulée "Les chefs cuisinent la littérature". Un texte, une recette, et de fortes personnalités à la croisée de la plume et du fourneau.  

     

     

     

     

     

     

     

    Fascinée par les chefs créatifs, Catherine Flohic lance aux éditions Argol une série d'ouvrages en format poche. Chacun révèle l'univers d'un chef, essentiellement sous forme d'un entretien intime et passionné, émaillé de belles photos. Premier du lot : Bertrand Grébaut (restaurant Septime). A venir : Alexandre Gauthier, Sven Chartier , Alexandre Bourdas, Jean-Marie Baudic... Sans oublier, dans la même collection "Vivres", les précieux petits ouvrages sur l'Amer (Emmanuel Giraud) ou le Saké (Laurent Feneau).

     

     

     

    Chez l'Epure, maison qui se démarque toujours par son style comme par ses thèmes, on retiendra le cinglant livre de Martine Camillieri, auteur iconoclaste et artiste de la déconsommation qui m'a récemment confié ses souvenirs de soupe, et dénonce ici en images les dérives du nouvel ordre agro-alimentaire mondial. Prix du meilleur "livre durable" au festival.

     

     

     

    Parus fin 2012, les nouveaux indispensables sur la Big Apple, mecque du melting-pot culinaire : le guide "J'aime New York" aux éditions Alain Ducasse, et les "Recettes culte" de Marc Grossman (alias Bob's Kitchen) chez Marabout.

     

    Sans oublier quelques pépites de réflexion : 

     

     

    Aux éditions Phaidon, le célèbre critique gastronomique du Financial Times Nick Lander publie un ouvrage sur l'art du restaurateur (en anglais). Mettant en lumière l'art et l'essence de vingt des plus grands restaurateurs du monde, il réhabilite une profession trop souvent effacée aujourd'hui derrière la toute-puissance du chef. Un hommage mérité.

     

     

     

     

     

    L'érudit culinaire Bénédict Beaugé sortira bientôt Plats du jour aux éditions Métailié, un livre fouillant l'histoire gastronomique et les temps modernes pour explorer le concept de nouveauté en cuisine, ses secrets, ses exigences et ses affres.

     

     

     

    Enfin, je ne peux vous laisser sans faire mention ici d'Edible Selby (paru chez Abrams books en septembre dernier), un ouvrage aussi éblouissant qu'unique. L'artiste photographe Todd Selby pénètre dans l'intimité des cuisiniers, leur univers de travail comme leur espace mental, les images sont sublimes, et la sélection des sujets d'une justesse absolue. 

     Bonnes lectures !

    Camille Labro


    votre commentaire
  • Académie française : ces immortels venus d'ailleurs

    Par Mohammed Aissaoui Publié <time datetime="22-02-2013T06:00:00+02:00;" pubdate="">le 22/02/2013 à 06:00</time>   lien 
    De gauche à droite: François Cheng, Assia Djebar, Jules Hoffmann, Amin Maalouf, François Weyergans.
    De gauche à droite: François Cheng, Assia Djebar, Jules Hoffmann, Amin Maalouf, François Weyergans. Crédits photo : ALAIN JOCARD/AFP, M. ARCHAMBAULT/LE FIGARO, DOMINIQUE GUTEKUNST/PHOTOPQR/L'ALSACE, S. SORIANO/LE FIGARO, F. BOUCHON/LE FIGARO
     

    Avec l'élection de Michael Edwards, l'institution compte aujourd'hui six immortels qui viennent de pays étrangers.

    François Cheng (Chine)

    Il est né en 1929, en Chine, et a effectué toutes ses études, secondaires et universitaires, dans son pays natal. Il a étudié la langue et la littérature françaises. Écrivain et poète, il a reçu le prix André-Malraux, le prix Femina pour son roman Le Dit de Tianyi, ainsi que le grand prix de la francophonie pour l'ensemble de son œuvre, décerné par l'Académie française en 2001. Il a été élu en 2002, au fauteuil de Jacques Bourbon Busset.

    Assia Djebar (Algérie)

    Écrivain et universitaire, elle est née en Algérie. Ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, elle a enseigné l'histoire et la littérature. Cinéaste, elle a été primée au Festival du film de Berlin. Elle a également enseigné la littérature francophone aux États-Unis. Elle a été élue en 2005, au fauteuil de Georges Vedel.

    Jules Hoffmann (Luxembourg)

    Né en 1941 dans le grand-duché de Luxembourg, ce docteur ès sciences naturelles et docteur ès sciences est chercheur au CNRS depuis 1964 et directeur de recherche, classe exceptionnelle, depuis 1990. Son œuvre scientifique est immense. Il a reçu le prix Nobel de physiologie-médecine en 2011. Membre de l'Académie des sciences, il a été élu à l'Académie française en 2012, au fauteuil de Jacqueline de Romilly.

    Amin Maalouf (Liban)

    Né au Liban en 1949, il a étudié l'économie et la sociologie et a travaillé comme grand reporter. Exilé en France, il a continué d'y exercer son métier de journaliste. Il se consacre entièrement à la littérature depuis 1984. En plus de nombreuses récompenses littéraires, il décroche, en 1993, le prix Goncourt pour Le Rocher de Tanios. Pour la Commission européenne, il a présidé un groupe de réflexion sur le multilinguisme. Il a été élu en 2011, au fauteuil de Claude Lévi-Strauss.

    François Weyergans (Belgique)

    François Weyergans est né dans la région de Bruxelles. Prix Goncourt en 2005 et prix Renaudot en 1992, il est également critique littéraire et cinématographique et cinéaste. Il a mis en scène un opéra de Wagner. Il a été élu en 2009, au fauteuil d'Alain Robbe-Grillet.

    Sources: Académie française

    LIRE AUSSI:

    » INTERVIEW - Christophe Carlier: «Michael Edwards est élu trop tard»

    Par Mohammed Aissaoui
    Journaliste Figaro

    votre commentaire
  • Expo : trois clés pour décrypter les toiles énigmatiques de Chagall

    Mis à jour le <time datetime="2013-02-24T14:18:42+01:00" itemprop="dateModified">24/02/2013 | 14:18</time> , publié le <time datetime="2013-02-24T14:18:36+01:00" itemprop="datePublished">24/02/2013 | 14:18    </time>
    lien
    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / RMN / GÉRARD BLOT)
    2

    Il a traversé deux conflits mondiaux, fui le régime soviétique, fait des allers et retours sur le globe pour chercher la paix… et inlassablement témoigné de l’horreur de la guerre dans ses tableaux. Moyshe Segal, alias Marc Chagall (1887-1985), a tenté de sublimer la violence du monde par l’art et le rêve. Ses toiles, marquées par le judaïsme, le folklore russe et sa vie intime, évoquent une forêt de signes incompréhensibles. La grande exposition qui s'est ouverte jeudi 21 février et se tient jusqu’au 21 juillet au musée du Luxembourg, "Chagall, entre guerre et paix", donne l’occasion de décrypter les signaux parfois complexes envoyés par l'artiste.

    1Un juif errant fuyant la guerre

    Les deux conflits mondiaux et le durcissement du régime soviétique vont contraindre plusieurs fois Chagall à l’exil.

    Marc Chagall, "La Guerre", 1943, huile sur toile, 106 x 76 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953, en dépôt au musée d’Art moderne de Céret (Pyrénées-Orientales).

    Marc Chagall, "La Guerre", 1943, huile sur toile, 106 x 76 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953, en dépôt au musée d’Art moderne de Céret (Pyrénées-Orientales).

    (CNAC / RMN)

    Cette toile a été réalisée en 1943 alors qu’il a fui aux Etats-Unis. Tout n’est que mouvement : chevaux, chariots, femme volante, soldats (en haut à gauche, cachés dans la brume) se déplacent. On remarque surtout la présence de ce juif errant (en bas à gauche), avec son baluchon sanglant. Il faut fuir ou mourir. Le cadavre qui gît sur le sol enneigé, remarquablement mis en avant au cœur de la composition, est un macabre avertissement.

    Marc Chagall, "La Thora sur le dos", 1933, encre, gouache, aquarelle sur papier vergé filigrané, 28,3 x 21 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988.

    Marc Chagall, "La Thora sur le dos", 1933, encre, gouache, aquarelle sur papier vergé filigrané, 28,3 x 21 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988.

    (CNAC / RMN)

    Ici, le juif errant est métamorphosé en une vision proche de la caricature : un rabbin portant une Torah colossale sur le dos. Originaire d’Europe de l’Est, Chagall est influencé par le judaïsme hassidique. Les hassidim cultivent un rapport direct à Dieu plutôt joyeux qui s’exprime par exemple par le chant et la danse. De là les personnages virevoltants et les musiciens qui traversent ses toiles. Marqué par sa foi, Chagall multiplie les références au judaïsme : chandeliers à sept branches, tables de la Torah, mariages juifs foisonnent dans ses œuvres.

    2L’amour malgré tout

    Le visage d’une belle brune revient souvent dans les toiles de Chagall, c’est celui de Bella, que le peintre a épousée en 1915.

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / RMN / GÉRARD BLOT)

    Ce tableau a été peint pendant la première guerre mondiale. Comme souvent, les amoureux semblent seuls au monde. La robe rouge de Bella crée un contraste saisissant avec cet environnement vert (la couleur complémentaire du rouge) qui noie les amants. Les tourtereaux sont enlacés, presque soudés : le nez du peintre se fond dans la collerette de sa belle. Et sont représentés, comme dans beaucoup de toiles, à l’oblique : la diagonale crée une dynamique dans le tableau et donne l’impression que les amoureux sont en apesanteur, dans un rêve éveillé.

    Marc Chagall, "L’Ame de la ville", 1945, huile sur toile, 107 x 82 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953.

    Marc Chagall, "L’Ame de la ville", 1945, huile sur toile, 107 x 82 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953.

    (CNAC / RMN)

    Bella meurt en 1944, mais Chagall continuera de la représenter longtemps, comme dans ce tableau emblématique découpé en petites scènes isolées, qui se lit comme une BD. Bella, dans son linceul, est à gauche, près d’une blonde qui n’est autre que le nouvel amour du maître : Virginia. Chagall se représente en Janus, avec un visage double : à la fois attentif à ses amours, à sa création, et angoissé par la guerre. Au fond, des flammes s’échappent des toits des maisons, et des habitants fuient, encore, sur un traîneau.

    3L'éternel retour au village natal

    Le gros bourg qu’on peut voir sur le tableau ci-dessous est celui de Vitebsk, la ville natale de Chagall, une bourgade ordinaire avec ses clochers à dômes et ses baraques en bois. On le retrouve dans toutes les œuvres de l’artiste qui évoquent la Russie, comme celle-ci…

    Marc Chagall, "La Nuit verte", 1952, huile sur toile, 72 x 60 cm.Collection privée.

    Marc Chagall, "La Nuit verte", 1952, huile sur toile, 72 x 60 cm.Collection privée.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / COLLECTION PRIVÉE)

    … ou celle-là :

    Marc Chagall, "Au-dessus de Vitebsk", 1915-1920, huile sur toile, 67 x 92,7 cm. New York, the Museum of Modern Art (MoMA).

    Marc Chagall, "Au-dessus de Vitebsk", 1915-1920, huile sur toile, 67 x 92,7 cm. New York, the Museum of Modern Art (MoMA).

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / THE MUSEUM OF MODERN ART, NEW YORK / SCALA, FLORENCE)

    Chagall, qui a quitté deux fois la Russie (une fois à 23 ans pour étudier à Paris, puis une autre à 35 ans), l’évoquera toute sa vie durant. Et la physionomie de sa ville natale sera transfigurée par les mouvements artistiques qui séduiront le peintre. Farouchement individualiste, Chagall n’a officiellement appartenu à aucun mouvement, et refusera même de faire partie du groupe surréaliste.

    Il a toutefois été influencé lors de son premier séjour parisien par le cubisme et l’orphisme (dans lequel, pour aller vite, le réel n’est pas découpé en cubes, mais en ronds). On retrouve donc ici Vitebsk… décomposé en formes géométriques simples : des cercles, des triangles et des cubes. Pourtant, Chagall garde sa singularité. Alors que les cubistes s’appuient sur des couleurs ternes (gris, bruns…), lui s’amuse avec des rouges vifs, des verts émeraude et de beaux bleus. Et essayez d’imaginer chez Picasso ou Braque, les deux monstres sacrés du cubisme, un juif errant volant dans le ciel !

    Informations pratiques :

    "Chagall, entre guerre et paix"

    Du 21 février au 21 juillet

    Musée du Luxembourg

    19, rue de Vaugirard, 75006 Paris

    M° Saint-Sulpice ou Mabillon, RER B Luxembourg

    Tél. : 01 40 13 62 00

    10 h-19h30, sauf lundi* et vendredi 10 h-22 h (*hors vacances scolaires zone C et fériés)

    Tarifs : 7,50 € / 11 €

    Mis à jour le <time datetime="2013-02-24T14:18:42+01:00" itemprop="dateModified">24/02/2013 | 14:18</time> , publié le <time datetime="2013-02-24T14:18:36+01:00" itemprop="datePublished">24/02/2013 | 14:18</time>

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / RMN / GÉRARD BLOT)
    2

    Il a traversé deux conflits mondiaux, fui le régime soviétique, fait des allers et retours sur le globe pour chercher la paix… et inlassablement témoigné de l’horreur de la guerre dans ses tableaux. Moyshe Segal, alias Marc Chagall (1887-1985), a tenté de sublimer la violence du monde par l’art et le rêve. Ses toiles, marquées par le judaïsme, le folklore russe et sa vie intime, évoquent une forêt de signes incompréhensibles. La grande exposition qui s'est ouverte jeudi 21 février et se tient jusqu’au 21 juillet au musée du Luxembourg, "Chagall, entre guerre et paix", donne l’occasion de décrypter les signaux parfois complexes envoyés par l'artiste.

    1Un juif errant fuyant la guerre

    Les deux conflits mondiaux et le durcissement du régime soviétique vont contraindre plusieurs fois Chagall à l’exil.

    Marc Chagall, "La Guerre", 1943, huile sur toile, 106 x 76 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953, en dépôt au musée d’Art moderne de Céret (Pyrénées-Orientales).

    Marc Chagall, "La Guerre", 1943, huile sur toile, 106 x 76 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953, en dépôt au musée d’Art moderne de Céret (Pyrénées-Orientales).

    (CNAC / RMN)

    Cette toile a été réalisée en 1943 alors qu’il a fui aux Etats-Unis. Tout n’est que mouvement : chevaux, chariots, femme volante, soldats (en haut à gauche, cachés dans la brume) se déplacent. On remarque surtout la présence de ce juif errant (en bas à gauche), avec son baluchon sanglant. Il faut fuir ou mourir. Le cadavre qui gît sur le sol enneigé, remarquablement mis en avant au cœur de la composition, est un macabre avertissement.

     Marc Chagall, "La Thora sur le dos", 1933, encre, gouache, aquarelle sur papier vergé filigrané, 28,3 x 21 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988. 

    Marc Chagall, "La Thora sur le dos", 1933, encre, gouache, aquarelle sur papier vergé filigrané, 28,3 x 21 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988.

    (CNAC / RMN)

    Ici, le juif errant est métamorphosé en une vision proche de la caricature : un rabbin portant une Torah colossale sur le dos. Originaire d’Europe de l’Est, Chagall est influencé par le judaïsme hassidique. Les hassidim cultivent un rapport direct à Dieu plutôt joyeux qui s’exprime par exemple par le chant et la danse. De là les personnages virevoltants et les musiciens qui traversent ses toiles. Marqué par sa foi, Chagall multiplie les références au judaïsme : chandeliers à sept branches, tables de la Torah, mariages juifs foisonnent dans ses œuvres.

    2L’amour malgré tout

    Le visage d’une belle brune revient souvent dans les toiles de Chagall, c’est celui de Bella, que le peintre a épousée en 1915.

     Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice. 

    Marc Chagall, "Les Amoureux en vert", 1916-1917, huile sur carton marouflé sur toile, 69,7 x 49,5 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, dation en 1988, en dépôt au musée national Marc-Chagall, Nice.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / RMN / GÉRARD BLOT)

    Ce tableau a été peint pendant la première guerre mondiale. Comme souvent, les amoureux semblent seuls au monde. La robe rouge de Bella crée un contraste saisissant avec cet environnement vert (la couleur complémentaire du rouge) qui noie les amants. Les tourtereaux sont enlacés, presque soudés : le nez du peintre se fond dans la collerette de sa belle. Et sont représentés, comme dans beaucoup de toiles, à l’oblique : la diagonale crée une dynamique dans le tableau et donne l’impression que les amoureux sont en apesanteur, dans un rêve éveillé.

     Marc Chagall, "L’Ame de la ville", 1945, huile sur toile, 107 x 82 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953. 

    Marc Chagall, "L’Ame de la ville", 1945, huile sur toile, 107 x 82 cm. Paris, Centre Georges-Pompidou, don de l’artiste en 1953.

    (CNAC / RMN)

    Bella meurt en 1944, mais Chagall continuera de la représenter longtemps, comme dans ce tableau emblématique découpé en petites scènes isolées, qui se lit comme une BD. Bella, dans son linceul, est à gauche, près d’une blonde qui n’est autre que le nouvel amour du maître : Virginia. Chagall se représente en Janus, avec un visage double : à la fois attentif à ses amours, à sa création, et angoissé par la guerre. Au fond, des flammes s’échappent des toits des maisons, et des habitants fuient, encore, sur un traîneau.

    3L'éternel retour au village natal

    Le gros bourg qu’on peut voir sur le tableau ci-dessous est celui de Vitebsk, la ville natale de Chagall, une bourgade ordinaire avec ses clochers à dômes et ses baraques en bois. On le retrouve dans toutes les œuvres de l’artiste qui évoquent la Russie, comme celle-ci…

     Marc Chagall, "La Nuit verte", 1952, huile sur toile, 72 x 60 cm.Collection privée. 

    Marc Chagall, "La Nuit verte", 1952, huile sur toile, 72 x 60 cm.Collection privée.

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / COLLECTION PRIVÉE)

    … ou celle-là :

     Marc Chagall, "Au-dessus de Vitebsk", 1915-1920, huile sur toile, 67 x 92,7 cm. New York, the Museum of Modern Art (MoMA). 

    Marc Chagall, "Au-dessus de Vitebsk", 1915-1920, huile sur toile, 67 x 92,7 cm. New York, the Museum of Modern Art (MoMA).

    (ADAGP, PARIS 2013 / CHAGALL / THE MUSEUM OF MODERN ART, NEW YORK / SCALA, FLORENCE)

    Chagall, qui a quitté deux fois la Russie (une fois à 23 ans pour étudier à Paris, puis une autre à 35 ans), l’évoquera toute sa vie durant. Et la physionomie de sa ville natale sera transfigurée par les mouvements artistiques qui séduiront le peintre. Farouchement individualiste, Chagall n’a officiellement appartenu à aucun mouvement, et refusera même de faire partie du groupe surréaliste.

    Il a toutefois été influencé lors de son premier séjour parisien par le cubisme et l’orphisme (dans lequel, pour aller vite, le réel n’est pas découpé en cubes, mais en ronds). On retrouve donc ici Vitebsk… décomposé en formes géométriques simples : des cercles, des triangles et des cubes. Pourtant, Chagall garde sa singularité. Alors que les cubistes s’appuient sur des couleurs ternes (gris, bruns…), lui s’amuse avec des rouges vifs, des verts émeraude et de beaux bleus. Et essayez d’imaginer chez Picasso ou Braque, les deux monstres sacrés du cubisme, un juif errant volant dans le ciel !

    Informations pratiques :

    "Chagall, entre guerre et paix"

    Du 21 février au 21 juillet

    Musée du Luxembourg

    19, rue de Vaugirard, 75006 Paris

    M° Saint-Sulpice ou Mabillon, RER B Luxembourg

    Tél. : 01 40 13 62 00

    10 h-19h30, sauf lundi* et vendredi 10 h-22 h (*hors vacances scolaires zone C et fériés)

    Tarifs : 7,50 € / 11 €


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique