Elles ont défié les autorités. Seul un petit nombre de Saoudiennes ont pris le volant samedi 26 octobre, les militantes réclamant le droit de conduire ayant appelé à ne plus faire du 26 octobre une date symbole pour éviter la confrontation avec les autorités, tout en assurant que la campagne se poursuivrait.
"Une femme qui a pris le volant à Ryad et une autre à Jeddah (ouest) ont posté des vidéos" sur le compte Twitter de la campagne, @oct26driving, a déclaré à l'AFP l'activiste Eman Al-Nafjan.
"Trois femmes ont pris le volant dans la région de Qatif (est) mais n'ont pas posté de vidéo", a pour sa part déclaré la militante Nassim Al Sada.
Elle a assuré que "la campagne se poursuivra jusqu'à ce que les femmes obtiennent le droit de conduire", tout en assurant que les militantes "ne veulent pas d'affrontement avec le ministère de l'Intérieur".
Les militantes à l'origine de la campagne avaient appelé vendredi les femmes à s'abstenir de défier les autorités le 26 octobre, qui devait constituer le point d'orgue d'une campagne ayant commencé en septembre.
Barrages dans les rues où habitent certaines militantes
Plusieurs femmes ont indiqué avoir reçu des appels du ministère de l'Intérieur leur demandant de ne pas prendre le volant samedi, et le site de la campagne, oct26driving.com, a été piraté.
"Par précaution et par respect pour les mises en garde du ministère de l'Intérieur, et afin d'empêcher que la campagne soit exploitée par d'autres groupes, nous demandons aux femmes de ne pas conduire samedi et de changer l'initiative du 26 octobre en campagne ouverte pour la conduite des femmes", avait déclaré à l'AFP une activiste, Najla Al-Hariri.
La police était déployée dans plusieurs des principales routes de Ryad, comme la route du roi Abdallah, et des barrages étaient établis dans certaines rues, notamment celles où habitent des militantes, selon le photographe de l'AFP.
"La date était uniquement symbolique. Les femmes ont commencé à conduire avant le 26 octobre et continueront de le faire après ce jour", a déclaré pour sa part Eman Nafjan.
Par ironie, certaines militantes ont affiché sur leur compte Twitter le 31 novembre comme nouvelle date de la campagne.
Menaces de sanctions
Le ministère de l'Intérieur avait rappelé jeudi qu'il était interdit pour les femmes de conduire dans le royaume et prévenu que celles qui contreviendraient à cette interdiction s'exposeraient à des sanctions.
Les organisatrices de la campagne ont souligné depuis le début qu'elles n'appellent à aucun rassemblement ou manifestation, et qu'elles demandent aux femmes de prendre individuellement le volant, pour éviter le précédent de 1990, lorsqu'un groupe de femmes ayant défilé au volant de voitures à Ryad avaient été arrêtées.
Plus d'une cinquantaine de femmes ont déjà répondu à l'appel au cours des deux dernières semaines, mettant en ligne des vidéos les montrant au volant.
Vendredi, le porte-parole du ministère de l'Intérieur, cité par le quotidien Al-Hayat, a également prévenu que ceux qui soutiennent la campagne sur les réseaux sociaux s'exposaient à des sanctions allant jusqu'à cinq ans de prison.
Seul pays au monde ou les femmes n'ont pas le droit de conduire
L'Arabie saoudite, royaume ultra-conservateur régi par une stricte application de la loi islamique, est le seul pays au monde où les femmes n'ont pas le droit de conduire. Les femmes ont besoin de l'autorisation d'un tuteur mâle --père, frère ou mari-- pour voyager, travailler ou même se marier.
La question du droit pour les femmes de conduire fait rage sur les réseaux sociaux, beaucoup d'hommes s'y déclarant opposés.
Amnesty International a estimé que "les autorités saoudiennes invoquent le prétexte selon lequel c'est la société qui impose l'interdiction et affirment que la loi ne fait pas de discrimination à l'égard des femmes, mais elles continuent à harceler et intimider les femmes activistes".
Dans un communiqué vendredi, l'organisation de défense des droits de l'Homme a déploré "les coups de téléphone et les menaces sur internet, les interdictions arbitraires de voyage, et le fait de forcer les activistes et les membres de leurs familles à signer des engagements à ne pas conduire", ainsi que "le recours aux médias contrôlés par l'Etat pour discréditer les activistes".
Le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a également appelé l'Arabie saoudite à mettre fin à la discrimination des femmes, parmi d'autres abus.